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L’industrie toujours en manque de bras

Des projets de recrutement toujours nombreux et jugés pour la plupart difficiles : la pénurie de main-d’œuvre est toujours d’actualité pour l’industrie ligérienne. Le point en Loire-Atlantique avec la dernière enquête de l’Observatoire régional des compétences industrielles (Orci), et avec la société nantaise ACB qui lance des actions pour y remédier.

ACB

Mêlant formation théorique et pratique, la POEC “Formage à chaud“ mise en place par l’entreprise nantaise ACB va lui permettre de recruter une dizaine de personnes sur un métier en tension. © ACB

Pour déterminer les besoins en emplois et en compétences de l’inter-industrie[1] et améliorer l’adéquation entre ceux-ci et l’offre de formation, l’Orci a interrogé les entreprises ligériennes de ce secteur en juin quant à leurs intentions de recrutement au second semestre[2]. L’observatoire restituait les résultats de cette enquête dans les locaux d’ACB (Aries Industries), à Nantes, le 16 novembre dernier.

Six entreprises sur dix envisagent de recruter

« 62 % des entreprises de Loire-Atlantique que nous avons interrogées projetaient de recruter au second semestre de cette année », a débuté Damien Le Mancq, chargé de mission à l’Orci. Un taux en baisse sur un an dans chaque territoire de Loire-Atlantique, particulièrement dans les bassins nantais et nazairien (respectivement -7 et -6 points). « On comptait 4 750 projets de recrutement pour le seul second semestre 2023, en baisse de 22 % sur un an. L’année dernière, on était à près de 6 000, mais 2022 était un pic historique. 4 750 projets est le deuxième plus gros chiffre depuis qu’on réalise cette enquête », souligne Damien Le Mancq. Dans les grandes lignes, 1 830 projets concernent le bassin nazairien, 1 560 le bassin nantais et 1 340 les zones d’Ancenis, Châteaubriant, Clisson.

Du côté des profils, ceux d’opérateurs concentrent plus de la moitié des projets (57 %). Les métiers les plus recherchés chez les opérateurs : formage des métaux (chaudronnerie, tôlerie, serrurerie-métallerie, soudage), opérateurs de premier niveau de qualification et polyvalents, ou encore ajustage, montage et assemblage mécanique. Après les opérateurs viennent les techniciens supérieurs et agents de maîtrise (25 %), puis les fonctions support (10 %) et enfin les ingénieurs (8 %).

Différentes compétences recherchées selon les territoires

« Les compétences recherchées à Saint-Nazaire ne sont pas les mêmes qu’à Nantes et ne sont pas les mêmes qu’à Ancenis, rappelle Damien Le Mancq. Sur le bassin nazairien, on a de grosses tensions sur le formage des métaux : chaudronnerie, tôlerie et découpe. Il y a également de nombreux projets en montage, assemblage mécanique, ainsi que dans les métiers de l’électronique et de l’électricité. À Nantes, il y a une forte demande dans le contrôle qualité, qui n’était pas forcément présente les années précédentes, et dans la maintenance industrielle. Enfin, sur les territoires d’Ancenis et Châteaubriant, ce qui se détache est l’usinage. Les opérateurs de premier niveau de qualification sont très recherchés sur Ancenis. »

L’inter-industrie de Loire-Atlantique, qui a vu ses effectifs salariés passer de près de 59 000 en 2015 à 68 600 fin 2022, court malgré tout encore et toujours après la main-d’œuvre. Et ce n’est pas faute de proposer des emplois durables (six projets de recrutement sur dix sont des CDI) et des niveaux de rémunération plus attractifs : « Un opérateur de production dans l’industrie gagne 15 % de plus que dans le BTP ou dans l’agroalimentaire », estime Damien Le Mancq. Les tensions de recrutement restent ainsi prégnantes, avec deux projets sur trois qui sont jugés difficiles à réaliser par les entreprises. Un chiffre qui atteint même trois postes sur quatre dans le bassin nazairien.

« Nous ne recrutons que sur des métiers en tension »

Ces difficultés, Mathieu Pacault, président d’Aries Industries (près de 70 M€ de CA, 250 collaborateurs dont 180 à Nantes), maison mère d’ACB, les connaît bien. « Pour faire simple, nous ne recrutons que sur des métiers en tension », confie-t-il. Les profils recherchés par cette entreprise qui fabrique des machines et des pièces pour l’industrie aéronautique : usineur, ajusteur, ingénieur simulation, responsable de maintenance, technicien de laboratoire ou encore opérateur formage à chaud. « Notre principal enjeu aujourd’hui réside sur les métiers d’ajustage assemblage », souligne Mathieu Pacault. Alors, pour réussir à recruter la trentaine de personnes qui lui font défaut et doivent l’aider à accompagner son activité en « très fort développement », le groupe a notamment misé, en plus de ses partenariats avec des écoles et organismes et de sa participation à des salons d’emploi et job dating, sur la Préparation opérationnelle à l’emploi collective (POEC). « C’est un dispositif de formation financé par l’Opco 2i[3] et Pôle emploi, explique Céline Gallot, responsable RH. Le principe est d’aller chercher des profils potentiellement éloignés de l’emploi et de leur donner les clés pour pouvoir intégrer nos postes en atelier. » D’une durée de neuf semaines, la POEC combine théorie et pratique. Une première POEC sur le poste d’opérateur formage à chaud a été lancée par ACB, avec à la clé dix embauches prévues au 4 décembre en CDD ouvrant sur un CDI. Une opération convaincante qui a poussé l’entreprise à lancer une nouvelle POEC, cette fois sur le métier d’ajusteur-monteur.

Pour dénicher des talents, l’entreprise ne s’interdit rien et ouvre la porte à tous types de profils, candidats comme candidates, à l’heure où les organisateurs de la Semaine de l’industrie, qui se tient du 27 novembre au 3 décembre, ont décidé de mettre un accent particulier sur la féminisation des métiers. « Nous n’avons aucune barrière à intégrer des profils divers et variés, rappelle Céline Gallot. Aujourd’hui, nous sommes en capacité de pouvoir intégrer des profils féminins sur des postes d’ajusteuse-monteuse ou d’opératrice formage. Et je souhaite que nous développions cela parce que c’est aussi l’une des clés pour pouvoir répondre à nos besoins. »

 

[1] Hors agroalimentaire.

[2] Enquête “Les intentions de recrutement des entreprises de l’inter-industrie en Loire-Atlantique au 2nd semestre 2023“ – Orci-pdl.fr

[3] Opérateur de compétences inter-industriel.

 

Et les métiers de l’industrie les plus en tension sont…

Parmi les profils les plus recherchés en Loire-Atlantique : monteurs ajusteurs, assembleurs mécaniques, notamment à Saint-Nazaire, techniciens supérieurs de maintenance, soudeurs, usineurs, serruriers-métalliers, chefs d’équipe, monteurs-câbleurs, chaudronniers et opérateurs de premier niveau de qualification.