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L’hôtellerie manque plus de personnel que de clients

Après une édition 2020 manquée en raison de la pandémie, la 9e édition des Tendances de l’hôtellerie dans le grand Ouest s’est déroulée cette année au salon Serbotel pour faire le point sur la situation des professionnels du secteur.

Franck Le Roux, Jean-Baptiste Martin, Willemijn Geels, Hervé Duperret , hotellerie

De gauche à droite : Franck Le Roux, Jean-Baptiste Martin, Willemijn Geels, Hervé Duperret © I.J

Pourtant durement touchée par la crise du Covid, l’hôtellerie n’a pas sombré. Certains éléments dénotent même une bonne résistance du secteur, d’après In Extenso. Le cabinet d’expertise comptable a présenté, le 19 octobre, avec la CCI Nantes St-Nazaire, le résultat de sa traditionnelle étude et organisé une table-ronde intitulée « Un pas de côté pour mieux repartir » à l’occasion du salon Serbotel. Plusieurs constats ont ainsi été dressés : malgré un net ralentissement des mises en marché en 2020, avec un rattrapage qui devrait s’opérer en 2021 et 2022, on n’a pas assisté à des défaillances en série. Et en dépit de la crise, peu de projets ont été remis en cause, grâce notamment à la confiance des investisseurs et des banques. Autre leçon de la période : pendant le Covid, les établissements ont su tenir leurs prix moyens.

En 2019-2020, période examinée par In Extenso, ce sont 18 hôtels qui ont été créés dans le grand Ouest, plutôt dans le haut de gamme, et proposant une offre bien-être importante, adaptée à la période. La qualité perçue de l’offre est d’ailleurs l’un des points forts de l’Ouest : les métropoles régionales comme Nantes, Angers ou Le Mans sont légèrement au-dessus de la moyenne nationale (7,9/10 contre 7,8/101), tout comme les grandes agglomérations de la région (Saint-Nazaire, La Roche-sur-Yon, Cholet…), la campagne et le littoral.

VERS UN RETOUR PROGRESSIF À LA NORMALE

Et alors que la crise s’éloigne, les professionnels commencent à entrevoir le bout du tunnel. Depuis le début de l’année, malgré des retards liés notamment à l’allongement de la durée des travaux sur certains projets, 93 hôtels ont été mis en marché en France, soit plus de 6 000 chambres, contre près de 7 000 en année normale. Et les performances de l’été sont bonnes (+2 % de CA par rapport à 2019 hors grandes agglomérations), en particulier sur le littoral et dans les agglomérations de 50 à 300 000 habitants.

Une tendance confirmée au mois de septembre : +5 % de CA hors grandes agglomérations. L’impact de la pandémie s’est en revanche davantage fait sentir sur les métropoles de Nantes et Rennes, en recul respectivement de 14 % et 9 %, en raison notamment de leurs flux de clientèle internationale. Et l’embellie de l’été ne doit pas faire oublier les défis qui restent à relever : des trésoreries toujours en tension et des difficultés tenaces pour recruter.

UNE CRISE ACCÉLÉRATRICE DE TENDANCES

Une fois ce décor planté, la table-ronde, qui réunissait des professionnels de l’hôtellerie, est revenue sur les transformations des établissements pour répondre aux nouvelles attentes des clients. Certaines hybridations, déjà entamées avant la crise, s’installent durablement dans le paysage. Parmi les nouvelles tendances, la quête d’authenticité, mais aussi le « bleisure », qui combine business et loisirs, ou bien le « staycation », le fait de partir en week-end près de chez soi. De nouvelles pratiques qui poussent les hôteliers à repenser leurs offres. Pour Willemijn Geels, vice-présidente Europe du groupe InterContinental Hotels Group, « l’aspect bien-être et famille est plus fort qu’avant ».

Ainsi, une nouvelle clientèle apparaît, celle de touristes venant à l’hôtel avec leurs enfants, pour se détendre mais aussi travailler. « Il est donc important d’avoir du très bon Wi-Fi pour les visios, des espaces pour s’isoler, une musique au bar qui se coupe durant certaines heures…, analyse Hervé Duperret, directeur du pôle hôtelier du family office For-BZH, propriété du fondateur de Samsic, Christian Roulleau. Aujourd’hui, un hôtel est un lieu de vie ». Pour Hervé Duperret, comme pour de nombreux professionnels de l’hôtellerie, le bien-être est devenu un levier, qui a notamment permis de rebondir à la réouverture.

Hôtellerie, accueil

© Shutterstock

DES CLIENTS EN QUÊTE D’EXPÉRIENCES

Comme une revanche sur la crise du Covid, la convivialité revient aussi en force. Franck Le Roux, président d’Evi Hob, société spécialiste de la petite hôtellerie en zone rurale, a misé sur ce besoin de chaleur humaine et d’authenticité. Pour lui, « les gens veulent vivre une expérience ». L’environnement global du lieu doit être de qualité, et plus seulement la chambre et le lit. Et pour s’adapter aux désirs changeants du public, « les hôtels devraient pouvoir changer de déco et de mobilier facilement », selon Hervé Duperret.

Parallèlement, pour répondre à une attente de plus en plus prégnante des clients, mais aussi des investisseurs, le développement durable s’ancre dans l’offre des hôtels, de même que le made in France et les circuits courts, notamment dans les produits alimentaires. « Chez Voco, tous les matelas sont fabriqués à partir de bouteilles en plastique », commente Willemijn Geels.

AUJOURD’HUI, UN HÔTEL EST UN LIEU DE VIE.

LE RECRUTEMENT, UNE OMBRE AU TABLEAU

Mais si les clients se trouvent naturellement au cœur des préoccupations des hôteliers, ils ne sont plus les seuls. Car les hôtels manquent plus de personnel que de clients. Et les difficultés persistantes des établissements à séduire des candidats, qui ne veulent plus forcément travailler le soir ou le week-end, ne sont pas près de s’arranger. « Je suis plutôt inquiet pour les mois à venir », confie Hervé Duperret. Une situation qui pousse les hôteliers à innover pour se rendre attractifs, par exemple en n’imposant plus de codes. Finie la chasse aux piercings et aux jeans troués ! Ce qui a ouvert certaines possibilités en matière de profils… Jean-Baptiste Martin, cofondateur du groupe hôtelier français Suitcase Hospitality, explique : « On accepte de plus en plus les salariés comme ils sont, on sort du profil strictement école hôtelière ».

« On parie sur le savoir-être, la technicité s’apprend », estime de son côté Franck Le Roux. Le rapport entre employeur et salarié est lui aussi en train de changer, donnant une plus large place à la co-construction, c’est-à-dire à une relation basée sur les échanges et les débriefs. Enfin, autre piste à explorer pour pallier le manque de collaborateurs : l’automatisation de certaines tâches à faible valeur ajoutée humaine, comme les check-in et check-out, afin de réserver le personnel pour le contact avec la clientèle.

De nouvelles attentes côté consommateurs donc, mais aussi côté équipes : ce sont quelques-uns des challenges qui attendent les professionnels dans un contexte de reprise à confirmer.

Serbotel 2021 : une « belle réussite dans le contexte actuel »

Salon des métiers de bouche, de la boulangerie-pâtisserie, de l’hôtellerie de la restauration, la 19e édition de Serbotel s’est déroulée du 17 au 20 octobre à Nantes. Compte tenu du contexte, les organisateurs se réjouissent d’une édition « très honorable » et soulignent la joie qu’ont eu les professionnels du secteur à renouer contact et à se revoir. Plus de 29 000 visiteurs ont ainsi fait le déplacement au Parc des Expositions de Nantes, venant à la rencontre des 420 exposants. Les 28 concours, trophées et challenges organisés ont quant à eux illustré le savoir-faire des professionnels et de leur relève, en présence de chefs, meilleurs ouvriers de France et experts. Parmi les moments forts, les Prix Serbotel ont notamment récompensé les innovations des exposants. Ces derniers ont observé sur cette édition une forte activité business, avec de très nombreux rendez-vous d’affaires, participant d’un sentiment de « redémarrage économique général ».

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