Couverture du journal du 26/04/2024 Le nouveau magazine

Le port de Nantes Saint-Nazaire s’ancre dans la transition

Éolien en mer, hydrogène, zone industrielle bas carbone… Nantes Saint-Nazaire Port se tourne un peu plus vers la transition énergétique et environnementale. Tour d’horizon de ses différents projets.

projet Eole

Actuellement en phase d’études, le projet Eole, une base d’intégration d’éoliennes de grande dimension, doit être soumis cette année à concertation (vue prospective non-contractuelle). © NSNP

Quel bilan de l’année 2023 et quelles perspectives pour 2024 ? Le 19 janvier dernier, Nantes Saint-Nazaire Port réunissait la presse dans ses locaux nantais pour y dévoiler les grandes tendances de son activité et évoquer ses projets réalisés, en cours et à venir.

En préambule, Christelle Morançais, présidente de la Région Pays de la Loire et du Conseil de surveillance de Nantes Saint-Nazaire Port, a martelé : « Je veux être pour le port une présidente de combat, sur deux volets. D’abord, défendre et préserver le trafic. C’est le cœur de métier du port, et qui doit le rester. » Avant d’ajouter : « Le deuxième combat, c’est la transition du port », encore très dépendant des énergies fossiles. D’où les trois objectifs inscrits dans le plan stratégique 2021-2026 de Nantes Saint-Nazaire Port : « réussir la transition énergétique et écologique », « conforter le rôle de porte maritime du grand Ouest » et « servir le développement économique et social de l’estuaire de la Loire ».

Trois nouvelles lignes en 2023

À mi-parcours de ce plan stratégique, où en est-on ? D’abord, le déploiement du plan s’appuie sur le développement du port de commerce. À cet égard, Michel Puyrazat, président du directoire par intérim de Nantes Saint-Nazaire Port1, s’est réjoui de « trois belles avancées » : la nouvelle ligne maritime Con-ro (conteneurs et roulier), opérée par Bahri Lines, reliant Asie et Europe, qui fait escale une fois par mois à Montoir-de-Bretagne, le service Wec Lines reliant sud et nord de l’Europe avec deux navires par semaine, et en matière de roulier, une troisième ligne mise en place depuis le milieu de l’année 2023, avec deux départs par mois vers la Turquie pour l’export des véhicules produits dans l’usine Stellantis de Rennes.

Un foncier orienté transition énergétique

Le foncier et sa valorisation sont un autre volet important du plan stratégique du port. En plus du développement de projets immobiliers logistiques et tertiaires, le domaine foncier intègre plus avant la transition énergétique. « Parmi les projets innovants, le data center flottant Denv-R, sur le quai Wilson à Nantes, sera mis en service au premier trimestre de cette année », illustre Michel Puyrazat. Autres réalisations : le démarrage, il y a un an, de la centrale photovoltaïque Engie green à Montoir-de-Bretagne, avec ses 9 hectares de panneaux solaires pour une production de 7,6 MW, le projet Enerdigit, installé en décembre sur le site portuaire de Nantes Cheviré, dédié au stockage et à la redistribution d’électricité, ou bien, dans la même zone portuaire, Harmony Energy, avec l’installation d’une entreprise de stockage d’électricité pour une mise en service prévue courant 2026.

centrale photovoltaïque Engie Green

Avec ses 14 000 panneaux solaires, la centrale photovoltaïque exploitée par Engie green, à Montoir-de-
Bretagne, est entrée en service en janvier l’année passée. © NSNP – F. Badaire

Eole, nouvelle infrastructure pour l’éolien en mer

La transition énergétique du port, c’est aussi le développement de la filière des énergies marines renouvelables. Après le déploiement du premier parc éolien en mer français au large de Saint-Nazaire, le port a été choisi pour réaliser l’installation du parc éolien Emyn (62 éoliennes situées entre l’île d’Yeu et Noirmoutier). Il verra ainsi transiter les composants de ces éoliennes entre le printemps 2024 et l’automne 2025. Toujours en matière d’éolien, Nantes Saint-Nazaire Port ambitionne de s’ancrer encore davantage dans le paysage avec le projet Eole, une base d’intégration d’éoliennes d’une puissance de 20 à 25 MW, devant répondre aux besoins de la filière à grande échelle. Concrètement : plus de 700 m de quai d’une capacité de 15 à 30 tonnes par m2, 12 à 14 m de tirant d’eau, et la possibilité d’accueillir des objets de plus de 300 m de haut. Une phase de concertation est prévue en 2024, et la mise en service est envisagée pour 2028-2029. « Il y a une concurrence importante et c’est un vrai enjeu national de pouvoir répondre présent, souligne Michel Puyrazat. Lors des Assises de l’économie de la mer (qui se sont tenues à Nantes les 28 et 29 novembre, NDLR), Emmanuel Macron avait fixé l’objectif [sur l’éolien en mer] à 45 GW opérationnels en 2050. L’éolien offshore flottant est un enjeu majeur et le projet Eole fait clairement partie de ces outils qui nous permettront demain de continuer à être présents, même si nous le sommes d’ores et déjà aujourd’hui avec la confirmation d’Emyn, et cela va nous donner un atout complémentaire dans la démonstration de la capacité des équipes de la place portuaire dans son ensemble à pouvoir répondre à cet enjeu. »

Zibac, hydrogène et e-kérosène

Symbole de cette transition en train de s’opérer, la zone industrialo-portuaire de Saint-Nazaire a été désignée l’an passé lauréate de l’appel à projets Zibac (Zone industrielle bas carbone) lancé par l’Ademe. Une labellisation qui permettra d’obtenir des financements pour étudier et accélérer le déploiement d’actions de décarbonation du port, avec l’objectif de -50 % d’émissions en 2030. Dans cette veine, l’hydrogène prend aussi toute sa part, comme en témoigne l’unité de production et de distribution d’hydrogène renouvelable (250 MW) qui doit voir le jour à horizon 2028, sur une parcelle de 12 ha au nord du terminal multivrac. Pour ce projet, c’est le Nantais Lhyfe qui a été désigné lauréat de l’Appel à manifestation d’intérêt en fin d’année dernière. Parmi les autres projets dans les cartons de Nantes Saint-Nazaire Port : la poursuite avec EDF du développement de Take Kair, visant à produire du e-kérosène, un kérosène de synthèse, à partir de CO2 capté dans une cimenterie de Mayenne, et GOCO2 (pour Grand Ouest CO2), projet de captage, de transport et de séquestration de CO2.

Un programme d’investissement de 33,5 M€ en 2024

Enfin, au chapitre investissements, Nantes Saint-Nazaire Port a consacré l’an passé 31,9 M€, destinés notamment aux études relatives au projet Eole, à l’aménagement du site de pré-assemblage Emyn, à l’achat de trois pontons pour l’entrée est du bassin de Saint-Nazaire et à l’aménagement de plates-formes logistiques. Le financement de ces investissements comprend notamment 24,3 M€ de Nantes Saint-Nazaire Port, 2,7 M€ de la Région des Pays de la Loire, 2,2 M€ de l’État et 1,2 M€ du Département de Loire-Atlantique. Pour l’année 2024, le programme d’investissements s’élève à 33,5 M€, avec notamment 19,5 M€ dédiés aux opérations d’entretien du patrimoine visant à réduire l’empreinte carbone, développer la multimodalité et déployer la numérisation, et 14 M€ pour le développement de la logistique portuaire, des énergies renouvelables, notamment l’éolien flottant, et valoriser le domaine foncier.

1 L’année 2024 verra le renouvellement des instances de gouvernance du port, notamment l’arrivée d’un nouveau président du directoire qui devrait être nommé au printemps.

Trafic : le port s’en sort mieux que la moyenne des ports français

En matière de trafic, Pascal Vialard, président de l’Union maritime Nantes Port, est revenu sur l’année écoulée : « On a un volume global à -4 %, dans un environnement français pour la moyenne des ports qui est à -7 %. » Le trafic total du port de Nantes Saint-Nazaire s’élève ainsi à 28,4 millions de tonnes (Mt) en 2023, dont 21 Mt à l’import et 7,3 à l’export.

Parmi les autres données dévoilées par Nantes Saint-Nazaire Port : les exportations ligériennes de pétrole brut ont, l’année passée, progressé de 33 % par rapport à 2022, et le trafic de gaz naturel liquéfié (GNL) reste à un niveau élevé, à 8,1 Mt. À noter également, les importations de produits destinés à l’alimentation animale ont gardé leur « bonne dynamique » (+5 %) par rapport à 2022, les vracs liés au secteur du bâtiment et de la construction restent « globalement stables », les activités du terminal roulier progressent de 13 %, bien aidées par la reprise de l’activité du secteur automobile. Enfin, les activités du terminal à conteneurs de Montoir-de-Bretagne se sont « globalement maintenues ».