Couverture du journal du 16/01/2025 Le nouveau magazine

Instead, brasseur nantais de mobilier

La jeune pousse nantaise Instead transforme les résidus issus du brassage de bière en meubles haut de gamme « made in Nantes ».

Les fondateurs, Franck Grossel et Christophe Pilcher. INSTEAD

Ébéniste formé à l’École de design de Nantes, amateur de bière et grand défenseur de l’environnement, Franck Grossel a réussi à innover en alliant ses trois passions. Dans le cadre de son projet de fin d’études, il a eu l’idée en 2018 de récupérer la drêche, l’enveloppe des céréales issues du brassage de la bière, pour lui offrir une seconde vie.


Lire aussi
ABAB : des business angels à l’avant-garde d’une économie en mutation


Trois ans de R&D ont été nécessaires pour mettre au point un matériau appelé Balt (pour bois de malt), dont l’entrepreneur dévoile le process de fabrication : « On mélange des emballages alimentaires à usage unique biosourcés avec les drêches de brasserie. Ce qui va donner par extrusion une pâte que l’on dispose dans des moules 3D en aluminium. La compression hydraulique comble les espaces de nos moules. Et en refroidissant, la pâte durcit et prend la forme souhaitée. » De quoi conférer à Balt « la même résistance que le chêne tout en étant imperméable. De plus, le fait de ne pas utiliser d’époxy, de résine ou de plastique dans notre liant fait de Balt l’un des rares matériaux du marché entièrement biosourcé », précise le fondateur.

La gamme d’Instead est composée d’une douzaine de références : tables, chaises, plateau… INSTEAD

Franck Grossel crée alors la start-up Instead en février 2020 avec l’ambition de passer du matériau au produit. Et rentre dans sa région d’origine, à Saint-Quentin (Aisne) : « Mon ancien lycée d’ébénisterie m’a proposé un poste d’assistant d’éducation la nuit tout en bénéficiant du parc machine, des ateliers et des conseils des enseignants la journée. C’est ce qui m’a permis de lancer le projet d’un point de vue économique et pratique. » Avant de voler de ses propres ailes « en prenant un petit entrepôt d’assemblage à Vendeuil ».

En mars 2021, Franck Grossel lance un financement participatif et récolte 37 k€ en un mois. Et décide quelques mois plus tard de revenir à Nantes en raison du réseau qu’il a sur place et du dynamisme du tissu entrepreneurial à impact. En novembre 2023, il s’associe à Christophe Pilcher, spécialiste du marketing et de la stratégie commerciale. « Une de mes meilleures décisions », analyse avec le recul l’intéressé. La start-up passe alors un cap en mai 2024 en ouvrant un atelier de 280 m2 hébergeant sa brasserie de mobilier. « En moins d’un an, nous sommes passés d’un modèle de sous-traitance à un modèle d’indépendance industrielle », illustre Franck Grossel.

Pour son premier produit, le duo choisit de créer un tabouret de bar. « Un clin d’œil à notre matière première et à l’histoire de notre projet. Quoi de mieux que de s’asseoir sur ce que l’on est en train de boire pour raconter l’histoire de l’économie circulaire ? »

La gamme d’Instead est composée d’une douzaine de références : tables, chaises, plateau… INSTEAD

Depuis, la gamme d’Instead s’est enrichie d’une douzaine de références (tables, chaises, plateau…) produites à partir de matières premières provenant « à 95 % de la métropole et ses environs ». Employant désormais six salariés, la start-up accompagnée par Initiatives Nantes cible le marché BtoB, en particulier les professionnels de l’habitat et du design, prescripteurs et distributeurs inclus.

Avec plus de 2 milliards de litres de bière consommés en France en 2023, générant plus de 600 000 tonnes de drêche, le gisement de matière première est énorme pour la start-up. Tout comme ses perspectives de développement. Pour aller plus loin dans la transition écologique de l’industrie du mobilier et du design, la start-up compte d’ailleurs développer de nouveaux matériaux bas carbone à partir d’autres boissons générant des déchets, comme le cidre ou les jus de fruit. « Notre ambition est de concilier réindustrialisation et décarbonation pour tendre vers un modèle de production plus local et plus responsable. Mais on peut déjà se vanter d’avoir inventé un métier, celui de brasseur de mobilier », conclut Franck Grossel.

Publié par