Couverture du journal du 03/05/2024 Le nouveau magazine

Le Musée d’arts de Nantes séduit aussi les entreprises 

Directrice du Musée d’arts de Nantes, Sophie Lévy a donné un nouvel élan à la présentation des collections dans un écrin rouvert au public il y a six ans. Elle a aussi tissé un lien avec les entreprises, qui peuvent y organiser des événements ou intervenir en tant que mécènes via le Fonds métropolitain pour la culture. 

L’actuelle exposition consacrée à Suzanne Valadon a reçu le soutien du groupe Lamotte Immobilier, de LNA Santé et de SNCF Réseau. Photo IJ-Eric Cabanas

« Le monde culturel est utile à l’économie de la ville, c’est du soft power. Si on veut installer son entreprise à Nantes, il faut que les cadres et les employés aient envie de venir. Une ville est dynamique dans de nombreuses dimensions à la fois. Et la dimension culturelle compte car elle est très visible. D’une certaine manière, nous sommes un vecteur de lien entre les différentes dimensions d’une ville », résume Sophie Lévy. Ancienne directrice du LaM, le Musée d’art moderne de Lille, elle y a rejoint un club de l’Association progrès du management (APM), réseau de 9 000 chefs d’entreprise dans une démarche de réflexion et d’échanges. Son club actuel, baptisé Nantes Les Sardines, rassemble une vingtaine de dirigeants. « J’y ai adhéré car je suis une cheffe d’entreprise, même si le musée n’a pas d’identité juridique, je manage une équipe, j’ai une stratégie d’entreprise, comme une PME. J’apprends énormément à leur contact, je peux leur évoquer mes problématiques. Diplômée d’HEC, je ne prétends pas pouvoir gérer aujourd’hui une entreprise économique, mais je comprends leur mode de fonctionnement et ils m’apprennent énormément, cela m’apporte beaucoup, surtout sur des problématiques de management, de stratégie. C’est très enrichissant d’échanger avec les 23 chefs d’entreprise de mon club », reconnaît Sophie Lévy.  

 Un mécénat organisé 

Le Musée d’arts de Nantes, structure en régie directe, transférée à Nantes Métropole en 2015, n’a pas d’entité juridique en tant que telle. L’équipe du musée gère le budget des présentations, des expositions, les activités pédagogiques, la communication…  

Et quand il s’agit de mener l’acquisition ou la restauration d’une œuvre, l’organisation d’une exposition, la création d’outils de médiation et d’accessibilité, le Musée d’arts de Nantes peut s’appuyer, comme les autres acteurs culturels patrimoniaux de la cité, sur le Fonds métropolitain pour la culture (FMC), qui collecte les fonds auprès des mécènes. Présidé par Alain Boeswillwald, avec trois représentants des mécènes, Vincent Jeanneau (RSM), Yannick Le Bihan (Kaufman & Broad) et Willy Siret (LNA Santé) il a, depuis sa création en 2017, récolté 3 M€ auprès de 46 entreprises.  

« Plutôt que chacun cherche son mécénat, nous chassons en meute », résume Sophie Lévy. Animé par Agathe Bergel, spécialiste du mécénat et du fundraising (collecte de fonds), le FMC se veut un outil de cohésion et d’attractivité territoriale. Ainsi, via cet outil, le Groupe Launay (promoteur immobilier) a apporté une aide déterminante pour l’acquisition du tableau  »Le Livre-Portrait d’André Breton » par l’artiste Hervé Télémaque. Une démarche qui permet au promoteur de marquer son ancrage territorial. « Les mécènes peuvent donner entre 20 et 40 000 €. Les contreparties sont en rapport avec le montant donné. Ils bénéficient d’une importante déduction fiscale1. Si on additionne la contrepartie et la déduction fiscale, c’est intéressant. Cela permet de dire qu’ils font quelque chose pour leur territoire. C’est très important à leurs yeux. En contrepartie, ils peuvent organiser au musée une soirée prestigieuse pour leurs clients, ou une action avec leurs collaborateurs dans le cadre d’une communication interne », précise Sophie Lévy. Les récentes expositions Valadon, Le Voyage en Train ou Hypersensible ont bénéficié de mécénats apportant jusqu’à 25 % d’un budget avoisinant les 600 k€.  

Une question de reconnaissance 

« En me rapprochant du monde de l’entreprise, je me suis rendu compte de l’importance pour le dirigeant d’être reconnu par les élus comme un acteur du territoire. Ce n’est pas que pour des questions d’influence, mais aussi pour des questions de reconnaissance. Le musée joue un rôle de lieu de contact entre le monde économique et la cité. C’est une manière pour les entreprises de montrer qu’elles travaillent, comme les élus, le monde social ou culturel, à l’amélioration du territoire, qu’elles sont utiles pour leurs concitoyens. Nantes est ce qu’elle est parce qu’elle est attractive pour les entreprises. Parfois, il y a une petite timidité car ce sont des cultures différentes. Le monde économique méconnaît le monde politique et vice versa », constate Sophie Lévy. 

Sophie Lévy : « Une ville est dynamique dans de nombreuses dimensions à la fois. Et la dimension culturelle compte car elle est très visible » 

Le contact avec les entreprises se fait aussi dans la mise à disposition d’espaces du musée pour l’organisation d’événements, avec un auditorium de 150 places et le grand hall pouvant accueillir jusqu’à 350 personnes. 

« Il y a une dimension supplémentaire à réaliser un événement au musée d’arts, lieu symbolique de Nantes. Avoir le musée à soi en soirée, en bénéficiant du hall et sa beauté, réaménagé spécialement pour l’occasion, valorise l’image de l’entreprise », reconnaît la directrice du musée. Plusieurs formats sont possibles, avec ou sans visites, cocktail ou dîner assis. « Le hall en soirée est très demandée, car prestigieux », constate Sophie Lévy. 

 

770 000 € de mécénat 

Depuis 2017, le FMC a collecté 770 000 € pour des projets au Musée d’arts (dont 310 000 € pour la réouverture), soit un peu moins d’un tiers du total des fonds collectés (3 M€). Les mécènes principaux du musée sont CIC Ouest (le plus ancien mécène du Musée d’arts), Groupe Lamotte Immobilier, Groupe Launay, LNA Santé, RSM Ouest (jusqu’en 2023), Semitan, SNCF Réseau.