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En Vendée, la pénurie de logements à l’année est un frein à l’embauche

Économiquement attractif, le département peine à offrir des logements à l'année aux nouvelles recrues. Pour accroître l'offre d'habitat salarié, les communes prennent des mesures incitatives mais aussi coercitives et tentent de nouvelles solutions.

Les Sables d'olonne vue aérienne

Aux Sables d'Olonne 40% des logements des logements vacants hors saison sont des locations saisonnières (c) LSO

Véritable frein à l’embauche, le manque de logements à l’année est particulièrement aigu en Vendée. Sur le littoral, aux Sables d’Olonne, où la population passe de 45 000 habitants à l’année à 200 000 l’été, on dénombre 40% de résidences secondaires, soit 16 000 logements fermés hors saison. Dans le bocage, et notamment aux alentours des Herbiers, c’est aux visiteurs du Puy du Fou que les propriétaires réservent leurs locations. Une carence dans le parc locatif à laquelle s’ajoutent des logements inhabités. Selon le dernier recensement de l’Insee, 5 à 6% des logements sont vacants sur le territoire du Nord-est vendéen, soit près de 700 maisons et appartements. Aux Sables d’Olonne, le chiffre est estimé à 3 000 logements vacants. Et la pénurie de logements salariés s’accroît aussi en lien avec le phénomène de décohabitation (foyer divorcé). Pourtant, le bassin d’emploi recrute à tour de bras. En 2021, plus de 7 800 recrutements sont prévus sur le territoire du bocage par les entreprises locales, selon la dernière enquête de Pôle emploi. Parmi ces recrutements, plus de la moitié sont considérés comme difficiles par les entreprises, notamment en raison des difficultés à loger les salariés arrivant sur le territoire. Les communes prennent diverses mesures incitatives mais aussi coercitives pour tenter d’accroître l’offre d’habitat salarié.

Les Sables d’Olonne instaure une taxe sur les logements vacants et les résidences secondaires

Aux Sables d’Olonne, Yannick Moreau, le maire de la ville, met en œuvre une batterie de propositions pour ramener des logements dans le parc locatif. La ville offrira notamment dès 2022 une aide aux propriétaires qui loueront leur logement à l’année, pouvant aller jusqu’à 10 000 € en fonction de la surface du logement. Elle va instaurer une taxe d’habitation sur les logements vacants qui s’appliquera dès 2023 avec le même taux fixe que pour les résidences secondaires : 14,38 %. Elle attend aussi le classement par le préfet de la ville en zone tendue. Ce qui permettra non seulement d’instaurer une taxe annuelle graduelle jusqu’à 25% sur les logements vacants (qui remplacera la taxe d’habitation sur les logements vacants) mais aussi de majorer jusqu’à 60 % la taxe d’habitation sur les résidences secondaires dès 2023. Yannick Moreau veut aussi limiter le nombre de locations meublées par quartier en instaurant un quota au-delà duquel il ne sera pas possible de faire de la location touristique. Pour contrôler les propriétaires, l’agglomération a déjà mis en place une obligation de « Déclaration et d’autorisation des locations saisonnières ».

Le Pays de Mortagne va interdire les changements de destination des logements

De son côté, le Pays de Mortagne, qui rassemble 11 communes du bocage, s’est saisi de cette problématique en lançant son guichet habitat en février dernier accompagné d’une vaste campagne d’information durant le mois d’octobre. Ce guichet est destiné à l’accompagnement des bailleurs privés à l’investissement et à la location. Un conseiller s’occupe de toutes les démarches pour obtenir des financements. La communauté de communes abonde notamment les aides de l’État et de la Région à la rénovation énergétiques des logements et propose des aides directes à la rénovation des façades. Déjà 300 000 € ont été investis en 2021 pour des travaux sur les logements vacants. « Nous mettons en œuvre les dispositifs à notre portée », explique Guillaume Jean, président de la communauté de communes. Parmi ceux-ci, un dispositif relativement peu utilisé en France. « Le maire peut, par autorisation préfectorale, interdire le changement de destination d’un bien en cas de vente, indique le président. Comme transformer un logement ou des bureaux en meublé de tourisme. C’est pénalisant pour le propriétaire. Il faut l’assumer ». Le Pays de Mortagne va encourager les maires à l’utiliser systématiquement à partir de la fin 2021.

Requalifier des friches délaissées

L’autre réponse à la carence de logements salariés c’est la création de logements. « Pour répondre à la demande des salariés exogènes mais aussi à l’installation des jeunes et au relogement des foyers divorcés, il faudrait construire au moins 200 logements par an dans le bocage, à des prix permettant de se loger, précise Guillaume Jean. Mais, compte tenu de la petite taille de nos villes, nous ne sommes pas tenus par la loi SRU aux 20% de logements sociaux. Et les bailleurs sociaux préfèrent se concentrer sur les grosses agglomérations pour rentabiliser rapidement leurs programmes. » Les collectivités sont aussi tenues par l’État de maîtriser l’étalement urbain et de limiter la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers et de protéger les sols contre leur artificialisation. Faute de nouveau foncier disponible, les collectivités se tournent donc vers le fonds friches, mis en place par l’État, permettant de proposer du foncier inutilisé (ancienne usine, îlot d’activités et habitats délaissés à requalifier) à ces bailleurs. « Mais entre les dépôts de dossier, la démolition, la dépollution et la reconstruction, cela prend au moins trois ans, déplore le président. Et notre échelle de production de logements n’est pas adaptée à la demande. À l’État de prendre ses responsabilités et d’autoriser certaines communes en tension à consommer des terres agricoles. »

Construire des habitats temporaires

Les maisons modulaires sont une réponse au besoin temporaire ou définitif de logements salariés. Podeliha a réalisé un programme de 18 maisons préfabriquées par Douillard construction à base de modulaires à Saint-Hilaire de Clisson ©Douillard construction-ACPN production, réseau la maison abordable

Déjà certaines, accompagnée par le Clefop 85 (Conseil local emploi, formation et orientation professionnelles), tentent des solutions plus rapides à mettre en œuvre. Cette instance présidée par le préfet a pour ambition de répondre aux besoins en compétences des entreprises à travers une animation nouvelle et l’expérimentation de solutions avec les intercommunalités. À Chanverrie, l’entreprise sociale pour l’habitat Podeliha débute la construction de logements  sur du foncier temporaire avec des constructions modulaires préfabriquées de haute qualité environnementale. Il s’agit d’un programme de 30 logements (T2 et T3) qui seront édifiés dans un an sur une zone d’activités et qui seront déplaçables. « Ce qui suppose de lever pas mal de freins législatifs, comme des réseaux qui ne seront pas enterrés par exemple », précise Guillaume Jean. Cette solution baptisée Habiflex a déjà été mise en œuvre par Podeliha à Saint-Hilaire-de-Clisson en Loire-Atlantique pour un programme de 18 maisons. « Ces maisons seront édifiées a minima pour 4 à 5 ans. Ce qui nous laisse du temps pour monter des programmes d’habitats pérennes », conclut le président.

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