Couverture du journal du 26/04/2024 Le nouveau magazine

En Vendée, une étude pour économiser l’eau dans les campings 

Avec le réchauffement climatique, l’eau est une ressource fragilisée. À l’heure où la saison touristique ouvre ses portes, Vendée Eau, Vendée Expansion et la Fédération vendéenne de l’hôtellerie de plein air (FVHPA) lancent une campagne de mesure et d’analyse de la consommation d’eau dans une trentaine de campings. Objectifs de cette expérimentation : identifier les postes les plus consommateurs afin de mener des actions collectives et individuelles à l’été 2024. 

Guillaume Jean, président de Vendée Expansion ; Héléna Madorra, vice-présidente de Vendée Eau ; Franck Chadeau, président de la FVHPA ; et Thijs Jaspers, dirigeant du camping La Guyonnière à Saint-Julien-des-Landes (à proximité des Sables d’Olonne). Ensemble, ils ont présenté la campagne de mesures et d’analyses des consommations d’eau au sein des campings vendéens. ©IJ

Ça chauffe pour la planète. Plus que jamais, l’eau est une ressource partagée et limitée à préserver. Alors que la saison touristique estivale démarre à peine, « son utilisation doit être raisonnée et chacun est responsable de sa consommation, les établissements touristiques comme les vacanciers », estime Guillaume Jean, le président de Vendée Expansion. L’enjeu n’est pas seulement environnemental. Il est aussi économique, tout particulièrement en Vendée où le tourisme est le premier secteur d’activité et représente 15 % du PIB. Pour trouver des solutions techniques et permettre aux professionnels du tourisme de répondre à cet enjeu environnemental tout en allégeant leurs factures, la Fédération vendéenne de l’hôtellerie de plein air (FVHPA), Vendée Expansion et Vendée Eau ont décidé de se mobiliser à travers une campagne de mesures et d’analyses de la consommation d’eau. Une trentaine de campings de toutes tailles, avec et sans piscine, se sont portés volontaires pour cette expérimentation lancée début juillet. 

« Nous sommes des établissements de verdure, avec un environnement végétal prisé par notre clientèle. C’est à nous de préserver cette ressource pour les accueillir durablement », souligne Franck Chadeau, président de la FVHPA, fédération qui rassemble près de 270 campings dans le département. Un audit mené par le bureau d’études Betterfly Tourism dans des campings de l’Hérault en 2019 permet déjà de se faire une petite idée des usages de l’eau dans les établissements de plein air. « On y apprend par exemple que 70 % de l’eau consommée est sanitaire et que 25 % sert à la piscine », indique Héléna Madorra, vice-présidente de Vendée Eau. On y découvre aussi que chaque vacancier consomme en moyenne 170 litres d’eau par nuitée. »

« À l’échelle nationale, cette moyenne s’élève à 120 litres d’eau utilisée par campeur et par nuitée », précise Franck Chadeau s’appuyant sur une étude datant de quelques années. Reste maintenant à affiner ces informations à l’échelle vendéenne et c’est l’objet de l’étude menée tout au long de la saison sous le regard expert de Betterfly Tourism. 

175 sous-compteurs suivis à la loupe 

Lors de cette première phase d’observation, un questionnaire a été envoyé à l’ensemble des établissements de plein air du département pour répertorier les pratiques et les besoins en eau de chacun. Vendée Eau a également fait l’acquisition de 106 sous-compteurs4 pour un montant de 8 000 €. Mais au total, ce sont bien 175 sous-compteurs qui seront suivis cet été, certains ayant été installés préalablement par les campings eux-mêmes. Selon les établissements, ces objets sont posés au niveau des hébergements des vacanciers ou saisonniers, des sanitaires ou encore des piscines. Chaque point d’eau chaude ou froide de la zone test peut ainsi être scruté à la loupe. 

« Par cette opération, nous créons une méthode et des outils qui pourront servir à l’ensemble de la profession, commente Franck Chadeau. Combien d’eau consomme une douche par personne ? Quelle différence entre une piscine intérieure et extérieure ? Quelle quantité d’eau perd-on à cause des fuites ? L’étude va nous livrer une multitude d’informations cruciales à exploiter pour adapter au mieux nos usages. » 

Les données récoltées seront en effet transmises dans un second temps à un bureau d’études pour être analysées. À partir de ce rapport, l’ensemble des partenaires pourront établir un catalogue de solutions collectives et concrètes à mettre en œuvre dans l’hôtellerie de plein air vendéenne à partir de l’été 2024. Les 30 campings tests recevront aussi une évaluation précise de leurs consommations. S’ils le souhaitent, ils pourront bénéficier en complément d’un accompagnement par un cabinet spécialisé : pistes d’améliorations au sein de leur établissement, solutions innovantes, chiffrage des investissements, économies attendues, retour sur investissement.  

Selon une étude Betterfly Tourisme dans des campings de l’Hérault, 25 % de leur consommation d’eau sert à remplir les piscines. La campagne vendéenne de mesures et d’analyses permettra sans doute d’identifier quelques leviers locaux. © Shutterstock

Une évolution réglementaire nécessaire 

En parallèle, les fédérations régionale et vendéenne de l’hôtellerie de plein air mènent en ce moment une expérimentation régionale d’économies d’eau autour de la réutilisation des eaux de rinçage des filtres des piscines au sein de leurs établissements, sachant que 72 % des campings des Pays de la Loire sont équipés en piscine. Elle fait suite à un appel à projet lancé par Solutions&Co, l’agence de développement économique de la région5. Quatre campings sont concernés, dont un en Vendée6. Ce procédé permet de recycler 80 % au minimum du volume d’eau utilisé par le rinçage et permet également de régénérer l’eau en circulation dans les piscines, réduisant de 2 à 3 fois l’apport d’eau neuve soit un gain de 2500 m3 par an. « L’eau est filtrée et traitée grâce à un système d’ultra-violets, détaille Franck Chadeau. Techniquement, on sait que cela fonctionne, mais les professionnels ont besoin d’aides pour financer ces aménagements coûteux, entre 40 000 et 80 000 € l’unité. Nous avons donc sollicité la Région et l’Agence de l’eau et attendons une confirmation pour un soutien à hauteur de 30 % du montant total. » 

L’autre cheval de bataille du président de la Fédération vendéenne de l’hôtellerie de plein air, c’est la réglementation sanitaire de l’eau jugée trop contraignante et contraire aux enjeux d’économie de cette ressource si précieuse. « L’Agence régionale de la santé (ARS) nous oblige à renouveler l’eau de nos bassins aquatiques à hauteur de 30 litres par jour et par baigneur, illustre Franck Chadeau. Or, il n’y a pas besoin de faire ça pour assurer la sécurité sanitaire de nos piscines. C’est une aberration. La réglementation sanitaire doit évoluer pour permettre au secteur touristique, comme aux particuliers d’ailleurs, de récupérer les eaux pluviales et de lavage des piscines pour les remettre dans les chasses d’eau. Aujourd’hui, c’est interdit et on met de l’eau potable dans les toilettes ! »