« Que faut-il entendre par ancrage territorial ? » D’entrée, David Ouvrard, directeur régional Pays de la Loire et Bretagne du Cabinet Stan France et expert en stratégie d’ancrage territorial, a tenu à poser les bases. Invité des vœux du Medef Vendée, le 5 janvier dernier dans les locaux de la CCI Vendée, il a expliqué que « l’ancrage territorial est une forme de lobbying, même si ce terme est actuellement assez mal connoté. Pour une entreprise, c’est l’art de convaincre les décideurs locaux, d’être influente sur son territoire. » Et de préciser : « Être influent, ce n’est pas forcément vouloir absolument changer la décision. C’est simplement être reconnu comme une entreprise qui compte sur son territoire et participe aux différents projets. »
Le territoire, un espace de décision stratégique
Pourquoi engager une stratégie d’ancrage territorial ? « Il y a au moins trois grandes raisons majeures à cela, répond David Ouvrard. D’abord parce que l’échelon territorial est aujourd’hui un espace stratégique pour le développement des entreprises. Pendant très longtemps, les très grandes entreprises, surtout, travaillaient leur relation avec leur territoire entre le mardi et le jeudi à Paris, puisque les grands élus locaux étaient aussi parlementaires. Depuis la décentralisation, le non-cumul des mandats ou encore la crise Covid, la décision politique, institutionnelle, économique a été ramenée au cœur des territoires. Les vrais patrons des territoires, ce sont les élus des collectivités. »
« Les territoires sont aussi des lieux de concrétisation de toutes les grandes mutations et transformations, poursuit l’expert. Sobriété foncière ou énergétique, gestion raisonnée des ressources, toutes ces questions-là se posent dans les territoires. Les acteurs locaux attendent donc des engagements forts des entreprises pour répondre aux défis majeurs de notre société. »
Troisième raison : les territoires sont des espaces de formation des opinions, où naissent quelques fois des divergences voire des oppositions entre les intérêts économiques, sociaux ou environnementaux. De plus en plus, quel que soit le projet, même s’il présente un caractère structurant, même s’il est facteur d’emplois, ça ne suffit plus à le rendre acceptable. Pour qu’un projet soit accepté, il doit être compris et partagé par le territoire. » La mise en œuvre d’une stratégie d’ancrage va donc contribuer à corriger une perception et à lever des freins. « L’objectif d’une stratégie d’ancrage territorial, complète David Ouvrard, peut répondre à une nouvelle stratégie de l’entreprise, pour partir à la conquête de nouveaux marchés, développer une nouvelle activité ou un projet innovant, mais aussi bâtir ou renforcer sa notoriété. »
Six grands principes
Le directeur régional du Cabinet Stan a ensuite rappelé les fondements principaux d’une bonne stratégie d’ancrage. « D’abord, il faut s’adresser à celles et ceux qui font l’opinion et embarquer avec vous tout un réseau de parties prenantes pour en faire vos alliés, voire des prescripteurs. Ensuite, il faut produire et mettre en avant les valeurs de l’entreprise, savoir les expliquer. L’entreprise doit également être en capacité d’affirmer son identité. Elle doit penser et travailler sur le long terme, et donner du sens à ce qu’elle fait. Sixième et dernier principe : le discours de preuves qui montre que vous êtes vraiment un acteur ancré sur le territoire.»
Quatre étapes clés
Après la théorie, place au concret et à l’élaboration d’une stratégie. David Ouvrard la résume en quatre étapes. « Il faut identifier les enjeux et les objectifs. Fixez-vous des objectifs clairs, atteignables et mesurables. Ne soyez pas trop ambitieux. Cela prend du temps. » La seconde étape consiste à définir ses cibles et parties prenantes. « Vous devez avoir une bonne connaissance et une compréhension fine du territoire. C’est un point essentiel qui conditionne la réussite de votre stratégie. » Troisième étage de la fusée : déterminer le contenu et définir les éléments de langage à déployer. À ce moment-là, vous pourrez passer à la quatrième étape : le “comment”. »
Les outils
Pour accompagner la mise en œuvre de cette stratégie, l’entreprise a plusieurs outils à sa disposition, à commencer par l’intelligence économique. « Il s’agit de toute la data que vous pouvez identifier en lien avec votre projet sur votre territoire, indique David Ouvrard. C’est aussi savoir reconnaître les visages, quels sont les réseaux et les relations économiques de chaque cible, de chaque partie prenante. » Second élément : la communication. Relations presse, conférences de presse, livre blanc, événements, partenariat ou mécénat, toutes ces formes de communication sont utiles à la notoriété de l’entreprise et participe à son ancrage territorial solide et pérenne. Tout comme l’animation de réseaux ou la mise en place de cercles de réflexion ou de comité de parties prenantes. » David Ouvrard conclut : « Tisser des liens sérieux avec les acteurs économiques, sociaux et associatifs du territoire est une façon de positionner l’entreprise au cœur des enjeux du territoire. C’est par une démarche de co-construction et de confiance avec les acteurs et décideurs locaux qu’elle peut assurer son développement. »