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Burn out du dirigeant : des entrepreneurs témoignent

Parmi les conférences du Web2day 2022 orientées entrepreneuriat, l’une était consacrée à une thématique encore trop souvent passée sous silence chez les dirigeants : le burn out. Témoignages de startuppers auxquels tout entrepreneur peut s’identifier.

web2day, conférence burn out

© WEB2DAY

« Et toi, c’était comment ton burn out ? » L’intitulé de cette conférence du Web2day était interpellante. Non seulement pour le sujet en lui-même mais aussi en suggérant que l’épuisement professionnel pouvait être un passage obligé… De fait, les quatre intervenants présents ont tous témoigné avoir fait ou frôlé un burn out. Histoire de démystifier ce qui constitue encore un tabou dans un univers entrepreneurial où la vulnérabilité peut être assimilée à un aveu de faiblesse…  Cofondateur et président de LiveMentor* et auteur d’Entreprendre et (surtout) être heureux, Alexandre Dana a lui-même fait deux burn out. Ce qu’il définit ainsi : « une perte d’énergie mentale et physique pendant une période de temps prolongée ».

Fondatrice d’un studio de podcasts**, Pénélope Bœuf a elle aussi vécu deux burn out, dont un comme dirigeante. Elle raconte qu’au moment où son activité a vraiment commencé à démarrer et qu’il a fallu recruter, elle s’est retrouvée à vivre et penser à son entreprise sans interruption. « Tu ne prends pas de vacances, le soir tu bosses, le week-end aussi et à un moment, ça craque. » Avec une différence par rapport à son premier burn out alors qu’elle était salariée : au lieu d’en vouloir aux autres, « là, je m’en suis voulu à moi essentiellement. »

Si Nicolas Bergerault, fondateur et dirigeant de L’atelier des chefs*** n’est pas allé jusqu’au burn out, « c’était limite », reconnaît-il. Suivant le même schéma que les autres témoins, il raconte qu’« au début on est tellement à fond qu’on ne se pose pas de questions ». Il a d’abord vécu une première alerte au bout d’un an, avec le fort développement de son activité. Mais c’est finalement au bout de 14 ans qu’il a touché ses limites, au moment d’un pivot stratégique. « Globalement, ce serait à refaire, je le referais évidemment, mais je l’ai fait au prix d’une dépense d’énergie inouïe », témoigne-t-il. « Ce qui l’a « sauvé » ? Un réalignement spirituel et une retraite d’une semaine dans un silence total. « C’est la première fois en 18 ans que j’ai éteint mon portable » confie-t-il, lui qui, même en vacances, se voulait toujours joignable.

DES PROFILS À BURN OUT

« S’interroger sur le sujet de la santé mentale du dirigeant, c’est à la fois regarder les événements extérieurs à soi – les recrutements, les phases de croissance, les galères qui nous tombent dessus –, mais c’est aussi un travail intérieur. Il faut apprendre à mieux se connaître, se comprendre, savoir le type de personnes avec qui on aime bosser, ce dont on a besoin pour se sentir en énergie », relève Alexandre Dana. Il invite les dirigeants à connaître « La roue du burn out », en évaluant où en est leur niveau d’énergie et la couleur de celle-ci. En identifiant en particulier le point de bascule entre le moment où on a toujours beaucoup d’énergie mais où l’on perd l’envie de faire les choses, qui précède « celui où l’on n’a plus d’énergie du tout et des pensées uniquement négatives ». Pour lui, il est également essentiel de savoir repérer les signes avant-coureurs, comme « la peur de l’échec, l’obsession des détails, le syndrome de l’imposteur ». Alice Vivian, a de son côté frôlé l’épuisement professionnel à deux reprises. Aujourd’hui formatrice en gestion du stress et en bien-être****, elle a réalisé qu’elle faisait partie des profils à burn out par sa nature anxieuse. Elle explique que ce qui l’a sauvé, elle, c’est la reconnexion tête/corps par le yoga. « L’intelligence du corps est essentielle à développer comme l’intelligence du cœur », souligne-t-elle.

J’AI DÉCIDÉ DE M’ÉCOUTER. À CHAQUE FOIS QUE JE N’EN PEUX PLUS ET QUE J’AI ENVIE DE PARTIR EN VACANCES, JE LE FAIS.

DES OUTILS POUR MIEUX SE CONNAÎTRE

Les différents témoins ont aussi évoqué différents outils pour éviter d’aller jusqu’à l’épuisement. Comme la sanctuarisation du temps. Nicolas Bergerault évoque ainsi les espaces qu’il a bloqués pour lui dans son agenda partagé afin de ne pas enchaîner les rendez-vous, ce qu’il considère comme « improductif et inefficace ». Même si parfois ces espaces sautent, « c’est moi qui décide de les faire sauter ou pas », précise-t-il.

Au-delà de la gestion du temps, il y a la question du rapport à celui-ci, estime de son côté Alice Vivian et celle de la gestion du stress chronique. Pour y arriver, elle explique qu’il faut savoir accueillir ce stress, le sentir pour apprendre à le réguler. Pour cela, les outils ne manquent pas, des techniques de respiration à la méditation, en passant par la relaxation. « On a beau avoir des outils, on se remet très facilement soi-même dans l’engrenage », admet-elle néanmoins.

Elle invite aussi les chefs d’entreprise à ne pas oublier non plus la question de l’énergie, prépondérante dans un burn out. « Gérer cette énergie, ça s’apprend », affirme-t-elle. Et ça passe par une bonne alimentation, la gestion de sa chronobiologie pour faire les choses en fonction du bon moment pour soi. « Ça paraît des petites choses mais en fait ça change complètement notre manière de vivre au quotidien » et permet de ne pas perdre la flamme, insiste-t-elle.

Alexandre Dana incite également les dirigeants à aller voir du côté des process comportementaux. Différents outils existent pour comprendre qui on est et ce qui se passe en soi comme le test de personnalité MBTI, les techniques de communication non violente ou la méthode Disc. Pour Nicolas Bergerault, qui en a testé plusieurs, mieux se connaître lui permet de jouer sur ses forces et compenser ses faiblesses, de ne pas jouer contre sa nature, ce qui finit forcément par se retourner contre soi.

Au-delà des outils, de quelle manière ces quatre entrepreneurs ont-ils pris en considération leur bien-être depuis leur burn out ? « J’ai décidé de m’écouter, répond Pénélope Bœuf. À chaque fois que je n’en peux plus et que j’ai envie de partir en vacances, je le fais ». Une résolution qu’elle a mise à profit le jour même la dernière fois qu’elle a touché ses limites, pour se préserver. D’autres ont choisi de nourrir leur vie personnelle. Et Alexandre Dana de conclure en rappelant que veiller sur soi n’est pas un acte égoïste : « Si je veux m’accomplir, c’est aussi pour les autres », dit-il, estimant ainsi devenir un meilleur dirigeant.

*LiveMentor propose des formations pour entrepreneurs.

**La Toile sur écoute.

***Cours de cuisine en ateliers.

****Mojom.

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