C’est un bilan en demi-teinte que dresse la Chambre régionale des comptes (CRC) dans son dernier rapport consacré au Département de Loire-Atlantique. Si elle considère que, de 2018 à 2022, celui-ci a enregistré « une situation financière confortable, grâce à des recettes fiscales en progression et une relative maîtrise de ses charges courantes », les choses semblent se gâter à partir de 2023.
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En effet, le rapport pointe que « les dépenses sociales, à commencer par les allocations individuelles de solidarité, ont connu une forte croissance (+75 M€) tandis que les recettes des droits de mutations se sont fortement réduites (-70 M€). Cela a conduit à une perte de capacité d’autofinancement de 145 M€ en un an ». La CRC des Pays de la Loire estime que ces deux facteurs cumulés « créent un risque d’impasse budgétaire qu’il convient de limiter pour préserver les capacités d’investissement du Département ».
Le Département impacté par la suppression de la taxe foncière
Une situation que le Département dénonce également dans la réponse adressée par son président Michel Ménard à la chambre : « Depuis la suppression de la taxe foncière sur les propriétés bâties en 2021, la collectivité ne dispose plus d’aucun levier fiscal direct et construit son budget dans l’incertitude, tout en assumant des décisions nationales soudaines, sans compensation. » L’élu note par ailleurs « que le financement des dépenses de solidarité par des recettes incertaines est une aberration financière ».
Dans son rapport, la chambre souligne d’autre part que « la trajectoire d’endettement important envisagée par la Loire-Atlantique semble risquée au regard de la volatilité d’une partie des recettes ». Dans ces conditions, elle laisse entendre que « le Département doit maîtriser l’ensemble de ses charges, améliorer son contrôle interne sur les dépenses sociales et renforcer sa recherche de subventions pour maintenir un niveau suffisant d’investissements ».
Un point sur lequel rebondit le Département et précise « déjà solliciter l’État, la Région et l’Europe ». Si l’État reste son principal financeur au travers de la Dotation de soutien à l’investissement départemental (DSID), « la Chambre omet d’indiquer que cette subvention suit une logique peu lisible ». Michel Ménard cite notamment l’exemple de la « Mayenne, qui compte cinq fois moins d’habitants que la Loire-Atlantique, mais qui a perçu 2,4 fois plus de DSID ».
La location de vélos et la protection de l’enfance dans le viseur
Au chapitre mobilité, le Département a mis en place Vélila, un service de location longue durée de vélos électriques en partenariat avec une dizaine d’intercommunalités. « Une initiative qui ne relève pas de ses compétences alors qu’elle représente 1 M€ d’investissement », observe la chambre. Dans sa réponse, la collectivité rappelle que si « la mobilité relève désormais des EPCI, ce n’était pas le cas lorsque le dispositif a été créé ». Elle ajoute qu’elle a prévu de « mener une réflexion sur l’évolution du dispositif ».
Concernant l’organisation de la commande publique du Département, la chambre considère qu’elle est « claire et cohérente mais que la définition du besoin en amont de la consultation devra être renforcée ». Elle évoque « une programmation des achats structurée mais trop permissive ». Une affirmation que le Département considère « excessive », car « la politique d’achat et des politiques publiques » nécessite de « la souplesse opérationnelle, notamment face à des situations imprévisibles et exceptionnelles ».
Autre point noir dénoncé par le rapport : la dégradation de la protection de l’enfance. « Malgré des efforts conséquents déployés par le Département, ils ne suffisent plus à répondre aux besoins », reconnaît la collectivité dans sa réponse, précisant par ailleurs que « la protection de l’enfance demeure sa priorité ». Pour preuve, la Loire-Atlantique a augmenté ses moyens d’intervention (+78 M€ depuis 2021), créé 374 places depuis 2022 et fait évoluer les pratiques et les conditions de travail… Néanmoins le Département dit « ne pouvoir pas tout faire tout seul », et alerte que « l’asphyxie financière » dont elle fait l’objet « menace ses actions ».
Des actions engagées sur sept recommandations
Enfin, en matière de ressources humaines, le rapport de la CRC attire l’attention du Département sur le développement des emplois non permanents (+34 %), des heures supplémentaires (+56 %) ainsi qu’un absentéisme persistant (+11 %). Sur les emplois non permanents, le Département considère que « cette évolution est complémentaire de l’effort de stabilité des emplois permanents et qu’il a dû faire face à un accroissement de l’activité en protection de l’enfance ». Concernant les heures supplémentaires, la collectivité indique que le « travail en cours sur les centres d’intervention routiers devrait permettre d’intégrer les heures réalisées pour les travaux en horaires décalés des agents et de réduire le nombre d’heures supplémentaires ». Quant à l’absentéisme, il précise « avoir mis en place un plan d’actions fin 2023 ».
Au total, sur les douze recommandations de la Chambre régionale, la collectivité affirme avoir engagé des actions sur sept et donnera suite aux cinq autres.