Depuis dix ans, les prépack cessions se révèlent être un outil extrêmement efficace pour reprendre une entreprise en difficulté, car ils combinent la confidentialité des procédures amiables et les avantages des procédures collectives, tout en minimisant les risques et les inconvénients associés à ces dernières. En offrant une solution rapide, confidentielle et flexible, le prépack cession permet de préserver la valeur des entreprises et de favoriser leur reprise dans des conditions optimales.
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Les trois phases du prépack cession
- Ouverture d’un mandat ad hoc ou d’une conciliation
Avec l’aide d’un mandataire ad hoc ou d’un conciliateur, cette phase permet de susciter des offres de rachat, de travailler sur le projet de reprise (périmètre, business plan, négociation de contrat, investissement complémentaire, financement) et de rédiger l’offre de rachat proprement dite. Le tout dans un calendrier souple et en toute confidentialité, sans réelle contrainte de temps (sauf impasse de trésorerie). - Passage par la case « redressement judiciaire »
Dès que l’offre de rachat est finalisée, le dirigeant dépose au greffe du tribunal la déclaration de cessation des paiements (DCP), à laquelle il annexe l’offre de reprise préparée dans un cadre amiable. Lors de l’audience d’ouverture du redressement judiciaire (RJ), le tribunal fixe à brève échéance la date d’audience pour l’examen des offres de cession. - Présentation d’un plan de cession dans un calendrier resserré
Entre l’ouverture du RJ et l’audience de cession (en général, entre deux et trois semaines), il reste possible à d’autres candidats repreneurs de se positionner. Néanmoins, la rapidité de la procédure publique laisse peu de temps pour une réelle offre alternative. En tout état de cause, le candidat repreneur, même s’il est seul en lice, devra convaincre le tribunal que son projet de reprise est viable et solide financièrement pour obtenir un jugement favorable.
Une procédure rapide, mais encadrée
Pour éviter les dérives (accord entre amis et/ou acquisition du dirigeant via un prête-nom), le mandataire ad hoc ou le conciliateur a une obligation de « publicité suffisante » pour susciter le maximum d’offres de reprise. Le tribunal est extrêmement vigilant sur ce point et n’hésite pas à demander aux organes de la procédure de réaliser de nouvelles publicités, une fois le redressement judiciaire ouvert, pour éventuellement susciter de nouvelles offres.
Pour éviter ce risque, qui fait perdre beaucoup de temps à la cession et détériore le fonds de commerce par une période de procédure collective plus grande, il est préférable de prévoir une phase amiable d’une durée d’au moins deux mois.
La confidentialité et la célérité de la procédure permettent d’obtenir de meilleures conditions de reprise
De plus, pour obtenir la procédure accélérée du prépack cession lors de l’audience d’ouverture, il est souvent nécessaire de justifier et d’argumenter sur l’ensemble des diligences de cession réalisées (annonces, prises de contact directes, mandat donné à une banque d’affaires), d’où la nécessité d’être accompagné par un cabinet spécialisé.
En tout état de cause, c’est le tribunal qui, pour finir, tranchera sur cette cession, en sollicitant les avis des organes de la procédure (administrateur judiciaire, mandataire judiciaire, représentant des salariés, dirigeant, juge-commissaire…), ainsi que celui du procureur de la République, dont la présence est obligatoire en matière de cession à la barre.
Une cession préparée est une cession réussie…
Initier le processus de cession en amont, dans le cadre d’une procédure amiable et confidentielle, donne plus de temps aux candidats à la reprise pour travailler leurs offres et la faire valoir aux parties prenantes du dossier (salariés, cocontractants, et parfois même créanciers titulaires de garantie). En effet, il n’est pas rare que le repreneur souhaite revoir des conditions contractuelles, renégocier des contrats et/ou racheter des actifs détenus par des crédits-bailleurs, ce qui prend un certain temps. De plus, il est parfois nécessaire de bien valider les financements en amont.
Là où une cession judiciaire classique dure entre deux et trois mois à compter de l’ouverture de la procédure collective, la phase publique du prépack cession se limite à un mois maximum. Mais si l’on rajoute la durée de la procédure amiable, cela permet aux candidats repreneurs de bénéficier de plus de trois mois pour présenter des offres de qualité au tribunal.
La préservation du fonds de commerce
En fonction du secteur d’activité, notamment en BtoB, l’ouverture d’une procédure collective peut être traumatisante pour l’image de l’entreprise, sa réputation et la confiance de ses partenaires (clients, fournisseurs, bailleurs et créanciers).
Dans un prépack cession, le redressement judiciaire ne dure techniquement que quelques semaines, ce qui limite ces conséquences négatives. De plus, l’annonce de la défaillance de l’entreprise est quasi-concomitante à l’annonce du rachat, ce qui permet de donner de nouvelles perspectives à l’entreprise. Pour finir, le caractère confidentiel du prépack cession et la célérité de la procédure permettent d’obtenir de meilleures conditions de reprise, tant sur le volet social que sur le prix de cession, souvent bien plus élevé qu’en procédure collective.
Le prépack cession peut aussi être une opportunité pour le dirigeant de l’entreprise en difficulté
Les avantages du prépack cession
Pour le repreneur, c’est l’opportunité d’acquérir clés en main une activité dans des conditions favorables :
- en choisissant le périmètre des actifs repris ;
- en ne reprenant que les salariés indispensables à la future activité ;
- en renégociant les contrats repris avec de meilleures conditions ;
- en proposant un prix de rachat souvent faible, en comparaison d’une acquisition classique ;
- sans reprendre les dettes ni les sûretés (sauf exception et avec l’accord du repreneur) ;
- sans avoir à supporter le coût de licenciement des salariés non repris (les indemnités sont prises en charge par la procédure collective via l’avance AGS, le régime de garantie des salaires).
De plus, la phase préparatoire laisse au repreneur le temps de bien faire toutes les due diligences d’acquisition, notamment comptable, fiscale, sociale et juridique, et donc de s’assurer de la pertinence stratégique de ce rachat.
Les exigences du prépack cession
Pour bénéficier d’un prépack cession, les candidats repreneurs doivent être capables de présenter, dès l’ouverture de la procédure collective, une offre de reprise véritablement aboutie et satisfaisante sur tous les éléments suivants :
- une offre ferme, non assortie de conditions suspensives ;
- une offre finalisée, ne contenant pas d’éléments manquants restant à compléter ;
- un périmètre de reprise le plus large possible, avec une préférence pour un plan de cession total et non partiel ;
- un niveau d’emploi préservé au maximum ;
- un projet véritablement viable, cohérent et sérieux, assurant la pérennité de l’activité reprise ;
- un prix offert généralement « mieux-disant » que dans le cadre d’un plan de cession classique ;
- une garantie irréprochable sur le paiement du prix de cession (virement bancaire, garantie bancaire à première demande ou chèque de banque) ;
- un financement solide et justifié, pour couvrir l’opération de reprise (y compris la reconstitution du besoin en fonds de roulement, les futurs investissements, la trésorerie de démarrage, etc.).
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L’accompagnement, essentiel pour le succès de l’opération
Il est indispensable de solliciter le plus tôt possible (avant même la phase amiable) un cabinet spécialisé. En effet, le professionnel pourra établir la stratégie, un rétroplanning de la procédure, faciliter la rencontre avec le mandataire ad hoc ou le conciliateur en amont, renégocier avec les cocontractants et préparer le dossier de rachat à la barre au plus tôt. Et pour cause : les réflexes à avoir en de telles circonstances sont significativement différents de la gestion habituelle d’une entreprise.
Le prépack cession peut également être une opportunité pour le dirigeant de l’entreprise en difficulté. En effet, il est vraiment la clé dans ces moments-là. C’est d’ailleurs le seul à pouvoir décider de s’orienter, ou non, vers un prépack cession. Aussi n’est-il pas rare que le dirigeant diligent pour trouver une sortie par le haut et sauvegarder les emplois soit mieux traité dans ce type de procédure. Un contrat d’accompagnement post-cession et/ou un CDD de plusieurs mois sont régulièrement mis en place, à la fois pour assurer une continuité d’exploitation et favoriser le rebond de l’ancien dirigeant.
Cela permet d’avoir un climat social plus serein au sein de l’entreprise et d’avoir des échanges constructifs sur les perspectives. De même, du point de vue judiciaire, le dossier de cession arrive mieux préparé, en toute transparence et sans tension, sous la supervision du mandataire ad hoc ou du conciliateur, puis sous le contrôle du tribunal et du procureur de la République.
Les principaux prépack cessions de ces dix dernières années
Le voyagiste Fram repris par LBO France en 2015
Le réseau social Viadeo repris par Le Figaro en 2016
Les restaurants La Pataterie rachetés par deux fonds d’investissement en 2017
Les plats cuisinés William Saurin repris par le tandem Cofigeo-Arterris en 2017
Les magasins Tati repris par l’enseigne Gifi en 2017
Le club de foot Racing Club de Lens repris par Joseph Oughourlian en 2017
Le tailleur de pierre angevin Bonnel MH repris par Vinci en 2018
L’intégrateur MC Group Parson repris par VoiP Telecom en 2019
Les vêtements Naf Naf repris par SY Corporate Finance en 2020
Les magasins La Grande Récré rachetés par JouéClub en 2023
La start-up nantaise Airseas reprise par Kawasaki Kisen Kaisha, Ltd. début 2024