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Un projet XXL de captage de CO2 lancé dans le grand Ouest

Représentant un investissement d’1,7 Mds€, le projet Grand Ouest CO2 ou GO CO2 vise à capter et transporter jusqu’au port de Saint-Nazaire 2,6 millions de tonnes de carbone par an. Il est porté par quatre industriels et deux gaziers et bénéficie du soutien de la Région et du port. Sa mise en service est prévue à l’horizon 2030.

Le projet GO CO2 a été signé au Conseil régional des Pays de la Loire le 10 juillet en présence des industriels partenaires et la présidente de Région, Christelle Morançais.

Le projet GO CO2 a été signé au Conseil régional des Pays de la Loire le 10 juillet en présence des industriels partenaires et la présidente de Région, Christelle Morançais. ©DR

À l’heure du réchauffement climatique, réduire les émissions de gaz à effet de serre ne suffit plus. Il convient dorénavant de s’attaquer au CO2 présent dans l’atmosphère en le captant pour limiter la hausse des températures. Un projet de ce genre vient d’être lancé dans le grand Ouest. C’est ce qu’ont officialisé le 10 juillet à l’Hôtel de Région de Nantes, Lafarge, Lhoist, Heidelberg Materials, TotalEnergies, Elengy et GRTgaz. Ces quatre industriels et deux opérateurs gaziers ont en effet annoncé le lancement d’un projet XXL de décarbonation baptisé Grand Ouest CO2.

Soutenu par la Région et le Grand Port Maritime de Nantes Saint-Nazaire, ce projet sans équivalent en France a pour objectif de développer un programme d’investissement permettant le captage et le transport du CO2 sur les sites industriels. Mais également son acheminement par canalisation jusqu’au terminal d’export maritime de Saint-Nazaire à destination des zones de stockage géologique permanent, pour une capacité estimée à 2,6 millions de tonnes de C02 par an à l’horizon 2030. Autrement dit, il devrait permettre la mise en place d’une chaîne industrielle depuis les sites industriels les plus polluants de la région en termes d’émissions carbone jusqu’au port de Saint-Nazaire. Un moyen d’accélérer la décarbonation du grand Ouest de la France.

 

Exporter jusqu’à 4 millions de tonnes par an de CO2 en 2050

Concrètement, le projet consiste à construire un “hub“ de décarbonation à Montoir-de-Bretagne. Une cinquantaine d’entreprises qui produisent du C02 y seront reliées par des canalisations. Le CO2 non réutilisable, dit “fatal“, sera chargé à bord de navires avant d’être enfoui dans des sites de stockage pas encore identifiés. Le dioxyde de carbone réutilisable pourra quant à lui être transformé en e-carburant pour l’aviation (e-kérosène, NDLR) ou en plastique. À terme, ce hub devrait également être capable de transporter le CO2 biogénique issu de l’épuration du biométhane. Bénéficiant d’infrastructures déjà existantes au sein du port de Saint-Nazaire, le projet constituera enfin un atout pour attirer de nouveaux sites industriels sur le territoire en offrant un accès à une infrastructure de décarbonation.

Côté calendrier, les études techniques préliminaires devraient se dérouler jusqu’en 2024. Après un débat public en 2025-2026, la décision d’investir sera prise en 2027. Si cette dernière est confirmée, la construction du hub se déroulera entre 2027 à 2030, année de sa mise en service. De quoi, à terme, transporter et exporter jusqu’à 4 millions de tonnes par an de CO2 en 2050, soit plus de 75 % des émissions industrielles du grand Ouest à cet horizon. De quoi s’inscrire dans la stratégie de captage, d’utilisation et de séquestration du carbone de l’État (dans le cadre de France 2030) ainsi que dans l’appel à projet zones industrielles bas carbone de l’Ademe.

 

Le projet de hub de décarbonation industrielle du grand Ouest.

Le projet de hub de décarbonation industrielle du grand Ouest. © DR

 

Un enjeu de pédagogie autour du projet

Nécessitant un investissement d’1,7 Mds€, ce projet financé par les industriels et gaziers du grand Ouest aura également besoin du soutien des acteurs publics et de fonds européens. « Sur ce projet, l’enjeu principal est la pédagogie. Il faut qu’on arrive à expliquer la démarche et à la simplifier pour que chacun puisse s’en emparer », a prévenu la présidente des Pays de la Loire Christelle Morançais, sans pour autant s’engager sur la participation financière de la Région. Emballée par cette initiative, elle y voit « un symbole fort pour la Région et l’opportunité de faire rayonner le Grand Port de Nantes Saint-Nazaire, à l’heure où la transition écologique fait partie de nos priorités. Et ce d’autant plus que GO CO2 a également vocation à s’ouvrir à d’autres industries autour de la décarbonation et qu’il va permettre de créer des emplois ». Autant de raisons qui vont amener l’intéressée à « défendre le projet au niveau européen » pour aller chercher des financements.

 

« Développer une filière de valorisation du CO2 »

Pour les industriels partenaires du projet, c’est tout d’abord l’opportunité « de développer à terme une filière de valorisation du C02 », a rappelé Joachim Labauge, gestionnaire d’actifs chez Elengy. « Sur notre plateforme de Donges, le captage et le stockage du CO2 sont les principaux leviers pour abattre les émissions résiduelles », a poursuivi Etienne Anglès d’Auriac, de TotalEnergies. « Ce projet est clé pour décarboner l’industrie du ciment et de la chaux dans le grand Ouest de la France, a complété Bruno Pillon, président France d’Heidelberg Materials. Car deux tiers des émissions de CO2 de l’industrie cimentière sont aujourd’hui liées au process. Sans captage du CO2, pas de décarbonation du ciment ! » Un enjeu d’autant plus crucial que sur les cinquante sites les plus émetteurs de CO2 en France, vingt sont actuellement des cimenteries.

 

Pour Christelle Morançais, « ce projet est un symbole fort pour la Région et l’opportunité de faire rayonner le Grand Port de Nantes Saint-Nazaire ». ©DR

Pour Christelle Morançais, « ce projet est un symbole fort pour la Région et l’opportunité de faire rayonner le Grand Port de Nantes Saint-Nazaire ». ©DR