Couverture du journal du 26/04/2024 Le nouveau magazine

Du stade vers l’emploi : le job-dating en baskets

Créée en 2019 par le comité Paris 2024 et la fédération française d’athlétisme, l’opération “Du stade vers l’emploi” propose aux entreprises de casser les codes du recrutement en organisant des jobs-dating autour des valeurs du sport : esprit d’équipe, goût de l’effort ou encore persévérance. Le 15 juin dernier, employeurs et candidats ont mouillé le maillot au parc des expositions des Herbiers.

« Sur un territoire qui rencontre de fortes tensions de recrutement avec un taux de chômage à 3,5%[1], l’idée est de proposer des actions innovantes et de permettre des rencontres dans un cadre différent en désacralisant le job dating » commente Marie-Anne Beels, chargée de développement de l’emploi et des territoires à la DDETS Vendée (direction départementale de l’emploi, du travail et des solidarités) impliquée dans la mise en œuvre de l’opération aux côtés du réseau “Les entreprises s’engagent“. En 2022 en Pays de la Loire, les rendez-vous “Du stade vers l’emploi” ont vu la participation de 574 demandeurs d’emploi et 104 recruteurs sur six dates dans la région. Les Herbiers est la deuxième ville vendéenne à accueillir l’évènement après La Ferrière le 20 janvier dernier, où une vingtaine d’entreprises et une soixantaine de demandeurs d’emploi s’étaient retrouvés pour une journée autour du tennis de table. Deux mois plus tard, une vingtaine de candidats avait trouvé un emploi.

En cette matinée du 15 juin, ils sont un peu plus d’une centaine à avoir répondu à l’appel de l’agence Pôle emploi des Herbiers, : 85 candidats et 19 recruteurs. Parmi les entreprises représentées, citons notamment : Arrivé-Maître Coq, (industrie agroalimentaire), le Groupe Papin, (bâtiment), Dachser (logistique entreposage) ou encore le Puy du Fou et sa filiale la Puyfolaise de restauration. À la clé, une centaine de postes à pourvoir, en CDD et CDI. « Il y a beaucoup d’énergie positive ce matin, aussi bien du côté des recruteurs que des demandeurs d’emploi » se félicite Nicolas Genève, directeur de l’agence, précisant s’être porté assez naturellement candidat pour organiser l’événement. Comme lors des précédentes éditions, la journée a démarré par une matinée dédiée aux activités sportives, avant de se poursuivre par un déjeuner et de s’achever par un job dating l’après-midi.

Le sport à la portée de tous

Après la formation des équipes, cinq ateliers encadrés par six bénévoles du club d’athlétisme des Herbiers (ABV) ont été proposés : saut en longueur, sprint, endurance, lancer et épreuve de coordination. « Face à un public hétérogène, les ateliers sont adaptés aux capacités de chacun. Il n’y a pas de notion de performance ou de compétition. Le sport est un prétexte pour permettre aux employeurs d’observer des savoir-faire, des savoir-être et des compétences que les candidats n’auraient pas pu montrer lors d’un entretien classique. Ce matin, j’ai par exemple pu observer de l’écoute, de l’attention, de la motivation, également de la bienveillance » souligne Antoine Château, chef de projet à la Ligue régionale d’athlétisme des Pays-de-la-Loire.

 

Cinq ateliers ont été proposés aux participants © Guillaume Blanchard

Anonymat jusqu’à la fin du repas

L’originalité du concept réside aussi dans le fait qu’au sein des équipes composées à la fois de candidats et de recruteurs tous en tenue de sport, personne ne sait qui est qui. « Après un premier quart d’heure où tout le monde s’est observé, les barrières sont rapidement tombées » souligne Christophe Hautval directeur territorial délégué pour Pôle emploi Vendée. Les participants s’appelant par leur prénom, se sont ainsi tutoyés assez spontanément. « L’anonymat permet de faciliter les rencontres, de mettre tout le monde sur un pied d’égalité » ajoute Nicolas Genève. Jusqu’à la fin du déjeuner, chaque participant était tenu de garder le secret. Ce n’est qu’en tout début d’après-midi que les recruteurs ont été invités à rejoindre un à un le centre de la salle avant de décliner leur identité et présenter leur entreprise, sous les commentaires parfois amusés des candidats. « J’avais un doute mais Armand (Ordureau, chargé de recrutement pour Mc Donald’s) m’a scotchée » confie Manuella Baudry, à la recherche d’un emploi dans le secrétariat. Venue de Saint-Martin-des-Tilleuls, elle participait pour la première fois à un job dating. « C’est ma conseillère Pôle emploi qui m’a proposé de venir. Elle-même n’était pas au courant des entreprises présentes aujourd’hui. » Pour Marie-Laure Pineau, assistante RH chez Lucas G (constructeur de machines agricoles à La Verrie) c’était également une première. « Je ne connaissais pas le concept et j’ai été agréablement surprise. Je me suis moi-même trompée sur une personne, pensant qu’il s’agissait d’un recruteur. J’espère maintenant accueillir beaucoup de candidats à ma table » lance-t-elle avant le lancement du job dating.

Attirer de nouveaux profils

Selon Christophe Hautval, « l’opération permet d’attirer des personnes parfois éloignées de l’emploi qui avec un recrutement classique n’auraient jamais osé se présenter, pensant ne pas avoir les compétences et n’imaginant pas pouvoir bénéficier d’une formation. » Jessy Maudet, recruteur chez Arrivé-Maître Coq, acquiesce : « Même si notre entreprise est connue, nous avons du mal à trouver du personnel. Ce type d’action permet de casser l’image de l’agroalimentaire, en essayant d’attirer de nouveaux profils. » Le cocktail sport et job dating semble en tout cas porter ses fruits, puisque selon une statistique nationale de Pôle emploi, six mois après avoir participé à l’opération, 60% des candidats ont été recrutés ou ont pu bénéficier d’une formation qualifiante. En Vendée, d’autres rendez-vous similaires sont d’ores et déjà en préparation dont un autour du badminton à La Roche-sur-Yon, cet automne.

[1] Chiffre pour le secteur Les Herbiers-Montaigu – Insee, janvier 2023