Couverture du journal du 02/07/2025 Le nouveau magazine

Pierre-Yves Le Gal, fondateur d’Arzel : « Des aspérités pour se démarquer ! »

Il fait évoluer les codes de l’hôtellerie. À Nantes, après Le Lieu Dit, hôtel bistrot et tiers-lieu de quartier ouvert en 2022, la gestion de l'Astoria, un hôtel de gare, le Breton Pierre-Yves Le Gal, 38 ans, prépare l'ouverture d'un troisième établissement dans le centre, qu'il veut être « juste un hôtel ».

Pierre-Yves Le Gal:

Pierre-Yves Le Gal: "Un bon lit, une bonne douche, un bon wifi, sont nos fondamentaux" . ©Benjamin Lachenal-IJ

Pour cet entretien au sein de votre établissement, Le Lieu Dit, quartier Longchamp à Nantes, nous sommes dans un bateau installé dans la cour. Pourquoi ce voilier ici ?

C’est un vrai totem : son intérêt principal, c’est l’originalité et la surprise. Dans la cour de l’hôtel et du restaurant, il véhicule le message que le produit le plus écologique est celui que l’on ne fait pas fabriquer à nouveau. C’est la notion du réemploi. Cela montre qu’avec un bateau théoriquement non recyclable, on peut avoir des idées nouvelles, en travaillant en local avec le vrai savoir-faire de l’entreprise nantaise Batho. Et le bateau relie l’hôtel à l’univers du voyage et de l’imaginaire. Il ne crée pas de valeur proprement dite, mais c’est un élément marquant, un curseur du Lieu Dit. Lors du lancement de l’établissement on disait : un hôtel, un restaurant et une surprise. On peut y faire des réunions jusqu’à huit personnes. Les clients aiment, on peut prendre son café sur le pont, il y a un côté original, intimiste, pour des petites réunions, des entretiens d’embauche. On l’a beaucoup loué aux entreprises du quartier car on l’a en partie financé par un crowdfunding. Cela nous a permis d’avoir le premier élément de communication du Lieu Dit avec une petite centaine de parrains. Cela a été une rampe de lancement pour la communication.

Quand vous êtes-vous lancé dans l’aventure de cet hôtel ?

Nous ouvrons début 2022, au bout d’un long processus et plus d’un an de travaux, notamment pour passer de 26 à 21 chambres. J’ai acheté le 16 mars 2020, deux jours avant le premier confinement, pour prendre les clefs le 1er novembre 2020, le premier jour du deuxième confinement. Cette période nous a marqués. J’ai fait “tapis” : j’ai investi l’intégralité de mon capital, au pire moment. Je n’ai pas reculé. Le projet a montré sa solidité, qu’avoir des établissements de quartier, une place de village et du service au dernier kilomètre, avait tout un sens. Le restaurant a ouvert fin décembre 2021, l’épicerie en mars 2022 puis, dans la foulée, l’espace extérieur-halle, et enfin l’hôtel le 3 mai 2022. C’est un restaurant avec des chambres au-dessus plutôt qu’un hôtel avec un restaurant. Le restaurant doit d’abord être adopté par les voisins et les entreprises alentour. La toile de fond, c’est la place de village, le côté perméable de l’établissement, c’est notre rôle en tant que commerçant, de surcroît en tant qu’hôtel. Si on n’est pas déjà fort sur nos bases avec nos voisins, avec les entreprises du quartier, c’est une erreur. Cette notion de proximité est essentielle. La cour-halle est la partie tiers-lieu qui s’ouvre de manière gratuite à des actions associatives. Il y a même de la location de planches de surf.

Un hôtel classique est vide le matin et l’après-midi : durant ce temps, on a un espace qui peut être mis à disposition et permet de faire passer la porte une première fois. Il y a ici une vraie mixité : des jeunes, des anciens, des ouvriers, des gens du ministère des Affaires étrangères.

 

« Le cœur de mon modèle économique est l’hébergement, mais c’est tout ce que je vais mettre autour qui différencie, attire » 

On ne se lance pas dans l’hôtellerie sans expérience. D’où venez-vous ?

Marié, père de deux enfants, j’ai grandi entre Rennes et Saint-Malo. Mon père était maçon. Le modèle de l’entrepreneur, je le connais depuis ce temps-là. Je n’en ai jamais voulu d’autre. J’ai un parcours généraliste, mais je me suis très vite intéressé aux métiers de l’hôtellerie et de la restauration. Je suis gourmand et mes parents m’emmenaient au restaurant. Et ce qui m’intéressait autant que l’assiette, c’était de comprendre les coulisses, le process, ceux qui y travaillent. Jeune j’ai fait des saisons dans des restaurants. Je suis entré en école de commerce, à l’Iseg Nantes, obtenant un bachelor en marketing, avec des stages chez le traiteur Hebel. J’ai appris le management, la commercialisation, le marketing, mais aussi l’opérationnel : organiser un mariage, trouver des extras, créer une fiche de fonction, comprendre le brief d’un client, gérer une loge aux 24h du Mans ou un cocktail à la Folle Journée. Après un master de management de l’hôtellerie et de la restauration chez Vatel Paris, je suis parti aux États-Unis, pour un MBA à Los Angeles, en alternance un an et demi, avec un internship (stage en entreprise, NDLR) d’assistant manager pour le groupe Patina qu…