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Fleurs comestibles : une filière est en train d’éclore en Vendée

Saviez-vous qu'une nouvelle filière s'organise dans le grand Ouest, et particulièrement en Vendée : la fleur comestible. Pour en savoir plus, direction Coëx où tout a commencé. 

Les fleurs comestibles sont convoitées pour apporter du goût dans les plats. © Le Jardin de Pauline

Le goût “un peu concombre” de la fleur de bourrache, la saveur poivrée de la capucine ou le parfum iodé de la bourrache… Mangées fraîches, les fleurs comestibles s’utilisent pour du goût et de la couleur dans l’assiette. Derrière cette production se cachent bien souvent de petits producteurs qui travaillent en circuit-court et livrent les restaurants autour de leur exploitation.

Une filière à inventer

Membres de l’APFCO, l’association des producteurs de fleurs comestibles de l’Ouest. © APFCO

Pauline Dominicy fait partie de ceux à s’être lancés dans cette production de niche. « Des fleurs comestibles, j’en ai toujours mangé. Et je voulais en savoir plus. J’ai donc poussé les portes du Min (Marché d’intérêt national) de Nantes. Et je me suis alors aperçue que ces produits provenaient du Maroc, d’Espagne ou d’Israël », se souvient-elle. L’idée de produire localement des fleurs prêtes à manger a alors germé. Pauline Dominicy possède des pieds mères depuis longtemps. Alors, elle décide de participer au salon Serbotel pour tester son idée grandeur nature et présenter sa future entreprise. Le succès est au rendez-vous. « Il y avait un monde fou sur mon stand. »

Depuis 2019, elle a créé l’exploitation agricole Le Jardin de Pauline à Coëx, à 15 km de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, où elle travaille sur 2 700 m2. Toute l’année, principalement d’avril à fin octobre, elle cultive 300 variétés de fleurs comestibles, comme la tagète, chacune ayant leurs déclinaisons, ainsi que des fines herbes. Ici, les fleurs sont cueillies le matin pour être livrées dans un délai de trois heures. Elle livre environ 40 clients, principalement des professionnels de l’alimentation installés à Nantes et ses environs mais aussi en Vendée (via un grossiste). « Notre métier premier, c’est de servir les restaurateurs, entre 25 et 30 établissements. » Une production qu’elle vend aussi en circuit-court (via des boîtes apéritives) en direction des particuliers qui « s’y intéressent aussi de plus en plus ».

« Aujourd’hui, la demande (traiteurs, fromagers..) est là mais il n’y a pas assez de producteurs ni de terrains disponibles. De plus, c’est un marché occupé par de petits producteurs pas toujours facilement identifiables. » Pour y remédier, elle espère donc la création d’une filière pour organiser le marché. « Il y a une filière à inventer en surfant sur la culture végan, ainsi que sur les attentes des consommateurs en quête de goût. » Une aventure dans laquelle Pauline Dominicy a convaincu des producteurs de se joindre à elle.

Structurer le monde de la fleur comestible

De cette idée est née en mars 2023 une association, sous l’acronyme APFCO (Association des producteurs de fleurs comestibles de l’Ouest), qu’elle co-préside avec un autre producteur Matthieu Bréant (Jeu de Pam dans le Maine-et-Loire). L’ambition : développer et surtout structurer le monde de la fleur comestible en France. « Le projet est de mettre en place une filière territorialisée avec des acteurs du grand Ouest, ce qui n’existe pas à l’heure actuelle. » Cette association rassemble aujourd’hui 10 producteurs de fleurs comestibles installés majoritairement dans les Pays de la Loire. Parmi eux figurent, entre autres, trois exploitations vendéennes : SCEA1 – Les Vieilles Landes à Landevieille (fleurs comestibles et transformation en sirops, vinaigres et confitures), l’AB de L’Aiguillon à La Faute-sur-Mer (fleurs comestibles, fines herbes et légumes) et Nathal’ail à Commequiers (fleurs comestibles séchées, fines herbes séchées, produits transformés, ail noir).

Si Pauline Dominicy s’attache déjà à former des agriculteurs afin qu’ils trouvent leur voie dans ce secteur, elle veut aller plus loin avec la création d’une formation sur la fleur comestible (d’une durée de 10 à 15 jours), à partir de septembre prochain. Mise en place en partenariat avec le lycée Nature de La Roche-sur-Yon2, elle sera destinée aux restaurateurs et particuliers. « Nous serons les seuls à le faire en France », se félicite la productrice vendéenne.

Qu’en pensent les clients ?

Créer cette filière de la fleur comestible serait une aubaine pour les chefs qui sont les clients les plus demandeurs pour agrémenter leurs plats. Dans les cuisines du restaurant gastronomique L’inattendu, à Saint-Gilles-Croix-de-Vie, le chef Paul Bonneau en raffole « principalement pour le goût ». En second lieu pour la décoration et sublimer ses plats. Il se fait livrer par Le Jardin de Pauline. L’émergence d’une telle filière serait l’occasion pour lui de « mettre en valeur une production locale » et d’« éduquer la clientèle à mieux manger », dixit ce fils d’agriculteurs.

Paul Bonneau, chef du restaurant L’inattendu à Saint Gilles Croix de Vie. © L’Inattendu

Chez les traiteurs aussi, les fleurs comestibles deviennent très tendance. En particulier au sein du Domaine de Bretonnière (15 salariés – CA non communiqué) installé depuis 2006 à Montaigu-Vendée. Afin d’apporter « une originalité » dans les assiettes et « se démarquer », ce traiteur qui s’adresse autant à des particuliers qu’à des professionnels (entreprises, organisateurs événementiels) a pris le parti d’utiliser des fleurs comestibles et jeunes pousses depuis cinq ans environ. Il s’approvisionne auprès de la société Devaud (groupe Le Saint) située à La Roche-sur-Yon qui elle-même se fournit auprès des producteurs du coin. « Nous adaptons les recettes et la décoration en fonction des produits disponibles sur le marché et de la saisonnalité », précise le co-gérant du Domaine de Bretonnière Cédric Guilbaud. Pour lui, il est difficile de savoir s’il y a une réelle demande pour ce type de produit. Mais l’émergence d’une filière serait un vrai plus. « La société Devaud peut nous proposer des variétés non connues. Malheureusement, certaines ne sont disponibles qu’en petites quantités. Or, nous faisons des gros volumes. Par exemple, l’année dernière, nous n’avions pas eu assez de pensées pour réaliser une entrée. Cette filière nous permettrait d’avoir un stock de produits sur lequel nous pourrions compter. » Le traiteur sera notamment au Domaine de l’Issoire à l’occasion des Floralies. L’occasion de mettre à l’honneur les fleurs comestibles dans ses plats et d’apporter avec « subtilité » une touche déco dans les menus.

 

 

  1. Société civile d’exploitation agricole.
  2. Les principaux domaines de compétences de l’établissement sont l’aménagement paysager, l’entretien, la gestion et l’aménagement des espaces naturels et ruraux et l’agriculture.

 

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