La grande distribution alimentaire n’est pas la grande gagnante annoncée de la pandémie. Carrefour a failli être racheté par le Canadien Couche Tard, Auchan a lancé un plan de suppression d’un peu plus d’un millier d’emplois, Casino était près de mettre la clé sous la porte. La fréquentation globale est en baisse, une tendance déjà à l’œuvre avant crise avec 2,5% de clients en moins en 2018. Et la chute a atteint -24% pour la période du 17 au 22 mars 2020, selon le cabinet d’étude Nielsen, après les ruées dont on se souvient en vue du premier confinement. Une baisse de fréquentation qui se ressent sur le chiffre d’affaires : -2,7% en 2020 pour les hypers quand le CA était déjà en baisse en 2019 (-0,8%) et une progression limitée pour les supermarchés (+1,7% en 2020 contre -0,2% en 2019 selon l’Insee.
En effet, la situation économique du secteur « dépend des surfaces », expose Cindy Lombart, professeure de marketing à Audencia et spécialiste, notamment, du comportement des consommateurs. Et la pandémie n’a fait qu’accentuer des tendances déjà à l’œuvre avant crise. Dans ce contexte, nous avons souhaité interroger les magasins du territoire pour prendre le pouls de la situation. Mais, comme souvent peu promptes à communiquer, plusieurs enseignes contactées n’ont pas souhaité participer à l’exercice (E. Leclerc, Carrefour et Casino).
Hugues Frioux, vice-président de la CCI Nantes St-Nazaire pour le commerce dresse un état des lieux pour le territoire : « Les magasins en Loire-Atlantique ont plus ou moins gagné ou perdu selon leur situation géographique, selon qu’ils sont proches d’une zone d’activités ou au contraire de zones d’habitations. Ceux proches de zones d’activités ont perdu avec le télétravail, il y a eu moins de ventes de snacking, d’achats du soir après le bureau. Donc des flux très différents par rapport à d’habitude. »
UN HYPER ROUVERT LE JOUR DU CONFINEMENT
Christophe Jolivet, directeur du magasin Auchan à Saint-Herblain, témoigne pour sa part d’une baisse de clients en 2020, mais avec une augmentation du panier moyen d’achats. Pour 2021, la tendance est inverse, « donc ça se régule », estime le directeur qui n’a pas souhaité communiquer ses chiffres. Pour le magasin situé dans une zone à la densité de population forte, le drive a connu des scores exceptionnels pendant les confinements. « Au plus fort de la crise, nous avons dû pour la première fois mettre en place une organisation du travail en 3X8 pour préparer les commandes dans les temps. Les salariés des rayons fermés ont été affectés à ceux qui avaient plus de travail, rapporte le directeur. Nous avons tenu vingt-quatre CSE en 2020, au début c’était toutes les semaines. » Bousculé aussi par un plan 2022 qui prévoit 1088 suppressions d’emplois en France, Christophe Jolivet indique « que seuls trois postes sont concernés en Loire-Atlantique. Il s’agit d’un rééquilibrage. Des périmètres sont en croissance, d’autres en décroissance, donc on se réorganise. » Enfin, un projet est à l’étude pour l’ouverture de services de drive piétons Auchan sur le territoire.
On a été dévalisés en trois jours. Toutes nos webcams ont été vendues en vingt-quatre heures… Pascal CLARET, directeur des Hyper U de La Chapelle-sur-Erdre et Carquefou

Pascal CLARET, directeur des magasins U de La Chapelle-sur-Erdre et Carquefou © Benjamin Lachenal
À l’hypermarché U de La Chapelle-sur-Erdre, ça a été le grand chambardement. Racheté en 2019 au groupe Casino « suite à des difficultés financières, nous avons rouvert le magasin le premier jour du confinement, le 17 mars 2020, témoigne Pascal Claret, son directeur. Les clients sont venus très nombreux au tout début car il n’y avait plus rien dans les autres magasins alentour. Et nous, on a été dévalisés en trois jours. Par exemple, les webcams ont toutes été vendues en vingt-quatre heures… » Un succès qui n’est pas retombé au regard du CA réalisé en 2020 : « 52 M€, quand Casino enregistrait 30 M€ de CA annuel », indique Pascal Claret. Petit bémol : le magasin ne dispose pas encore de drive. « C’est un service que les clients demandent, mais nous avons encore besoin de nous organiser et de matérialiser les places sur le parking. On subit un peu. » Également directeur du magasin U de Carquefou (46 M€ de CA, 192 salariés, 3 750 m2), Pascal Claret se réjouit d’avoir un magasin qui est « le premier U de France en termes de volu…