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Bureaux : les professionnels opposés à un moratoire

Face à la demande des élus écologistes de la Ville de Nantes visant à obtenir un moratoire sur la construction de bureaux, les professionnels du secteur regroupés au sein du Cina* alertent sur la pénurie de locaux qui ne permet pas d’accueillir les entreprises

IMMOBILIER CINA

En 2023 près de 20 000 m² de bureaux demandés par les entreprises n’ont pas été satisfaits. © Eric Cabanas - IJ

« Le marché de l’immobilier de bureaux connaît en 2023 une baisse très nette, signifiant de manière très simple que nous sommes en pénurie de locaux et que nous ne pouvons plus accueillir les entreprises ou leur permettre de se développer sur notre territoire et ainsi proposer des emplois aux habitants qui éprouvent également de graves difficultés à se loger. Nous ne pouvons pas opposer une problématique à l’autre. Ce sont bel et bien des solutions que nous devons rechercher collectivement avec les acteurs économiques et les élus pour loger à Nantes Métropole toute la population et toutes les entreprises », alerte Delphine Marie, déléguée générale du Cina, club immobilier de Nantes Atlantique.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : pour 153 471 m2 échangés en 2022, il y en a eu 113 045 m2 l’an dernier. La seule grosse opération, 1 782 m2, est celle menée en compte propre pour Paprec. La baisse enregistrée atteint les 26 % et le neuf représente 53 165 m2 soit 47 % des transactions, en baisse de 33 %.

Pour le Cina, cette chute s’explique « par la pénurie de locaux immédiatement disponibles (moins d’un an), qui pénalise tout le marché ». « Nous manquons d’offres. Le Cina alerte de longue date sur ce qui se produit aujourd’hui, les besoins en bureaux faisant l’objet d’une analyse et d’un suivi par les experts de l’immobilier du club avec l’Onita, observatoire dédié à l’immobilier d’entreprise existant depuis dix ans », explique-t-on au Cina qui dénonce les « contrevérités » visant à faire croire qu’il y a des bâtiments entiers de bureaux vides et des immeubles construits « pour spéculer ».

Une demande de 20 000 m2 non satisfaite

« Si on ne peut nier qu’il y ait de la vacance sur une partie du parc de bureaux, elle est faible, inférieure à 5 % sur le territoire de Nantes Métropole. Elle concerne surtout des immeubles anciens, vétustes, énergivores ou mal placés qui ne correspondent plus aux attentes des entreprises et des salariés aujourd’hui », précise le Cina. « On loue ou l’on vend de l’ordre de 120 000 m² de bureaux par an au cours de la dernière décennie (45 % de bureaux neufs). On ne comptabilise que les contrats de location ou vente signés sur des immeubles en cours de construction ou existants. Le besoin quant à lui est bien supérieur : de l’ordre de 130 000 à 140 000 m² par an. Cela signifie qu’en 2023, près de 20 000 m² demandés par les entreprises n’ont pas été satisfaits, centre-ville et périphérie confondus, et nous n’avons pas de solutions à leur proposer. L’immense majorité des immeubles neufs qui arriveront en livraison sur les secteurs de Nantes Centre ou île de Nantes sont déjà loués ou vendus à leurs utilisateurs. S’ils sont vacants, les immeubles ne font pas l’objet de spéculation ni la fortune des investisseurs, c’est un non-sens de prétendre le contraire. »

En conclusion, les professionnels du Cina rappellent que « les entreprises ont elles aussi une conscience écologique forte et sont farouchement attachées à leur politique RSE. Elles veulent des immeubles mieux placés, au plus près des services, pour limiter l’usage de la voiture et favoriser les modes de transports doux ou collectifs. C’est ce qui fait le succès des opérations neuves. Ce sont ces entreprises qui proposent du travail aux habitants. On ne mésestime pas les difficultés à se loger, là encore les entreprises ont les mêmes difficultés et souffrent par ricochet du manque de logements disponibles. Un moratoire ne résoudra rien ni pour les uns ni pour les autres. Ce qui aidera les habitants, les plus fragiles et les plus précaires notamment, c’est de construire la ville plus haute et plus dense comme le Plum, voté, l’autorise. Malheureusement, les projets sont souvent rabotés par ces mêmes élus… ».

*Le Club Immobilier de Nantes Atlantique rassemble les différents acteurs de la filière immobilière.