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L’intérim dynamique, mais sous tension

Au 4e trimestre 2021, l’emploi intérimaire a bondi de 5,4 % en Vendée par rapport au précédent trimestre, et ce début d’année semble tout aussi porteur. Mais derrière ce bon chiffre gonflé par la reprise d’activité post-Covid se cache une problématique persistante : celle de la pénurie de main-d’œuvre.

recrutement entreprise intérim

©iStock

Avec 12 422 emplois intérimaires en Vendée fin 2021, soit +18 % sur un an 1, l’intérim dépasse son niveau record de fin 2017.

Rien que sur le dernier trimestre, le secteur a gagné 634 postes dans le département, soit une hausse de 5,4 %1, une évolution supérieure à celle observée au niveau régional (+4,7 %) ou en Loire-Atlantique (+3,94 %).

Pour Guylaine Bossis, directrice régionale du groupe Actual et élue à la CCI Vendée, ces chiffres sont à interpréter avec précaution car marqués par la crise sanitaire et ses confinements successifs. « 2020 n’est pas une année de référence : l’activité a stoppé net du jour au lendemain et n’a repris qu’en septembre 2021. Les chiffres du dernier trimestre 2021, que ce soit dans l’un ou l’autre de ces départements, sont un rattrapage lié à la reprise d’activité, auquel s’ajoutent les commandes en cours.»

Si l’on se réfère à décembre 2019 (avant la crise), ce qui est plus pertinent, l’emploi intérimaire a progressé de 12 % en Vendée, soit deux fois plus qu’à l’échelle régionale (+6,2 %)1. Les Pays de la Loire ont donc globalement bien « tenu la rampe», ce qui n’est pas le cas de la plupart des régions. « Nous avons la chance, que ce soit en Vendée ou Loire-Atlantique, d’être un territoire avec des activités plurielles (transport logistique, industrie agri-agro, sous-traitance automobile, gros œuvre, ouvertures métalliques…), détaille Guylaine Bossis. Cette multiplicité d’activités vient contrecarrer un secteur qui pourrait être en recul, par exemple l’aéronautique en Loire-Atlantique. C’est tout aussi vrai en Vendée en 2022 où la grippe aviaire n’a pas entraîné de baisse du secteur du travail temporaire alors que l’agriculture utilise de nombreux intérimaires habituellement. Ces intérimaires agricoles ont pu être remis sur d’autres postes dans l’industrie. Il n’y a pas eu de hausse du chômage. »

DES RÉSERVES DE MAIN-D’ŒUVRE ÉPUISÉES

Ces statistiques, bien qu’illustrant un dynamisme économique certain, reflètent aussi une autre réalité : celle de la pénurie de main-d’œuvre. La problématique est loin d’être nouvelle mais elle s’est renforcée avec la crise sanitaire. « En mars 2020, le marché intérimaire était déjà sous tension, poursuit Guylaine Bossis. À l’époque, en Vendée, entre 25 et 30 % des postes en travail temporaire n’étaient pas pourvus, et ce, quel que soit le secteur (agriculture, tourisme, hôtellerie-restauration, industrie dont le secteur agroalimentaire).

Une campagne avait d’ailleurs été lancée sur le site Lavendeerecrute.fr pour attirer de l’extérieur de nouveaux talents. En Loire-Atlantique, la situation était un peu différente avec des secteurs plus épargnés sur certaines catégories tertiaires (fonctions support). Dans ce département, la tension portait surtout sur l’informatique et les métiers liés à la comptabilité, l’expertise et social-paie. Fin 2021, les besoins étaient exponentiels. Or, nous n’avions plus la main-d’œuvre en face. Et dans certains bassins d’emploi comme Ancenis ou Les Herbiers, où l’on est en situation de plein emploi 2, le déficit est encore plus criant. »

PERSPECTIVES PRUDENTES

En ce début 2022, l’emploi intérimaire reste soutenu malgré l’épuisement des réserves de main-d’œuvre. En Pays de la Loire, le nombre d’intérimaires en mission a progressé de 15,1 % en janvier (par rapport à janvier 2021), de 13,1 % 3 en février et fléchit légèrement en mars avec une hausse de « seulement» 7,8 % (contre 6,7 % à l’échelle nationale), preuve de cette difficulté à recruter. L’une des raisons : les attentes de candidats ont changé depuis le Covid. « Il n’y a pas que le salaire qui compte, note Laurence Bonnin, directrice régionale du groupe Partnaire. Il y a l’environnement de travail, les valeurs de l’entreprise. Le candidat a le choix et c’est la notoriété de l’entreprise qui va faire la différence. Et depuis trois mois, il y a un nouvel élément à prendre en compte : le conflit ukrainien et la flambée des carburants qui en découle. Aujourd’hui, les intérimaires sont très attentifs à la distance domicile-travail. Au-delà de 30 km, ce n’est plus acceptable. »

Avec le Covid, les entreprises ont appris à naviguer à moyen terme et à s’adapter. « Malgré tout, observe Laurence Bonnin, dans ce contexte d’incertitudes géopolitiques, l’inquiétude se fait ressentir et un ralentissement de l’activité économique est attendu sur le second semestre 2022.» « Certains chantiers sont annulés en raison de la hausse des matières premières ou du retard d’approvisionnement, principalement pour le secteur de la métallurgie, indique Guylaine Bossis. À cela s’ajoute le remboursement des PGE (prêts garantis par l’État) qui inquiètent certaines entreprises et risquent de freiner les embauches. »

DES LEVIERS POUR AMÉLIORER L’ATTRACTIVITÉ

Pour combler leur besoin de main-d’œuvre, les entreprises et fédérations professionnelles travaillent main dans la main avec les agences de travail temporaire. Premier levier : renforcer l’attractivité des métiers et séduire un nouveau public. Les vidéos et les visites pour présenter l’entreprise et les postes qui recrutent fonctionnent plutôt bien. Deuxième levier : former les intérimaires et encourager leur montée en compétences pour les fidéliser. Troisième levier : développer le CDI intérimaire 4. « Tout cela donne une trajectoire aux intérimaires, les aide à se projeter, résume Guylaine Bossis. Et cela rassure aussi les entreprises de savoir que l’on conserve les compétences dont elles ont besoin dans nos agences. »

 

1.Source : Tableau de bord économique OESTV (Observatoire économique social et territorial de la Vendée), avril 2022.

2.Taux de chômage aux Herbiers fin 2021 : 3,4 %. Source : INSEE

3.Source : Credoc publié dans la note de conjoncture du syndicat Prism’emploi, mars 2022

4.Selon le ministère du Travail, « un salarié sous CDI intérimaire est un salarié embauché et rémunéré par une ETT (entreprise de travail temporaire) qui le met à disposition d’une entreprise utilisatrice pour une durée limitée (mission) ».

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