Quels sont les enjeux et les objectifs ?
La réflexion sur l’organisation de la semaine de travail sur un nombre réduit de jours travaillés s’inscrit autour d’intérêts divers, tant pour les salariés que pour les entreprises. Parmi eux, l’amélioration du bien-être des salariés (plus de repos, articulation plus fluide entre la vie professionnelle et la vie personnelle), facteur de hausse de leur motivation et de leur productivité ; la sobriété énergétique grâce à une limitation des dépenses de l’entreprise (électricité, chauffage…) ou des salariés (carburant) ; la fidélisation des collaborateurs et l’attractivité de l’entreprise qui peine parfois à attirer et à recruter.
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Comment prévenir les risques du passage à la semaine de quatre jours ?
Compte tenu des incidences inévitables du passage à une organisation de la semaine de travail sur un nombre de jours réduit, deux étapes préalables à sa mise en œuvre apparaissent indispensables.
Premièrement, réaliser une enquête auprès de l’ensemble des salariés pour s’assurer que la semaine de quatre jours réponde à leurs attentes : si certains apprécieront l’idée de disposer d’une journée supplémentaire, d’autres pourront y voir des effets pervers : journées de travail allongées impactant leur organisation personnelle et familiale, leurs activités sportives ou associatives ou encore leur capacité physique à endurer des journées de travail plus longues… L’entreprise devra également s’assurer de la compatibilité de ce mode d’organisation du travail avec son activité, ses partenariats, ses clients, etc.
Deuxièmement, envisager une phase d’expérimentation de six à douze mois, par exemple, pour permettre aux salariés d’identifier les avantages et les inconvénients de cette nouvelle organisation de travail et à l’entreprise de mesurer les effets positifs et négatifs sur son activité, sur l’évolution de l’absentéisme ou du turnover ou encore sur la santé des salariés. Cela permettra ainsi aux parties prenantes de prévoir des adaptations voire de mettre fin à ce dispositif si les résultats de ce test ne sont pas suffisamment concluants.
De manière générale, un travail de fond devra également être engagé au sein de l’entreprise pour évaluer l’ensemble des risques professionnels inhérents à la mise en place d’une organisation du travail sur quatre jours. À cet égard, l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) a présenté, dans une fiche datée du mois d’août 2023, les points de vigilance de la semaine de quatre jours en matière de sécurité et de santé des salariés (Fiche INRS Décryptage, La semaine de quatre jours, enjeux pour la santé et la sécurité au travail, août 2023).
Quelles sont les modalités d’organisation de la semaine de quatre jours ?
La semaine de quatre jours (ou quatre jours et demi) peut prendre la forme d’une semaine « compressée », organisée sur un nombre de jours inférieur à cinq jours, dans le cadre de laquelle la charge de travail des salariés n’est pas modifiée. La rémunération n’est pas non plus affectée par cette répartition.
Elle peut également s’inscrire dans le cadre d’un aménagement plus global de la durée du travail sur une période plurihebdomadaire de deux semaines consécutives, avec alternance d’une semaine de quatre jours travaillés et d’une semaine de cinq jours travaillés.
Enfin, la semaine de quatre jours peut être assortie d’une réduction du temps de travail : par exemple, 32 heures réparties sur quatre jours, avec maintien d’une rémunération correspondant à 35 heures.
Quel outil juridique pour cette organisation de travail ?
En principe, hors dispositif d’aménagement de la durée du travail (qui nécessite impérativement la conclusion d’un accord collectif), les entreprises ont le choix du support de mise en place de la semaine de quatre jours : accord d’entreprise ou décision unilatérale précédée d’une consultation du Comité social et économique (CSE) pour les entreprises d’au moins cinquante salariés.
En pratique, le recours à l’accord collectif constitue de loin la voie à privilégier pour envisager la mise en place d’une telle organisation de travail au sein de l’entreprise, d’autant qu’elle présente quand même plusieurs intérêts : dispense de consultation du CSE, caractère consensuel de la démarche, meilleure acceptabilité sociale…
L’accord collectif devra notamment indiquer :
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Les salariés concernés : salariés à temps plein/temps partiel, ancienneté requise ou non, services visés/exclus, etc. ;
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le positionnement du jour non travaillé : identique chaque semaine ou variable ;
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la possibilité éventuelle de report de la journée non travaillée pour des motifs organisationnels concernant l’entreprise et/ou pour des motifs personnels s’agissant des salariés ;
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l’incidence des absences des salariés sur le dispositif (congés payés, RTT, jour férié, maladie…) ;
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les modalités de suivi mises en place au sein de l’entreprise pour s’assurer de la bonne adaptation du salarié à la semaine de quatre jours et vérifier l’absence de perturbation quant à la réalisation de ses missions : dispositif d’alerte, entretiens réguliers, bilan annuel…
Une fois l’accord conclu, il n’est en revanche pas nécessaire d’obtenir l’accord de chaque salarié pour formaliser le passage à la semaine de quatre jours. Une information individuelle ou collective actant de la nouvelle organisation des horaires est suffisante.
Alors, un effet de mode ou un véritable changement culturel ? Quoi qu’il en soit, dans un contexte professionnel marqué par une expansion du télétravail et des modes de travail flexibles, la réflexion sur la semaine de quatre jours a aujourd’hui toute sa place en entreprise.
Le chiffre
70 % des Français se déclarent favorables à la semaine de quatre jours, selon le dernier sondage Ifop pour Politis du 21 mars 2024.