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Ces start-up vendéennes qui tapent dans l’œil des « grands »

Makidoo, Stampyt et Idéolys, trois start-up made in Vendée, trois success story et un point commun. À un tournant phare de leur développement, elles ont intégré des entreprises ou groupes à forte croissance, d’envergure européenne voire internationale. Ces leaders ont vu dans ces trois jeunes pousses la pépite technologique qui leur manquait. Comment se sont opérés ces rapprochements? Les fondateurs de ces start-up témoignent.

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De gauche à droite : Les frères Emmanuel Grelaud, Olivier Grelaud et David Grelaud, cofondateurs d’Idéolys, rachetée par Mapal © DR

Rendre la production de vidéos en entreprise accessible à tous, sans aucune compétence pré-requise, et à l’aide d’un simple smartphone», c’est le rêve fou de Julien Comte depuis toujours. Un rêve mis de côté lorsqu’il arrive en 2015 en Vendée, berceau de sa famille maternelle. Passionné d’images, sorti major de promo de l’École supérieure de réalisation audiovisuelle, à Paris, Julien Comte a été tour à tour assistant réalisateur, monteur, scénographe ou encore post-producteur. Et c’est ce savoir-faire multifacette qu’il entend mettre au service du territoire vendéen dans un premier temps. Pourtant, très vite, au hasard d’une rencontre, l’envie de créer une application de tournage guidé et de montage automatisé 100 % mobile refait surface. Makidoo naît en 2016. Six ans, plus tard, cette «petite» idée toute simple séduit une société parisienne d’envergure internationale, experte en services visuels 360° [1 ]: Ooshot.

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Julien Comte, fondateur de Makidoo. ©Dream and Achieve SAS

Continuer à veiller sur sa pépite

Les deux dirigeants se rencontrent lors d’un salon professionnel, Vivatech, en 2020, et sympathisent immédiatement. Il n’est pas encore question de rapprochement. Elles partagent juste le même amour du métier. « Ooshot essaie de le préserver avec des solutions de production et diffusion visuelles les plus complètes du marché pour la photo et la vidéo, et Makidoo a une volonté de le faire évoluer grâce à de nouveaux outils », explique Julien Comte.

À ce moment-là, la start-up vendéenne est à un tournant de son histoire. Alors que la croissance est au rendez-vous depuis le début, avec un chiffre d’affaires qui double quasiment chaque année, le Covid est venu perturber son développement. « Makidoo avait le vent en poupe. Plus de 200 clients nationaux nous faisaient confiance. Notre force? Notre vision du marché et notre capacité à nous adapter technologiquement. Mais nous avions aussi une faiblesse : notre difficulté constante à financer notre croissance.» Lorsque la crise sanitaire éclate, l’écart va se creuser avec la concurrence : Playplay, leader français, lève 65 M€ quand Makidoo réunit 180 000 €. Le Vendéen tente de pivoter en marque blanche : les entreprises qui le souhaitent ne paieront plus un abonnement mais achèteront une solution applicative sur-mesure.

C’est finalement le scénario d’un rapprochement avec Ooshot (25 salariés, 3 M€ de CA en 2022), fondée à Paris en 2015, qui progressivement va s’imposer. « Pendant 18 mois, nous avons appris à nous connaître et la perspective de leur céder Makidoo à 100 % est devenue une évidence. » Julien Comte a la mission de développer les solutions mobiles au sein du groupe, dont la marque Makidoo. « Je ne voulais plus être tout seul dans l’opérationnel. Là, je suis entouré de gens qui viennent du même secteur que moi, avec qui je partage les mêmes valeurs et je peux continuer à veiller sur Makidoo, avec plus de recul. »

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Thierry Maillet, directeur général d’Ooshot. ©Thierry Van Biesen

« Makidoo, c’est un coup de cœur humain et technologique pour développer notre savoir-faire mobile, souligne Thierry Maillet, directeur général de Ooshot depuis 2019. Son double ancrage régional, au cœur d’un territoire économiquement dynamique, et grands comptes nous intéressait fortement. La personnalité de Julien Comte, sa connaissance du marché et du métier étaient aussi de bons atouts. Sans lui, l’acquisition de Makidoo n’auraient pas eu de sens. C’est un interlocuteur qualifié pour parler avec les grands comptes. Intégrer cette start-up répond à nos objectifs de diversification. »

Autre start-up, autre croisée des chemins avec Idéolys, fondée en 2010 par trois frères férus d’informatique. Emmanuel et David Grelaud sont tous les deux ingénieurs logiciels dans le Sud-Est de la France. Quant à Olivier, leur cadet, il est formateur en informatique en Vendée. « Nous avions envie de créer une entreprise en famille et nous voulions le faire en Vendée, là où se trouvent nos racines, sur ce territoire où il est facile d’entreprendre», explique Emmanuel.

Entreprise cherche brique technologique complémentaire

À l’origine, Idéolys, ce sont deux activités : d’un côté, des prestations informatiques classiques et la distribution d’un logiciel pour la restauration collective pour un éditeur brésilien. Un domaine que connaît particulièrement bien Emmanuel, l’aîné de la fratrie, puisqu’il a travaillé chez Compass, un des leaders de la restauration collective en France. Cette seconde activité se développe rapidement mais le logiciel sud-américain rencontre de nombreux problèmes techniques. En 2012, Idéolys décide donc de changer son business model, arrête les prestations informatiques et se concentre sur le développement de son propre logiciel pour la restauration collective.

Deux levées de fonds et près de neuf ans plus tard, Idéolys est leader dans son domaine, son logiciel équipe 5 000 restaurateurs français. Déjà présente au Espagne et au Royaume-Uni, la start-up ambitionne de devenir leader européen. À l’horizon 2020/2021, Idéolys engage une troisième levée de fonds de 5 M€. Cette success story finit par attirer l’attention de Mapal, un groupe familial espagnol, spécialiste lui aussi du logiciel pour la restauration et leader sur le marché ibérique.

« Mapal avait le projet de créer le premier outil ERP dédié à la restauration à dimension européenne, c’est-à-dire une solution logicielle qui couvre tous les besoins des restaurateurs, indique Emmanuel Grelaud. Pour atteindre cet objectif, ils avaient mis en place une stratégie de croissance externe. C’est dans cette logique que nous avons été contactés. Il n’y avait aucun lien avec notre levée de fonds. Au départ, nous étions mitigés car Mapal avait l’habitude de cibler des entreprises bien plus importantes que la nôtre. Nous leur avons fait une démo. Notre produit correspondait parfaitement à ce qu’ils recherchaient. Là, tout s’est accéléré. »

En février 2021, Mapal fait une offre de reprise. En juin, la vente est finalisée et Idéolys devient une filiale du groupe espagnol. « Nous avions le choix de poursuivre notre développement, seuls, via une levée de fonds ou de nous associer avec Mapal, précise Emmanuel Grelaud. Nous avons pris la bonne décision. D’abord parce que ce modèle nous permet de rester actionnaires minoritaires. Ensuite, parce nous partageons des valeurs d’honnêteté et de transparence avec ce groupe familial. Enfin, parce qu’Idéolys devenait un peu trop gros pour moi. À 54 ans, je me plais davantage en numéro 2 qu’en numéro 1. »

Toujours président d’Idéolys, Emmanuel Grelaud est aussi directeur commercial France de Mapal. David, lui, a fait le choix de repartir sur une nouvelle aventure entrepreneuriale avec Carbone.io, une application web qui facilite la génération de documents. Quant à Olivier, il a conservé ses fonctions de chef de projet interne et infrastructure.

Accélérer son développement

Du côté de Stampyt, solutions applicatives photo et vidéo pour les métiers de l’automobile créée en 2014, le choix de s’associer à un leader du marché s’est révélé une évidence. « Dès nos débuts, nous avions créé une IA capable de traiter en quelques secondes des milliers d’images pour améliorer leur qualité et les diffuser ensuite sur les plateformes de ventes d’occasion. Cette option “grand groupe“ nous permettait de développer rapidement d’autres outils autour de cette IA mais aussi notre présence à l’international », indique Alexandre Launay, l’un des fondateurs de la start-up vendéenne.

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Alexandre Launay, co-fondateur de Stampyt © william jezequel

Stampyt est à l’origine une application mobile qui répond aux besoins des clients “événementiel“ d’une agence digitale. Sa vocation : protéger leurs contenus photo et vidéo sur le web grâce à l’insertion instantanée de leur logo. Parmi les utilisateurs : le groupe TF1 ou encore Havas et Publicis. En 2015, Volkswagen France et sa marque Audi occasion contactent Stampyt pour uniformiser les photos de son parc d’occasion. « Dans l’événementiel, c’est souvent du “one shot“. Là, avec le secteur automobile, s’ouvrait la perspective d’une collaboration durable. Le potentiel de ce marché était i mense. ». Stampyt délaisse l’événementiel et pivote à 100 % vers l’automobile. Dans son aventure à succès, elle bénéficie d’un soutien de poids, via une levée de fonds, celui du groupe Dubreuil. « Un laboratoire formidable pour tester localement nos solutions avant d’étendre nos ailes», témoigne-t-il.

En mars 2020, quand se pose la question d’intégrer un grand groupe via un rapprochement capitalistique, la start-up équipe déjà 3 000 concessionnaires en Europe (12 pays).

« Nous avons rencontré une dizaine d’acteurs majeurs venant des quatre coins du monde. Nous avons choisi le Parisien Imaweb, leader européen des solutions digitales pour l’automobile (700 salariés, 12 bureaux à l’étranger, NDLR) car nous étions 100 % alignés avec leur stratégie et leurs valeurs humaines, telles que l’humilité, la transparence et l’honnêteté », indique Alexandre Launay.

Imaweb souhaite ajouter des briques technologiques complémentaires à ses produits pour devenir le partenaire incontournable de la transformation digitale d’un constructeur ou concessionnaire. Stampyt incarne cet objectif. « Ce qui les a intéressés? Notre technologie et la perspective d’infuser le mode de pensée start-up au sein du groupe, c’est-à-dire un esprit d’innovation permanent avec des process rapides et efficaces. »

Deux ans après la vente, Alexandre Launay dresse un bilan positif. « Certains nous disaient que nous allions nous faire aspirer par un grand groupe et qu’il y aurait de la casse parmi nos 50 collaborateurs. Or, c’est tout l’inverse. Non seulement l’équipe a été maintenue, mais certains ont même saisi cette opportunité pour faire évoluer leur carrière à une échelle européenne. »

 

1. Via son réseau international de prestataires locaux, Oshoot propose aussi bien des prestations photos, vidéos, que de direction artistique, sur tous types de canaux de communication.

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