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Fondation actionnaire : concilier capitalisme et altruisme

La fondation actionnaire, modèle de gouvernance d’entreprise encore assez peu usité en France, a été mise en lumière dans le cadre du 17e sommet national des Napoléons [1], qui s’est tenu à La Baule du 28 juin au 1er juillet, autour notamment du témoignage de l’ancien dirigeant du groupe Cetih, Yann Rolland.

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Le 17e sommet national des Napoléons s’est tenu à La Baule du 28 juin au 1er juillet, sur le thème "Réparer". Parmi les conférenciers, l’ancien dirigeant du groupe Cetih, Yann Rolland est intervenu pour témoigner de la mise en place de la fondation actionnaire.

Une fondation actionnaire permet à une entreprise de « mener des actions d’intérêt général, dans le cadre d’un projet philanthropique et de porter des valeurs plus humanistes que de simples placements financiers. » Voici pour la définition portée par Virginie Seghers, co-fondatrice en 2015 de Prophil, société à mission parisienne dont l’objectif est la mise en place de nouveaux modèles économiques au service du bien commun, et notamment des modèles de transmission et de gouvernance des entreprises. La dirigeante était accompagnée pour témoigner de Yann Rolland, ancien président du groupe Cetih (spécialisé dans la rénovation et l’amélioration de l’habitat – 1500 salariés et 280 M€ de chiffre d’affaires), basé à Machecoul. Au moment de lâcher les rênes de son entreprise en 2021, après 26 ans passé à sa tête, Yann Rolland a décidé de donner 40 % des parts qu’il détenait dans le capital de l’entreprise à un fonds de dotation, Superbloom, qui est devenu le principal actionnaire (35%) de Cetih et le premier fonds de dotation familial français, actionnaire d’une société à mission.

Un engagement irréversible

L’ancien dirigeant est revenu sur ses motivations à créer ce fonds, avec femme et enfants. « J’aurais été très affecté si mon entreprise était tombée dans les mains de financiers. Créer cette fondation actionnaire a permis de sanctuariser le capital de Cetih et je suis désormais garant de son indépendance, car l’engagement est irréversible », a expliqué celui qui a aussi été président du Medef 44 entre 2010 et 2013. Et d’ajouter : « capitalisme et altruisme ne sont pas incompatibles, l’argent étant un moyen et non une finalité, même si cela doit concerner les entreprises qui se portent bien », pour pouvoir verser des dividendes selon une charte d’engagement définie. Pour sa part, la famille Rolland a choisi de s’engager auprès d’associations axées sur l’éducation alternative et l’aide aux femmes en précarité. Un choix qui « donne des salariés plus sincères dans leur engagement, et me concernant, cela a renforcé les relations avec mes enfants sur ce patrimoine transmis autrement que par des fonds financiers » a assuré Yann Rolland.

En France, la fondation actionnaire est encore peu développée dans le paysage capitaliste français a rappelé de son côté Virginie Seghers, donnant le Danemark comme contre-exemple, où 15 % de la richesse nationale est détenue par des entreprises disposant de fondations d’actionnaires. « Parler d’actionnariat en ces termes n’est pas encore évident en France et pourtant ça donnerait un signal fort, car en Nord-Europe, 150 000 entreprises familiales vont être transmises dans les dix prochaines années » a rappelé la dirigeante. Et Yann Rolland de marteler : « Il nous faut développer un capitalisme plus responsable pour éviter ces inégalités qui donnent le vertige. J’ai très envie de donner envie à mes collègues chefs d’entreprise de faire la même chose. »

[1] Communauté de décideurs et d’acteurs de l’innovation technologique, sociale et environnementale.