Les États généraux de la construction en Vendée se sont tenus le 3 décembre aux Sables d’Olonne. Il s’agissait de décliner au niveau régional la réflexion entreprise au niveau national en octobre 2020 afin de répondre aux défis majeurs du secteur et de préparer le futur de la filière. Si la construction se porte bien, les professionnels sont inquiets pour l’avenir avec deux défis de taille : l’environnement et l’emploi. Olivier Salleron, président national de la Fédération française du bâtiment (FFB), Régis Rousseau, président de la FFB des Pays de la Loire et Hélène Bourcier, présidente de la FFB de Vendée ont fait un point sur la situation et les pistes de réflexion à engager.
UN CARNET DE COMMANDES SUPÉRIEUR À TROIS MOIS
Selon la FFB des Pays de la Loire, les entreprises régionales ont un très bon carnet de commandes en 2021, supérieur à leur niveau normal et au niveau national : pour 80 % des professionnels, il dépasse trois mois. Les autorisations de construire et les mises en chantier sont positives. Même constat au niveau national où l’on n’avait pas connu pareille demande depuis 2007. Elle est portée par la rénovation – qui retrouve son niveau de commandes de 2019 – et la construction de maison individuelles, devenue une question prégnante avec le Covid. En revanche, le logement collectif et le non résidentiel sont à la peine en raison du regroupement récent des communes en EPCI. « Cela a occasionné un creux décisionnel entraînant le gel ou l’annulation de projets », affirme Olivier Salleron qui espère un retour à la normale d’ici la fin 2021. Mais les entreprises tiennent bon grâce aux aides de l’État (PGE, report de charges sociales…).
DIFFICULTÉS D’APPROVISIONNEMENT ET FLAMBÉE DES PRIX DES MATÉRIAUX
Pourtant, à peine sortis de la crise sanitaire, les professionnels du bâtiment sont confrontés à des difficultés d’approvisionnement et de prix des matériaux. En cause : la reprise mondiale et notamment celles de l’Asie et de l’Amérique du nord. « 83 % des entreprises de la filière en Pays de la Loire disent avoir des difficultés d’approvisionnement », indique Régis Rousseau s’appuyant sur une enquête de la fédération régionale. Ce qui a pour effet un retard dans la réalisation de chantiers et une désorganisation des équipes. À cela s’ajoute une flambée des prix : +100 % sur le bois, +80 à 85 % sur l’acier. « La question qui se pose aux entreprises est comment répercuter les surcoûts alors que les devis ont été signés ? », s’interroge Régis Rousseau qui craint aussi de voir les projets prévus revus à la baisse ou remis en cause.
Et une nouvelle année d’inflation se profile en 2022. « Nous anticipons encore une hausse de 5 à 10 % au début de l’année avant d’espérer un retour à la normale à la fin du premier semestre 2022 », indique Olivier Salleron. La FFB craint un bilan dégradé des entreprises à la fin 2021 et demande à l’État de mettre en place le Carry back. Ce dispositif comptable permet de recalculer l’impôt sur les sociétés sur deux exercices et donc de réduire l’acompte à verser quand la situation se dégrade. La Fédération a aussi obtenu un gel des indemnités de retard sur les marchés publics.
ÉLARGIR LE VIVIER DE RECRUTEMENTS
Au-delà de cette situation conjoncturelle, un autre enjeu majeur se profile pour les professionnels du secteur. La pénurie de main-d’œuvre. La filière a procédé à 120 000 embauches entre 2020 et 2021 soit plus de 70 000 salariés net dont 3 500 en Pays de la Loire. Et deux entreprises sur trois peinent à recruter. « Conséquence : 69 % des entreprises ne peuvent pas développer leur capacité de production », révèle Régis Rousseau. Et les formations sont pleines. Pour élargir le vivier de recrutements, la FFB fait feu de tout bois. « Nous allons plus largement communiquer sur les avantages du secteur », argue son président. « La profession offre aux jeunes sortis d’un CAP des salaires de 8 % supérieurs au Smic, 30 % de congés payés en plus du minimum légal, le paiement du déjeuner et des transports pour se rendre sur un chantier et a mis en place des accords d’intéressement », énumère Olivier Salleron. Des efforts de communication sont entrepris, via les réseaux sociaux, vers les jeunes pour les réorienter vers des métiers concrets, vers les femmes et vers les adultes en reconversion. « Du CAP à l’ingénieur, les métiers sont multiples et accessibles à tous les profils ». Une campagne d’insertion et de recrutement est en cours dans les quartiers prioritaires où 10 000 embauches ont déjà été réalisées sur les 15 000 prévues.
DE NOUVEAUX MÉTIERS ISSUS DES ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX
Et les formations devront être adaptées pour coller aux attentes des professionnels du secteur et aux nouveaux métiers qui se profilent. « La réglementation environnementale RE2020 qui entrera en vigueur au 1er janvier 2022 et la REP (Responsabilité élargie du producteur en matière de gestion des déchets, NDLR) dont l’application est reportée à 2023 vont nous obliger à rentrer dans un système constructif différent, que ce soit du côté des industriels ou de celui des constructeurs », indique Olivier Salleron. Il va falloir aider les entrepreneurs à acquérir les notions sur le poids carbone engagé dans les constructions. Adapter des solutions techniques pour réduire l’impact des matériaux. Favoriser les matériaux recyclables et l’éco-conception des bâtiments. Promouvoir la préfabrication.
Cette montée en puissance est très intéressante pour les professionnels. Cela donne du sens à nos métiers et les rend plus attractifs ». Ces changements auront nécessairement des répercutions sur les compétences recherchées ; capacité à coordonner des chantiers entre ateliers et terrain, intégration du numérique et des données environnementales, recherche et développement, bureau d’études… « La génération des constructeurs de demain se prépare déjà et devrait contribuer à changer l’image du bâtiment », conclut Helène Bourcier.
Chiffres clés
Le bâtiment en Pays de la Loire c’est :
- 26 000 entreprises
- 7 750 M€ de chiffre d’affaires en 2020, 51 % dans la construction neuve, 49 % dans l’entretien et la rénovation
- 72 645 salariés dont 14 % de femmes et 7 % de cadres
- 27 % ont entre 27 et 34 ans
- 25 % travaillent dans le gros œuvre et 75 % dans le second œuvre
- 1 574 € de salaire minimum (ouvrier de niveau 1)
- 5 CFA professionnels formant 4 500 apprentis/stagiaires par an, du CAP au Bac+2