Lors de la récente édition des Pyramides d’argent organisée par la Fédération des promoteurs immobiliers, Johanna Rolland, maire de Nantes et présidente de la métropole, a invité les professionnels de l’immobilier à faire preuve « d’un optimisme combattif face aux enjeux de production de logements neufs ». Dans ce domaine, Christine Serra, la présidente du Club immobilier Nantes Atlantique (Cina), ne ménage pas ses efforts mais constate que dans le fonctionnement de la métropole nantaise, il existe encore beaucoup de freins : « Nous sommes en attente d’un phénomène de rattrapage de la construction car 2020 a été une année blanche. Neuf mois après, le rattrapage n’est pas là et les mesures d’urgence n’ont pas été mises en place. Nous avons eu beaucoup d’échanges avec les élus, la métropole, nous avons l’impression d’être entendus, mais rien n’est fait dans l’opérationnel : les actes nous manquent à l’heure actuelle. Le Plan local de l’habitat (PLH) n’a pas été respecté. Il prévoyait 6 000 logements par an et 40 % seulement ont été produits. Le logement social est impacté comme l’ensemble de l’immobilier, car le neuf permet de réguler l’ancien. L’offre de logements neufs est en diminution régulière depuis cinq ans. » Avec une conséquence directe : les prix de l’ancien s’envolent encore plus que le neuf et les taux de vacance dans la location de l’ancien sont limités à sept jours par an (hors travaux rénovation). Les biens à louer se font rares.
DES IMPACTS MULTIPLES
« La métropole se développe principalement par son solde démographique naturel. 85 % des transactions y sont effectuées par des Nantais. 9 500 habitants supplémentaires arrivent sur la métropole. On devrait être à 7 500 à 8 000 logements par an pour répondre à la demande. Les 6 000 logements prévus par le PLH sont insuffisants, constate Christine Serra, qui souligne : Tout est lié. On ne peut pas parler d’attractivité, de développement d’entreprises, si le logement n’est pas là, si les zones de bureaux et d’activités ne sont pas là non plus. Et nous avons énormément de nouvelles normes, notamment le zéro artificialisation nette des sols, qui arrivent et vont bouleverser ce qui se passe sur la première et deuxième couronnes. Et comme les constructions ne peuvent se faire sur la métropole, elles se font plus loin, avec le développement des problèmes de circulation, de pollution. Cela signifie étalement urbain, ce n’est pas une démarche économe en termes écologiques. »
L’impact de la pénurie de logements a également des conséquences directes sur l’activité des commerces et des entreprises, ce que souligne Laurence Quiblier, responsable de la commission commerce du Cina : « La première difficulté est celle du recrutement car les collaborateurs n’arrivent pas à se loger dans le centre. C’est un impact direct sur le commerce. L’autre difficulté porte sur la question des livraisons et de la logistique, celle du dernier kilomètre. C’est au cœur de toutes les problématiques des commerces. »
RACCOURCIR LES DÉLAIS
Alain Raguideau, past président du Cina, plaide une nouvelle fois pour la réduction des délais d’instruction des dossiers. « On peut les réduire de deux ans, en passant de six à quatre ans ». Il déplore : « Les élus en sont conscients, mais cela ne suit pas ».
Reste que le plus gros frein à la construction de nouveaux logements est sans doute celui de l’acceptabilité par les habitants, réfractaires à ce que de nouvelles constructions aient lieu près de chez eux. « La population pense que la présence des grues en ville atteste d’une réponse immédiate aux besoins. Ils disent : “Nous n’avons pas de problème de logement à Nantes, il y a des grues partout.” C’est une idée reçue. En effet, lorsque la grue paraît, tous les logements qu’elle met en chantier sont déjà vendus depuis deux ou trois ans. L’incompréhension naît souvent du temps long de l’immobilier. Une opération de construction s’inscrit sur cinq à six ans et pour celles qui se décident aujourd’hui nous sommes donc déjà hors mandat s’agissant de leurs livraisons », pointe Christine Serra.
« Construire est la solution, pas le problème. Le citoyen a des enfants, des parents, des soucis de relocalisation. Il faut déstigmatiser les approches. Il y a des choses qui s’expliquent, on le voit quand on réalise des réunions de concertations », estime Alain Raguideau. Le Cina propose ainsi de réfléchir de manière collective à une meilleure co-construction. Pour mieux appréhender cette question, il vient d’ailleurs de lancer une enquête en ligne auprès des habitants de l’Île de Nantes et Euronantes, sur leur perception de leur rapport à la ville des courtes distances (ou ville du quart d’heure) et plus globalement sur l’adéquation des partis pris d’aménagement et d’urbanisme auprès de ceux qui les vivent.
Pour un guichet unique
Le Cina préconise, en synergie avec les membres du Codal (Conseil des acteurs du logement) dont il est fondateur avec la FPI (Fédération des promoteurs immobiliers) et acteur à ses côtés et ceux du CROAPL (Conseil régional de l’ordre des architectes des Pays de Loire), de la FFB (Fédération française du bâtiment) et de l’USH (Union sociale de l’habitat), de simplifier et fluidifier les relations et la communication avec Nantes Métropole. Concrètement il s’agit de raccourcir les délais avant le dépôt des permis de construire grâce à la mise en place d’un Carré Pro, à l’instar de ce qui se pratique dans d’autres services publics tels que La Poste. Cette demande peut aussi trouver réponse dans la désignation d’un interlocuteur dédié à la filière, permettant, au sein de la collectivité, de faire le lien entre les différentes directions et les professionnels pour éviter les avis contradictoires des services et donc l’allongement des plannings.
Les chiffres du logement
- Prix du neuf au 1er semestre 2021 à Nantes : 4 880 €/m2, à Nantes Métropole : 4 640 €/m2 (Source OLOMA : Observatoire du logement de la métropole Atlantique)
- L’augmentation des prix de l’immobilier ancien à Nantes Métropole s’élève au 3e trimestre 2021 à +9 % par rapport à la même période 2020. En comparaison, cette hausse est de 2,2 % à Bordeaux et 5,4 % à Rennes (source : Meilleurtaux.com)