Alors que le nombre de défaillances d’entreprises bondit de 20 % à l’échelle nationale sur un an, la Vendée s’en sort un peu mieux : + 6,3 % seulement de procédures collectives pour le tribunal de commerce de La Roche-sur-Yon. En tant que président du Medef, comment analysez-vous cette résilience relative de l’économie locale ?
Cette performance, si on peut dire, traduit quand même une augmentation du taux de sinistralité, même si effectivement, cette hausse est nettement moins grave en Vendée qu’ailleurs. Pour moi, si ce département échappe à la tendance nationale, c’est grâce à son tissu économique plus diversifié, qui intègre davantage d’entreprises industrielles.
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Dans un contexte politico-économique agité, c’est un atout ?
Il y a une vraie industrie en Vendée. Et il n’y a pas photo : quand vous regardez à travers la France, les territoires qui se portent le mieux, ce sont ceux qui ont conservé un tissu industriel. Pourquoi ? Parce que cela crée des emplois qualifiés. L’industrie entraîne dans son sillage de nouveaux métiers, qui n’existeraient pas sans elle. C’est une erreur collective qui a été faite en France, de croire qu’on pouvait se passer de l’industrie.
Le modèle économique vendéen, marqué par une forte présence d’entreprises patrimoniales, repose sur des valeurs de solidarité et de bon sens. Pensez-vous que ce modèle puisse être une source d’inspiration au niveau national ?
Oui, ça devrait être un modèle pour tous. En Vendée, il y a effectivement cet ancrage qui assure la stabilité, la relation sociale et une forme d’apaisement. Il y a aussi, et je l’assume totalement au risque d’en choquer certains, encore un respect de la valeur travail. Le chômage est faible, la dynamique de croissance est bonne et il y a des entreprises qui se développent, qui se projettent au-delà des frontières du département.
La Vendée a le sens du collectif. Les élus locaux et les entrepreneurs travaillent en bonne intelligence. Dans ce département, le personnel politique pige et cela contribue à ce que ça marche.
Vous parliez du taux de chômage historiquement bas de la Vendée, aux alentours de 5,4 %. Pourtant, le département voit celui-ci répartir à la hausse au quatrième trimestre : + 4,9 % contre 4 % au niveau national. Dans un monde de plus en plus globalisé, ce modèle vendéen n’est-il pas en train de montrer ses limites ?
Non, je ne crois pas. Il y a des constantes qui valent pour tout le territoire national. Le sujet de fond, c’est que nos élus locaux et nationaux doivent prendre pleinement conscience de la compétition internationale et ne prennent pas des décisions qui vont à contresens de ce qu’il faudrait faire, comme augmenter les impôts ou les charges sociales alors qu’il faudrait les baisser. Ils ne prennent pas de mesures d’économie sur les dépenses structurelles. Il y a des marges de manœuvre pour réduire ces dépenses publiques sans dégrader la qualité du service public.
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Heureusement, dans la région Pays de la Loire, il y a des élus locaux parfaitement responsables. Je suis absolument convaincu que le modèle économique vendéen a encore de beaux jours devant lui. Même si j’ai l’outrecuidance de penser qu’il y a d’autres territoires à travers la France qui sont sur ce même modèle. Mais effectivement, c’est un modèle qui apporte de la prospérité économique, de la responsabilité et de la résilience.
La Région Pays de la Loire a fait une coupe de 82 M€ dans son budget. Le Medef Pays de la Loire a publiquement soutenu Christelle Morançais dans cette décision. Quelle est votre réaction à ce sujet ?
Je partage totalement la position exprimée par le Medef Pays de la Loire et son président, mon ami Bertrand Schaupp. C’est évidemment ce qu’il faudrait que l’on fasse au niveau national, et c’est bien la démonstration que c’est possible. Alors, je sais bien que ce n’est pas populaire aux yeux de tous. Mais si les seules à supporter l’effort sont les entreprises, à un moment donné, on scie la branche sur laquelle on est assis. Ce sont les entreprises qui créent l’emploi, la richesse, qui innovent, qui incluent, qui font le plus d’efforts en matière de décarbonation. Et donc je salue, sans l’ombre d’une hésitation, le courage et la lucidité de Christelle Morançais.
En France, 33,5 % des entreprises sont créées par des femmes. Même si ce taux progresse chaque année, cela peut sembler encore peu. Comment le Medef soutient-il l’entrepreneuriat féminin ?
L’entrepreneuriat féminin est un vrai enjeu. Bien souvent, les femmes s’autocensurent dans leurs envies entrepreneuriales. Elles n’osent pas non plus s’engager dans le militantisme patronal. En Vendée, c’est un peu différent puisque le Medef local a la chance d’avoir deux femmes à sa tête. Je m’en réjouis. Cela reflète notre volonté de féminiser nos instances.
L’une des grandes faiblesses de la France, c’est de se priver de talents incroyables. Nous n’avons pas suffisamment de femmes chefs d’entreprise, pas suffisamment de femmes qui créent des start-ups, pas assez de jeunes femmes qui s’engagent dans des formations scientifiques. Or, celles-ci ont généralement de meilleurs résultats que les hommes dans ces disciplines. Même si mes propos ne sont pas politiquement corrects, pour le pays, il doit y avoir plus de femmes qui s’engagent dans l’entrepreneuriat, parce qu’elles réussissent. Mais celles-ci doivent d’abord en prendre conscience.