Comment a démarré l’aventure des Barjots Dunkers ?
Au départ, c’était un délire entre copains : nous étions quatre collégiens souhaitant tester le basket acrobatique. Accompagnés de nos professeurs de sport, nous sommes allés voir Alain Leboeuf (aujourd’hui président du conseil départemental de Vendée, NDLR) alors directeur de notre établissement, le collège Saint-Sauveur à Rocheservière. Il a accepté l’idée de déplacer les trampolines et les tapis de la salle de gym vers le terrain de basket. Nous nous sommes ensuite entraînés pendant trois mois pour préparer un spectacle pour la fin de l’année. Franchement, ce n’était pas fou, mais on s’est bien amusés. Par la suite, plusieurs clubs du département ont fait appel à nous.
Où avez-vous trouvé les financements pour vous lancer ?
Avec nos premiers spectacles, on a récupéré des dotations d’une centaine d’euros à chaque fois. À ce moment-là, j’étais apprenti carreleur. J’ai utilisé mes premiers salaires pour acheter du matériel et les parents des trois autres ont aussi mis la main à la poche. En tant qu’association, nous avions chaque année jusqu’à 200 € de subvention de notre commune, Montréverd[1], mais pas de quoi acheter du matériel. En revanche, la municipalité nous a toujours prêté la salle de basket. Sans cela, on n’aurait rien pu faire.
Comment êtes-vous devenus professionnels ?
Le premier gros spectacle qu’on a fait, c’est en 2006 ou 2007 pour Cholet Basket. Ça nous a donné un bon coup de projecteur. On a ensuite cherché à recruter dans notre entourage. Ancienne gymnaste, Dounia Zbiri, aujourd’hui gérante de la société, nous a rejoints et a amené un peu de féminité dans le groupe qui s’est peu à peu agrandi. Début 2012, on était une quinzaine et on faisait une trentaine de shows par an. C’est à ce moment-là qu’on a réfléchi à l’idée de passer professionnels. Cette année-là, on est montés en puissance avec une soixantaine de dates au compteur. Je suis ainsi devenu intermittent du spectacle[2], tout comme trois de mes camarades. Ma tante, Manuella Albert, qui était à la tête de l’association, a pris la gérance de l’entreprise pour y rester jusqu’en 2018. Nous sommes maintenant neuf à être intermittents et avons acheté petit à petit du matériel. Le prix d’un tapis par exemple, c’est 1 000 € ! Au tout début, ce n’était pas possible de faire un tel achat.
Quel est précisément le statut de l’entreprise aujourd’hui ?
Nous sommes une entreprise avec une licence de spectacles. Nous avons une alternante qui s’occupe de la partie digitale et sommes sur le point d’embaucher une personne pour la communication, la partie commerciale et la gestion des stocks. Avant la pandémie, nous tournions à 80-100 shows chaque année. En 2022, nous sommes passés à 160 spectacles par an. C’est de plus en plus compliqué de tout gérer même si c’est évidemment une très bonne chose.
Comment est-ce-que vous communiquez ?
On est à fond sur les réseaux sociaux, après avoir mis du temps à s’y mettre. Nous avons longtemps eu un site internet que nous gérions nous-mêmes. Depuis la création en 2018 d’un site de qualité, nous avons vu la différence. Cela a permis d’attirer le monde professionnel : les entreprises pour leurs conventions ou galas de Noël, les campings, les sociétés de spectacles…
Communiquer, cela a forcément un coût ?
Le site par exemple nous a coûté 8 000 €. Sur le moment, on s’est posé la question mais aujourd’hui, on ne le regrette pas du tout. Il y a aussi le salaire de notre alternante. Nous créons aussi des affiches et avons en projet de créer une mascotte qui devrait nous coûter environ 2 000 €. Au total, la communication représente chaque année environ 10 % de notre chiffre d’affaires, qui était de 400 k€ en 2022.
Collaborez-vous avec des sponsors ?
Nous avons été sollicités à plusieurs reprises. La première fois, c’était en 2014 après un passage sur TF1 dans l’émission « The Best : le meilleur artiste ». Nous venions alors présenter notre dernière création, un show Led. Ça nous a ouvert pas mal de portes, notamment à l’international. Nous acceptons de faire quelques vidéos pour les marques, comme récemment pour Decathlon, mais pas de contrat d’exclusivité. Notre volonté est de rester indépendants.
À propos de NBA, le 30 mars 2022 restera une date historique pour les Barjots Dunkers. Ce jour-là, vous avez foulé le parquet du club d’Utah Jazz. On peut dire que c’est l’aboutissement d’un rêve, mais aussi d’un énorme travail ?
L’objectif NBA ne date pas de 2004 ! Nous avons procédé étape par étape. Le fait de passer professionnels en 2012 nous a permis de prendre du temps pour réfléchir aux spectacles. Nous avons multiplié les shows et les entraînements. Aujourd’hui, on est dans le détail technique de nos figures. Nous sommes très réguliers, il y a peu de loupés. Et puis un jour, on s’est dit pourquoi pas la NBA ? On a envoyé des vidéos à plusieurs équipes. Le club d’Utah Jazz nous a fait confiance, tout particulièrement parce que c’est l’ancienne équipe du français Rudy Gobert[3]. Et on a depuis été appelés par d’autres équipes. (Il y a quelques jours, les Barjots Dunkers ont renouvelé l’expérience en NBA en se produisant à New York et à Chicago NDLR)
Que représente pour vous la NBA ?
C’est une expérience de fou, même si ce n’est qu’un show de trois minutes. Et se dire qu’on a démarré avec rien, dans une salle de sports de collège et qu’on se retrouve 20 ans plus tard sur un parquet de NBA, l’histoire est belle !
Quels sont vos projets à venir ?
Dans un premier temps, l’année 2023 s’annonce au moins aussi folle que 2022 en termes de nombres de shows. En 2024, ce sera évidemment objectif JO ! Après la NBA, on se dit pourquoi on n’y serait pas ? Pour l’instant, il n’y a rien de prévu et la partie divertissement n’est pas une priorité pour les organisateurs. Cela va se jouer dans les six derniers mois avant l’événement. En tout cas, si nous n’y sommes pas, nous nous dirons que nous aurons tout donné pour y être. 2024, sera aussi l’année de nos 20 ans. On aimerait faire une grande fête, comme pour notre dixième anniversaire.
[1] Nouvelle commune issue de la fusion en 2016 des communes de Mormaison, Saint-André-Treize-Voies et Saint-Sulpice-le-Verdon.
[2] Il faut réaliser un minimum de 43 spectacles par an pour prétendre au statut d’intermittent.
[3] Le français Rudy Gobert, 30 ans a débuté à Cholet Basket en 2011 avant de rejoindre les Utah Jazz en 2013 où il a évolué jusqu’en 2022. Il joue aujourd’hui avec les Timberwolves de Minnesota.