Dans son dernier rapport publié le 27 septembre, la Chambre régionale des comptes Pays de la Loire passe au peigne fin sept ans d’exercices comptables et financiers de La Roche-sur-Yon Agglomération, soit plus de 937 M€ de fonctionnement et d’investissement. Les magistrats jugent la situation financière de la collectivité « satisfaisante, dans la moyenne des communautés d’agglomération de France et de sa région », tout en soulignant ses marges de manœuvre réduites. En revanche, sa dette est sensiblement plus élevée et sa fiscalité plus forte que la moyenne.
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Dans un verbatim adressé à IJ le 1er octobre, Luc Bouard, président de La Roche-sur-Yon Agglomération, réagit. Il juge un rapport « tout à fait utile qui permet de dresser un bilan approfondi de la gestion de la collectivité. Il met en lumière nos réussites, tout en identifiant les domaines dans lesquels des améliorations seront nécessaires. »
L’élu exprime également sa fierté « quant aux résultats financiers positifs soulignés par la CRC. Notre « situation financière satisfaisante » est la preuve tangible et réaliste de l’attention et de la rigueur avec lesquelles nous avons géré nos ressources… Alors, peut-être qu’à un formalisme tatillon, nous avons plus souvent privilégié l’action. Car il s’agit […] de concilier une vision à long terme de plus en plus encadrée par des normes, avec la réactivité indispensable pour répondre aux défis auxquels nous sommes confrontés », se justifie Luc Bouard, qui rappelle aussi « les contraintes budgétaires croissantes ». Le président de l’agglomération yonnaise reconnaît néanmoins que certains points de vigilance mis en avant par la CRC « nécessitent toute son attention pour garantir une gouvernance encore plus efficiente. »
Environnement : peut mieux faire
La Chambre pointe par ailleurs « une stratégie en matière de transition écologique riche mais qui ne respecte pas les objectifs nationaux. » La collectivité a en effet établi un plan comportant un grand nombre d’actions mais doté d’instruments de pilotage (échéanciers, indicateurs, financements) imprécis. La Chambre constate qu’aucun des objectifs imposés par la stratégie bas carbone ne sera atteint en 2030. Le rapport indique ainsi que le nouveau plan local d’urbanisme de la commune de La Roche-sur-Yon prévoit « une augmentation de la consommation des espaces de 31 % sur son seul territoire d’ici à 2032 par rapport à la décennie précédente, ce qui affectera le prochain plan local d’urbanisme intercommunal et pèsera sur les autres communes membres. »
Toujours sur ce volet environnemental, l’instance de contrôle des collectivités locales souligne que « la politique menée pour la plantation de 100 000 arbres ne repose sur aucune étude et que le dispositif de comptage des arbres n’est pas fiable. » Concernant le manque de précision des outils de pilotage et l’opération 100 000 arbres, Luc Bouard concède que « ce n’est sûrement pas faux. Mais peut-être avons-nous privilégié l’action au reporting. Cependant, nous en convenons, en l’absence d’échéanciers clairs et d’évaluations chiffrées des impacts, il est complexe de l’extérieur, de mesurer efficacement les progrès réalisés […] Nous apporterons donc des améliorations sur ces points cruciaux. »
Enfin, la CRC note qu’entre 2017 et 2022, « la consommation en énergie des bâtiments publics a progressé de 12 % en raison notamment de l’extension-modernisation du complexe piscine-patinoire dont la consommation a pratiquement doublé » en cinq ans.
Destination La Roche-sur-Yon : des points de fragilité juridiques et financiers
La Chambre régionale des comptes déplore le fait que la société publique locale (SPL) Destination La Roche-sur-Yon, créée en décembre 2020, ait été contrainte d’augmenter son capital « à peine trois ans après sa création ». Pour rappel, cette société a pour mission la promotion et la commercialisation des activités touristiques sur le territoire.
La Chambre remarque aussi que le contrat de délégation de service public du Potager extraordinaire a été modifié à de nombreuses reprises en l’espace de quatre ans. La collectivité est propriétaire du Centre Beautour, camp de base de ce parc botanique. La gestion du site a été confiée au groupe Estille. « Cette délégation de service a donné lieu de manière irrégulière à un protocole transactionnel avant l’ouverture du site au public en juillet 2023. L’enveloppe des travaux prévus est passée de 1,61 M€ pour le délégataire. Il en est également résulté une augmentation de l’engagement financier de la communauté d’agglomération, qui est passé de 5,2 M€ à 6,5 M€. »
Là encore, Luc Bouard reconnaît que la collectivité doit mieux appréhender les enjeux juridiques et financiers liés à ses satellites. Néanmoins, il rappelle que ces entités « jouent un rôle crucial en tant que bras armés de notre agglomération que ce soit dans le développement économique, touristique ou de l’innovation, contribuant à créer des emplois, à dynamiser notre économie locale […]. Cependant, leur gestion au sein de la relation avec la collectivité doit être encore mieux optimisée. Nous devons veiller à établir des mécanismes clairs et efficaces pour gérer ces partenariats, afin d’éviter toute insécurité financière ou juridique qui pourrait compromettre notre action. Cela inclut une meilleure définition des responsabilités, un suivi rigoureux des budgets et des projets, ainsi qu’une transparence accrue dans la prise de décision… »
Probité et déontologie : une politique à améliorer
Par ailleurs, pour la Chambre régionale des comptes, l’examen de la politique mise en œuvre en matière de probité et de déontologie a montré que celle-ci pouvait être améliorée. « La mise en place d’une cartographie des risques de conflits d’intérêts serait nécessaire, la Chambre ayant constaté par exemple l’absence de déport d’élus intéressés lors de l’approbation de certaines délibérations. »
« Bien que des efforts aient été faits dans ce domaine, il reste des axes d’amélioration pour garantir une transparence exemplaire de nos actions. Nous allons nous y attacher », promet Luc Bouard.
Plusieurs dépenses en lien avec des frais de déplacement ont également montré un contrôle insuffisant générant des irrégularités. Cela concerne notamment le projet de « Festival Les Grognards » en 2019-2020 avec des déplacements pour convenance personnelle, paiement de missions de consulting dont l’existence n’a pu être avérée. Dans son verbatim adressé à IJ, Luc Bouard conclut : « Il faut prendre ces remarques comme des indicateurs de progression. Ces recommandations représentent autant d’opportunités pour renforcer nos pratiques et poursuivre notre engagement en faveur d’une gestion publique transparente. »