Les obligations d’information « environnementale » du bailleur commercial
Depuis la loi « Grenelle 2 » du 12 juillet 2010, tous les baux commerciaux doivent comporter, notamment, en annexes, un Diagnostic de performance énergétique et un État des risques. C’est au bailleur de fournir ces éléments d’information au plus tôt et lors de la signature du bail.
DPE — Diagnostic de performance énergétique
Outil de mesure clé, le DPE renseigne le futur locataire sur les charges énergétiques des locaux, avec des seuils prévisionnels de consommation d’énergie primaire et d’émissions de gaz à effet de serre.
Depuis le 1er juillet 2021, tout DPE établi à partir de cette date a une durée de validité de dix ans. Ses informations sont devenues opposables au propriétaire, c’est-à-dire susceptibles d’engager la responsabilité du bailleur au titre de son obligation de délivrance, en plus de celle du diagnostiqueur s’il est démontré un écart important entre la consommation réelle et le diagnostic.
À vérifier : si votre DPE a été réalisé entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017, il n’est plus valable. S’il l’a été entre le 1er janvier 2018 et le 30 juin 2021, il expire au 31 décembre 2024 !
ER — État des risques
L’état des risques¹ mentionne, selon la localisation de l’immeuble, son classement par rapport aux risques naturels (inondations, mouvements de terrain, séismes…), technologiques, radon, recul du trait de côte… Il doit dater de moins de six mois à la conclusion du bail et être accompagné d’un document d’information sur la pollution du sol si le bien se trouve dans une zone concernée.
Si son absence au bail ou son défaut de mise à jour sont sanctionnés selon la loi par une résolution du contrat ou une diminution du loyer, en pratique, la résolution n’est encourue que si le preneur apporte la preuve d’un manquement du bailleur d’une « gravité suffisante »².
Les obligations de faire du Bailleur et du Preneur pour certains locaux commerciaux
Deux dispositifs de la Loi Grenelle 2 inscrivent dans la relation contractuelle bailleur-locataire la gestion et l’amélioration des performances énergétiques de l’immeuble.
L’annexe environnementale : Article L. 125-9 du Code de l’environnement
Applicable à tout type de bail portant sur les locaux de plus de 2 000 m² à « usage de bureaux ou de commerce », l’annexe environnementale ne concerne pas (encore) les petits commerces et bureaux isolés ni les entrepôts et bâtiments industriels.
Cette annexe au bail doit comporter des informations réciproques du bailleur et du locataire, dont un descriptif des équipements et de leur performance (chauffage, climatisation, ventilation, éclairage…), des consommations d’eau et quantités de déchets générés. Les parties doivent établir un bilan régulier, selon la périodicité qu’elles fixent librement, sur la performance du bâtiment et des locaux loués, et concevoir un programme d’actions pour l’améliorer.
Conseil : En l’absence de sanction légale, prévoir au bail une clause pénale, voire la mise en jeu de la clause résolutoire à ce titre, permet d’assurer l’exécution des obligations de l’annexe.
Le décret tertiaire : Articles L.174-1/R.174-22 du Code de la construction et de l’habitation
Le Dispositif Eco-Energie Tertiaire » (DEET), également appelé « décret tertiaire » (Décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019), impose une réduction progressive : la consommation d’énergie finale pour les bâtiments à usage tertiaire doit être réduite de 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050 par rapport à 2010. Cette obligation concerne tout bâtiment existant ou à construire, public ou privé, d’une surface plancher minimum de 1 000 m², qui héberge des « activités tertiaires » au sens large.
Elle s’accompagne d’une obligation déclarative : depuis 2022, propriétaire et locataire doivent communiquer, chaque année avant le 30 septembre, sur la plateforme OPERAT leurs consommations au titre de l’année précédente.
Conseil : Pour éviter les doublons ou contradictions, les parties ont intérêt à définir leurs rôles respectifs, ou à déléguer la déclaration à un prestataire privé/gestionnaire de réseaux.
La définition d’un plan d’action cooblige le propriétaire et le locataire selon « leurs responsabilités respectives » fixées au bail. Puisque la loi ne précise pas qui supporte la charge finale des travaux que suppose le Décret tertiaire, il est conseillé de prévoir au bail un système clair de répartition des actions et du coût tant d’un audit énergétique que des travaux de rénovation qui en découleront.
Conseil : Vérifier le contenu de la clause relative aux « mises aux normes » actuelles et futures, et voir si elle met à la charge ou non du preneur celles « relatives aux normes énergétiques et environnementales ».
Cette prévision doit se faire dans le respect des dispositions d’ordre public des baux commerciaux. Depuis la loi Pinel, il est en effet interdit au bailleur de laisser à la charge du locataire les dépenses relatives aux grosses réparations de l’article 606 du Code civil (sa structure, sa solidité générale et remplacement de gros équipements à condition d’intervenir sur des éléments structurels). Il est imposé de définir de façon précise et limitative les charges et travaux qui sont refacturables au locataire.
Dans ces limites, les parties peuvent négocier toute modalité de répartition (ex. : par moitié entre bailleur-locataire, avec un pourcentage de surloyer sur plusieurs années, en capant le montant des travaux) avec l’objectif de prévoir un système viable et cohérent avec les autres clauses du bail (clause de souffrance, d’accession des améliorations, travaux, clause résolutoire…).
Devenue un impératif, l’« environnementalisation » du bail commercial va à long terme, par une démarche proactive, être un levier de valorisation du patrimoine pour le bailleur, et pour le locataire, un levier d’économie, de bien-être au travail et de différenciation, à condition de négocier et de nuancer les clauses concernées, trop souvent perçues comme des clauses d’adhésion, pour les rendre efficientes et non source de conflit entre les parties.
1 Dernière dénomination consacrée par le décret n° 2022-1289 du 1er octobre 2022, en vigueur au 1er janvier 2023.
Cass. 3ème Civ. 21 septembre 2023 n°22-15.850 ; CA MONTPELLIER 19 mars 2024 n°21/03395.