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Le Croisic et La Turballe : leurs criées nagent en eaux troubles

Un avenir incertain se profile pour les criées du Croisic et de La Turballe. Une conséquence de la fragilisation globale de la filière pêche, alors même que cette dernière représente un marqueur économique fort pour le territoire de Loire-Atlantique et la presqu’île guérandaise. Plusieurs pistes de réflexion sont d’ores et déjà lancées pour conserver les deux criées à l’horizon 2026.

La criée du Croisic

La criée du Croisic. Photo Service communication ville du Croisic

Par la mer, elles se font face, la langue de Pen Bron s’étirant au milieu. Par la route, seuls dix-sept kilomètres les séparent. Historiquement implantées sur le territoire, avec chacune leur spécificité, faisant vivre plusieurs centaines de familles, les deux criées du Croisic et de La Turballe sont toutes deux mises à mal depuis quelques années, à l’instar de la filière pêche d’une manière générale.


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Sur la base d’une étude mettant au jour quatre scénarios possibles quant au devenir des deux sites dans les deux ans à venir, le Département, exploitant via la SAEML (Société anonyme d’économie mixte locale) Loire-Atlantique Pêche et Plaisance, a annoncé le 5 juin dernier qu’en attendant une décision définitive en 2026, les deux criées du Croisic et de La Turballe demeureraient toutes deux en fonctionnement. D’ici là, le Département devra trancher entre les quatre scénarios, dont trois reposent sur la complémentarité des deux structures (sous-délégation, viviers à La Turballe ou spécialisation), le quatrième envisageant la fermeture de la criée croisicaise, induisant de facto la construction de nouvelles infrastructures à La Turballe. Les deux sites portuaires entrent donc dans une période bisannuelle houleuse, que le Département compte mettre à profit pour rebooster l’activité de part et d’autre de manière pérenne et constructive. Avant qu’une décision ne soit actée en 2026, un point d’étape sera réalisé mi-2025.

Volonté d’action des acteurs publics

Le Conseil départemental indique dans son communiqué que « la durabilité de la pêche et les enjeux de transition écologique au sein de la filière pêche devront être pris en compte dans les perspectives de modernisation des outils et infrastructures sur les deux ports tout comme l’impact du cadre réglementaire fixé par l’Europe sur les flottilles ». Pour ce faire, plusieurs millions d’euros d’investissement sont d’ores et déjà prévus pour rénover les deux criées, dont 300 k€ sur 2024. En outre, le Département a annoncé les actions suivantes : remise à niveau des finances de la SAEML ; mise aux normes des espaces de vente pour les rendre plus lisibles et mieux contrôlables (qualité et sécurité sanitaire des produits, système de vente optimisé et interactif entre les deux criées) ; spécialisation renforcée des deux sites ; rénovation des bâtiments ; déploiement d’actions commerciales et nouvelles offres de services ; étude préventive sur la capacité du port turballais à accueillir l’ensemble des besoins.

« C’est le choix de la raison et de l’humain de maintenir les deux criées. La filière pêche est notre identité et la complémentarité de ces deux criées est un atout important », a témoigné Nicolas Criaud, président de Cap Atlantique, l’intercommunalité accueillant les deux cités portuaires, desquelles quatre-vingts bateaux et deux cent vingt marins partent tout au long de l’année. Si la criée de sa commune se concentre en effet sur les crustacés et les produits nobles, celle de La Turballe (65 % de l’activité globale) mise plutôt sur les poissons et les volumes. « À la Turballe les sardines, et au Croisic la langoustine », a résumé en image Michèle Quellard, maire du Croisic.

Eric Le Méro, nouveau directeur général de la SAEML

Eric Le Méro a pris la direction générale de la SAEML et la présidence de Loire-Atlantique Nautisme (Lan) regroupant en plus de La Turballe et du Croisic, Pornic, Pornichet, Le Pouliguen-La Baule, Piriac et Blain. « C’est certain, la vie de la pêche est actuellement compliquée », admet-il en préambule. « La fragilisation de la filière est multifactorielle – “pêche bashing”, crise du gasoil, perte de bateaux, perte d’acheteurs, exode de certains pêcheurs, etc. – et il faut prendre en compte à la fois la préservation des ressources halieutiques, mais aussi le changement climatique et les modifications des conditions de pêche imposées », explique Eric Le Méro. « Les derniers mois ont contribué à fragiliser encore plus la filière, avec la fermeture pendant un temps du golfe de Gascogne, une mauvaise campagne de thon et des eaux qui ne cessent de se réchauffer. » Pour autant, confiant dans ses « équipes compétentes et motivées », le nouveau commandant de bord de la SAEML entend bien redresser la barre. « Une feuille de mission m’a été donnée, souligne-t-il : garder les deux criées et faire en sorte que les deux ports travaillent en bonne synergie, sans exclusivité et en capitalisant sur les marques et spécificités de chacune par type de produits ». Dans ce but, une rénovation de l’outil informatique se révèle indispensable, n’étant plus assez performant au regard des exigences actuelles et des attentes des clients professionnels. « Il nous faut être plus qualitatifs et plus précis dans les données de la qualité des poissons et des crustacés », explique le dirigeant qui envisage également un recrutement dans les équipes commerciales, techniques et logistiques, pour renforcer l’équipe composée actuellement d’une trentaine de salariés.

En chiffres

2023 : 16,3 M€ de chiffre d’affaires pour La Turballe (4 890 tonnes) et 13 M€ pour Le Croisic (1 685 tonnes). « Une mauvaise saison pour le thon ayant impacté La Turballe », pour Eric Le Méro, nouveau directeur général de la SAEML. ​​​​​

2022 : 23 M€ de chiffre d’affaires pour La Turballe (pour 5 820 tonnes débarquées) et 13,5 M€ pour Le Croisic (1 732 tonnes). « Une année atypique du fait des ventes très élevées de gastéropodes en Espagne », pour Eric Le Méro​​​​​ (39 M€ pour les deux criées en 2021).