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Marché immobilier : les vendeurs doivent ajuster leurs prix

Le point du marché immobilier réalisé par les notaires bretons ne laisse planer aucun doute : la baisse du nombre de transactions se poursuit, dépassant les -23 % au deuxième trimestre. Les vendeurs doivent aujourd’hui revoir leurs prix à la baisse s’ils veulent conclure.

Nantes est la première ville des cinq départements du ressort de la cour d’appel de Rennes à enregistrer une diminution des prix au mètre carré, de 0,7 % et même de 2 % dans son centre pour les appartements anciens. ©IJ Eric Cabanas

« Nous constatons une accélération de la baisse des volumes. La plus forte est en Loire-Atlantique. On passe de -16,6 % à -23 %, entre les deuxièmes trimestres 2022 et 2023. Or, c’est souvent de la Loire-Atlantique que nous vient ce qui va se passer dans le reste de la région », constate Me Nicolas Bosquet, responsable de la communication du Conseil régional des notaires de la cour d’appel de Rennes. Et à la vue des avant-contrats en cours, les volumes de ventes entre le 31 août 2022 et le 31 août 2023, cette baisse s’accentue en Loire-Atlantique, portée à -29 %. Les derniers chiffres de l’Observatoire du logement neuf des Pays de la Loire laissent apparaître une baisse des ventes des appartements neufs de -73 % dans l’agglomération nantaise en un an. « Cela va avoir une incidence sur le marché locatif. Nous avons une crainte d’augmentation des loyers, le prix n’est pas encadré dans tous les secteurs », prévient Me Marie-Virginie Durand, notaire en Loire-Atlantique.

« Adapter les prétentions »

Si l’augmentation des prix reste importante sur cinq ans, la tendance récente est à la baisse. Nantes est la première à enregistrer une diminution des prix au mètre carré, de 0,7 % et même de 2 % dans son centre pour les appartements anciens en un an alors qu’ils augmentent encore de 3,3 % à Rennes durant la même période. « L’amorce de baisse de prix semble venir de la Loire-Atlantique », souligne à nouveau Me Nicolas Bosquet. Dans le neuf, Nantes se stabilise à une augmentation des prix au mètre carré de 1,5 % alors que Rennes enregistre une hausse de 16,8 %. Pour les maisons anciennes, si la moyenne des prix reste encore en hausse, la baisse commence à se faire sentir dans certains quartiers, comme dans le sud (-13 %) et le nord (-5,8 %) de la commune.

« La baisse de prix est déjà enclenchée en Loire-Atlantique », note Matthieu Gentils, notaire en Loire-Atlantique. Les avant-contrats signés aujourd’hui laissent apparaître une accentuation de la baisse des prix entre le 31 août 2022 et le 31 août 2023 : -6,4 % pour les appartements anciens, et -8,6 % pour les maisons anciennes.

« Pour l’heure, les vendeurs se montrent encore réticents à accepter une réduction importante des prix. Nous sommes face à une crise de l’offre et de la demande. Le nombre de biens à vendre s’accumule, ce qui a pour conséquence de gripper le marché. Pour les prochains mois les vendeurs devront adapter leurs prétentions au marché pour vendre. Ainsi, le marché devrait se réguler naturellement avec un recul des prix en 2024 qui favorisera une reprise des volumes par la suite », estime Me Anne Fercoq-Le Guen, présidente du Conseil régional des notaires de la Cour d’appel de Rennes.

Le littoral reste tendu

Le littoral semble moins souffrir. « Les ventes de maisons à prix élevé (de 500 000 € à 1 M€) et celles à petits prix se vendent. Les acquéreurs du littoral ont un pouvoir d’achat immobilier plus important. La marge de négociation des prix y est très faible. Ce marché se différencie nettement de qui se passe dans le reste de la Loire-Atlantique », souligne Me Matthieu Gentils. « Mais le marché intermédiaire, là où les gens ont un besoin de financement, est plus difficile car le recours aux prêts nécessite de l’apport et le taux des prêts a quadruplé en deux ans et demi », constate Me Nicolas Bosquet. Ce dernier reconnaît plus globalement que « le problème de l’apport, notamment pour le primo-accédant, a un véritable impact sur le financement ». Raison pour laquelle les notaires bretons lancent une campagne sur l’entraide familiale, afin d’« informer sur les solutions permettant d’aider les enfants à accéder à la propriété, par le biais de donation, ou de prêt, la première marche étant souvent difficile à gravir ».

Me Nicolas Bosquet souligne en outre que « se porter acquéreur ou trouver une solution sur le littoral est difficile aujourd’hui pour les personnes qui y travaillent. Les proportions de meublés touristiques y sont très importantes et les locations à l’année sont rares et chères. Cette situation ayant un véritable impact local ».

L’opportunité des passoires énergétiques

L’autre motif d’inquiétude est la prise en compte des logements considérés comme passoires énergétiques. Dans les centres anciens de Nantes et Rennes, la question porte sur des milliers de logements qu’il va être difficile de rénover dans les temps impartis. « On annonce 30 000 logements dans la métropole de Rennes se situant en norme énergétique F ou G. L’interdiction de louer pour les bâtiments en G est fixée à 2025 et 2028 pour F », note Me Damien Guéguen, notaire en Ille-et-Vilaine, qui ajoute :« Les pouvoirs publics prennent conscience que ces délais sont quasi intenables. On va sortir énormément de logements du marché locatif : 70 % du parc historique du centre-ville de Rennes ne pourra être loué en 2034 s’il n’a pas été rénové. L’intervention des pouvoirs publics est nécessaire. On est dans l’attente d’ici 2024. »

En attendant, ces passoires énergétiques difficilement vendables peuvent constituer des opportunités pour les investisseurs en capacité de financer les travaux. « À Nantes, on est aussi impacté, mais ces biens peuvent être une opportunité pour les investisseurs avec des prix moindres. Ce n’est pas forcément que négatif », estime Me Marie-Virginie Durand.