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Une loi spéciale en attendant la loi de finances pour 2025

À la suite de la censure du gouvernement de Michel Barnier le 4 décembre dernier, en application de l’article 49.3 de la Constitution, le Parlement n’a pas pu achever l’examen ni adopter définitivement le projet de loi de finances pour 2025 (PLF 2025) avant le 1er janvier. Pour pallier cette impasse budgétaire, la Constitution et la LOLF prévoient une procédure exceptionnelle : l’adoption d’une loi spéciale.

Ludovic Souchay.

Ludovic Souchay. BENJAMIN LACHENAL - IJ

Une situation de blocage budgétaire comparable ne s’était pas produite sous la Ve République depuis la censure du budget pour l’année 1980, pour un motif procédural. Les modalités d’examen de la loi de finances sont strictement encadrées par la Constitution et par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), qui impose des délais contraints pour garantir une promulgation avant le début de l’année budgétaire. Les enjeux sont ici majeurs, car en l’absence de budget au 1er janvier, l’État ne serait plus autorisé à percevoir des impôts, menaçant le financement des services publics.


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Une loi pour préserver la continuité des services publics

Pour pallier cette impasse budgétaire, la Constitution et la LOLF prévoient une procédure exceptionnelle : l’adoption d’une loi spéciale. Son objectif est d’assurer la continuité de la vie nationale et le fonctionnement des services publics dès le 1er janvier. Adoptée par le Parlement le 18 décembre, la loi spéciale a été promulguée par le Président de la République le 20 et publiée au Journal officiel le 21 décembre.

Une fois la loi promulguée, le gouvernement de François Bayrou prendra un décret ouvrant les crédits nécessaires pour les services votés. Ce décret permettra de couvrir les besoins des missions et programmes budgétaires pour entamer l’année 2025, mais seulement dans la limite des crédits prévus par la loi de finances pour 2024. Les discussions relatives au budget 2025 devraient donc reprendre dès le premier trimestre de l’année.

Les effets contrastés de la loi spéciale

L’article 45 de la LOLF autorise le dépôt d’une loi spéciale permettant de reconduire les dispositions fiscales et budgétaires de l’année précédente. Cette loi ne remplace pas le budget, mais elle offre un cadre provisoire en attendant l’adoption de la loi de finances pour 2025. Son périmètre reste très limité : elle autorise la perception des impôts existants, ainsi que l’emprunt par l’État et plusieurs organismes de sécurité sociale pour financer les dépenses publiques essentielles.

Toutefois, comme le souligne une note de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) publiée le 22 décembre, cette loi spéciale n’est pas sans conséquences économiques. Du côté des entreprises, elle offre un répit en reportant une hausse prévue des prélèvements obligatoires, estimée à 20 Mds€. Parmi les mesures suspendues figurent l’annulation de la contribution exceptionnelle sur les grands groupes (8 Mds€) et le maintien de la baisse de la CVAE (1 Md€).

Pour les ménages, les impacts varient selon les niveaux de revenus. Si les plus aisés échappent à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (2 Mds€), le gel du barème de l’impôt sur le revenu, non indexé sur l’inflation, entraînera une hausse des montants payés par les classes moyennes et moyennes supérieures. L’OFCE estime que cela augmentera les recettes fiscales de 3 Mds€, et le gel du barème va conduire à rendre 400 000 ménages imposables.

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