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Estuaire Énergies : « Un succès qui dépasse nos attentes »

Face aux enjeux de décarbonation de l’économie, la CCI Nantes St-Nazaire a créé en mars 2023 la société coopérative d'intérêt collectif (SCIC) Estuaire Énergies pour sécuriser l'accès à l’énergie des entreprises. Objectif : leur permettre de reprendre la main sur leurs consommations et factures tout en entamant leur transition. Neuf mois après son lancement, plus de 40 entreprises se sont emparées du dispositif. De quoi réjouir son directeur général, Franck Sprecher.

Estuaire Énergies

Née en mars 2023, la coopérative Estuaire énergies vise à aider les entreprises à faire face à la hausse du prix de l’énergie tout en entamant leur transition. ©Shutterstock

Pouvez-vous rappeler dans quel contexte la CCI a créé la société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) Estuaire Énergies en mars dernier ?

Le directeur général de la SCIC Estuaire Énergies, Franck Sprecher. ©DR

Franck Sprecher : Cette décision a été prise dès la mi-janvier 2023, dans un contexte de nécessité absolue d’engager les entreprises dans la transition énergétique. En effet, la façon dont ces dernières ont été impactées par la crise énergétique a très clairement montré qu’elles ne l’étaient pas suffisamment. Il s’agit donc d’une initiative nécessaire pour espérer atteindre les objectifs que se sont fixés l’État français, l’Europe ou encore les COP.

Quels étaient les objectifs de cette société coopérative ?

Permettre d’ici 2030 aux entreprises sociétaires de réussir leur transition énergétique, de ne plus la subir mais au contraire de s’en servir pour devenir plus compétitives, développer l’emploi sur le territoire et gagner de nouveaux marchés. Cela implique qu’elles planifient des actions sur les trois domaines que sont l’achat, les travaux de performance énergétique et de rénovation, ainsi que la production locale d’énergie.

Neuf mois après la création d’Estuaire Énergies, quel bilan dressez-vous ?

C’est un succès qui dépasse nos attentes puisque l’on a plus de 40 entreprises sociétaires. J’en espérais une vingtaine maximum étant donné que ce n’est pas la première SCIC que je crée. Lors de notre première assemblée générale, le 8 novembre dernier, on a vu à quel point il est intéressant pour les entreprises de coopérer pour réussir leur transition énergétique. Désormais, l’heure est à la mise en place de moyens et à la structuration de la SCIC. Le corollaire de ces 40 sociétaires, c’est qu’ils ont pris conscience qu’il est grand temps d’agir et qu’il y a une route collective à tracer qui est ambitieuse.

Quels types de profils ont les entreprises sociétaires ?

Il y a tous types de profils et tous les secteurs sont représentés. Ça va de Fleury-Michon au Groupement des hôteliers restaurateurs de l’Ouest, en passant par des ETI comme Cetih ou Lacroix, mais aussi des PME du secteur informatique comme Mismo.

Si nous avions prévu au départ de limiter l’accès de la SCIC aux entreprises de Loire-Atlantique, la CCI d’Ille-et-Vilaine a été emballée par l’initiative et nous a rejoints. Puis des entreprises basées en Vendée ont également trouvé le dispositif pertinent. On a accepté qu’elles intègrent la SCIC car cette dernière conserve malgré tout une cohérence géographique. Et économiquement parlant, ça reste également sensé.

Rendre l’entreprise plus désirable, pour embaucher de nouveaux talents et gagner de nouveaux marchés.

Quelles raisons ont poussé ces entreprises à rejoindre Estuaire Énergies ?

L’achat mutualisé d’énergie est une des premières raisons. Au moment de renégocier leurs contrats, les sociétaires économisent en moyenne 10 à 15 % sur leurs factures grâce au poids de la SCIC face aux fournisseurs d’énergie. Il n’y a pas de secret, quand on se met ensemble, on est plus forts.

En deuxième, c’est la volonté de saisir l’opportunité de devenir producteur d’énergie renouvelable locale. Il y a eu une véritable prise de conscience de ces dirigeants de s’emparer ensemble du sujet.

Enfin, sur le long terme, l’objectif des sociétaires est de mieux maîtriser le prix du kilowattheure. C’est pourquoi nous travaillons notamment sur les contrats Power purchase agreement (PPA), qui permettent aux entreprises de prendre le relais des mécanismes de soutien public pour sécuriser sur le long terme les prix de l’énergie.

Vous avez souligné que l’objectif de la SCIC est aussi de développer les énergies renouvelables en local. Est-ce que vous avez des exemples ?

Oui, des opérations d’autoconsommation collective ont été lancées. Nous avons notamment l’exemple de Guérande Atlantique, l’association des entreprises de Guérande. Ce sont les entreprises Ateliers David (charpenterie métallique) et Chelet Bois (négoce de bois) qui ont initié le projet. Elles ont voulu devenir productrices d’énergie pour la mettre à disposition des autres entreprises de la zone. C’est ainsi qu’elles ont réussi à constituer un groupement de dix entreprises qui vont devenir le plus grand producteur d’énergie renouvelable du territoire de Guérande via la création d’un parc photovoltaïque. Un moyen de créer une véritable boucle locale de l’énergie tout en accélérant la décarbonation de leurs activités. Bref, un chemin vertueux synonyme de nombreuses opportunités.

Est-ce que la SCIC est aussi pour les sociétaires un moyen d’améliorer leur politique RSE ?

Tout à fait. Lorsqu’une entreprise s’inscrit dans cette démarche, elle nourrit sa politique RSE voire la réalisation de la mission qu’elle s’est donnée. Cela contribue à rendre l’entreprise plus désirable, notamment pour embaucher de nouveaux talents et gagner de nouveaux marchés. C’est ça aussi la finalité d’utiliser ce pilier de l’énergie pour assurer le développement de nos entreprises.

Quels sont les prochains temps forts pour Estuaire Énergies ?

D’abord le prochain groupement d’achat(1), prévu en début d’année 2024. On l’espère autour de 20 gigawattheures en électricité. Puis d’ici le printemps 2024, ce sera la création de la personne morale organisatrice de l’entité d’autoconsommation collective sur la zone de Guérande Atlantique. On est actuellement dans le dur de la création et de la mise en œuvre contractuelle et technique du projet pour déterminer comment seront liées les différentes parties. Et de manière plus large, on a pour objectif d’atteindre la centaine de sociétaires d’ici la fin de l’année 2024.

(1) Un groupement d’achat est un regroupement d’entreprises qui vise à optimiser les achats communs de ses membres. De la même façon qu’une centrale, son objectif est d’obtenir les meilleures tarifs.

 

Pratique
Pour en savoir plus, contacter Franck Sprecher au 07 62 81 70 28 ou par mail à franck.sprecher@44.cci.fr.