Depuis le début de la crise en 2020, les dispositifs mis en place dans le cadre de France relance visaient à permettre au secteur aéronautique d’encaisser le choc, mais aussi de préparer l’avenir. « Le fonds de modernisation aéronautique annoncé en juillet 2020 était doté de 300 M€ en subventions, destinées à accompagner les entreprises dans leurs opérations de modernisation, de diversification et de digitalisation », rappelle Amine Benzidir, référent aéronautique DREETS Pays de la Loire (Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités). Sur ces 300 M€, la région Pays de la Loire a capté 31,8 M€, arrivant à la troisième place au niveau national. La Loire-Atlantique y concentre le plus de dossiers validés (56 %), aidée en cela par l’implantation d’Airbus Atlantic et de l’écosystème développé autour.
Pour 2022, le rythme des appels à projets (AAP) est appelé à se poursuivre, avec notamment celui de R&D collaborative de la Région Pays de la Loire (projets collaboratifs d’innovation inférieurs à 1 M€), et l’AAP national « i-Démo, qui finance des projets supérieurs à 2 M€ et devrait bientôt donner lieu à une version régionalisée.
Les entreprises vont par ailleurs pouvoir bénéficier des mesures d’un nouveau plan, annoncé en fin d’année dernière par le Président de la République : France 2030. Doté de 30 Mds€, il se donne notamment pour objectif de produire et commercialiser en France des aéronefs bas-carbone au début de la décennie 2030. Le plan intègre notamment le PIA4 (quatrième programme d’investissements d’avenir), qui « accompagnera sur les cinq prochaines années, sur leurs projets de développement industriel, les entreprises, notamment celles de la filière aéronautique, avec 26 M€ au niveau régional », explique Amine Benzidir.
UNE EMBELLIE ET DES POINTS DE VIGILANCE
Un certain optimisme est aujourd’hui permis quant à la santé de la filière aéro. Nouvellement créé, Airbus Atlantic (3,5 Mds€ de CA estimé en 2022, 13000 collaborateurs dont 6500 en Pays de la Loire) rassemble les anciens sites commerciaux Airbus de Nantes et Saint-Nazaire, ainsi que l’ensemble des sites de Stelia. La filiale est née « avec la conviction que les aérostructures deviennent prépondérantes pour la décarbonation», explique François Paynot, directeur d’Airbus Atlantic Nantes. Le regroupement doit notamment permettre de préparer la montée en cadence attendue dans la filière, tout en accélérant sur l’aviation décarbonée. « Si la filière a été durement touchée par la crise, et l’est encore, avec un retrait du trafic mondial de l’ordre de 30 à 35 % par rapport à l’avant crise, on observe une dynamique essentiellement sur les avions de type A220 et A320, avec une croissance assez impressionnante, relève François Paynot. De 60 appareils sur l’A320 avant crise, on est descendus à une quarantaine, et on prévoit dès le milieu d’année prochaine d’atteindre une cadence de 65 avions par mois.» Des perspectives encore plus optimistes sont envisagées, avec des « cadences à 70, voire plus, pour les années suivantes. » Une note positive qui explique l’annonce récente de 700 à 800 embauches pour Airbus Atlantic.
FORTS ENJEUX SUR LA TRÉSORERIE ET LE RECRUTEMENT
Si l’heure est à l’optimisme, celui-ci est néanmoins tempéré par plusieurs éléments. La crise a généré des tensions de trésorerie, même si l’Urssaf a jusqu’ici contribué à amortir le choc à travers le report des cotisations et des exonérations et les aides au paiement pour les entreprises fragiles. « 19 % des entreprises du secteur aéronautique ont utilisé le report de cotisations et nous avons ensuite proposé à ces entreprises des délais de paiement proportionnés à leur situation, entre 3 et 36 mois», rappelle Hélène Le Strat, directrice du contrôle, recouvrement et accompagnement des entreprises à l’Urssaf Pays de la Loire.
Autre sujet de préoccupation : la main-d’œuvre. « Nous entrons dans une période de tension de recrutement accrue », souligne Louis Mazari, directeur adjoint de la DDETS Loire-Atlantique (Direction départementale de l’emploi, du travail et des solidarités), qui a présenté le nouveau plan de réduction des tensions de recrutement au niveau national (1,4 Md€). Ses trois volets : renforcer la montée en compétences et les reconversions des salariés, amplifier l’effort de formation des demandeurs d’emploi pour répondre aux besoins des entreprises et déployer un plan spécifique et massif pour les demandeurs d’emploi. Un plan qui devrait aider les entreprises, en particulier celles de l’aéronautique, d’autant que ce secteur jouit d’une bonne image. En témoigne la tenue du Jobdating aéro, organisé le 19 janvier à l‘aéroport de Nantes Atlantique, qui mettait en avant 300 offres d’emploi en CDD et CDI. « Un vrai succès, la filière reste attractive », résume Yves-Olivier Lenormand, leader de la communauté « Les entreprises s’engagent », organisatrice de l’événement auquel 850 demandeurs d’emploi s’étaient inscrits. Pour continuer à promouvoir l’emploi, d’autres dates sont d’ailleurs programmées, à commencer par La journée des deux mondes le 11 mars à Saint-Nazaire, dédiée à la filière aéro et navale.
Saprena et Fidemeca soutenues par France relance
Pour illustrer le soutien apporté par le fonds de modernisation, deux sociétés ont fait part du développement de leurs projets. Parmi elles, l’entreprise adaptée Saprena, basée à Bouaye (14,5 M€ de CA, 470 salariés), qui crée des emplois durables pour les personnes en situation de handicap. Elle travaille notamment avec Airbus pour la maintenance des outillages sur les avions. Avec France relance et l’appel à projets de modernisation, elle a pu poursuivre son programme de modernisation et d’investissements lancé en 2020 et a reçu une subvention de 620 k€ sur un coût global d’1,2 M€ de l’opération.
Autre entreprise qui bénéficie d’un appui, Fidemeca, basée aux Essarts (85), spécialiste d’usinage de précision et de décolletage (11 M€ de CA, 90 collaborateurs) et positionnée sur l’aéronautique, le spatial et la défense. Dans le cadre d’un programme d’investissement pour moderniser son outil de production et accélérer l’automatisation et la digitalisation afin de répondre aux montées en cadence attendues dans le secteur, elle investit 3,3 M€ sur trois ans et bénéficie pour cela de 800 000 € de subventions.