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Des pistes pour passer à la semaine de quatre jours

Horaires, productivité, charge de travail, relations clients, législation, salaires… Les entreprises qui envisagent de basculer vers la semaine de quatre jours sont confrontées à une multitude de problématiques. Pour les aider à y voir plus clair, le Web2Day proposait, le 2 juin dernier, une conférence intitulée “Semaine de quatre jours : trucs et astuces pour bien la préparer“.

Web2Day

Anaïg Nouvel, Jérémie Pottier et Émilie Abel ont livré leur retour d'expérience sur la semaine de quatre jours. © IJ

D’un point de vue organisationnel et juridique, passer à la semaine de quatre jours implique de nombreux changements dans la vie de l’entreprise. Deux sociétés nantaises fraîchement “converties“ étaient le 2 juin dernier au Web2Day pour livrer leur retour d’expérience : DoYouBuzz (sept salariés), entreprise spécialisée dans la création de CV en ligne ayant basculé il y a deux ans, et Immodvisor (45 salariés), qui accompagne les professionnels de l’immobilier dans leur e-réputation et teste depuis deux mois cette nouvelle organisation.

Émilie Abel, l’animatrice de la conférence et co-fondatrice du start-up studio Imagination Machine, également à la semaine de quatre jours, a débuté son intervention par trois chiffres clés : « 40 %, c’est la hausse de rentabilité des salariés enregistrée en août 2019 lorsque Microsoft Japon l’a testée pendant un mois. 9,14, le nombre d’heures travaillées chaque jour par les salariés de Welcome to the Jungle lors d’un test de cinq mois. -23 %, la réduction de la facture d’électricité chez Microsoft Japon lors de cette expérimentation. »

Limiter les risques de burn-out

Pour entrer dans le vif du sujet, l’animatrice a interrogé les deux témoins sur l’élément déclencheur et la mise en place du dispositif. « C’est une directrice que nous venions de recruter qui a imposé de travailler sur quatre jours, a débuté Anaïg Nouvel, directrice générale d’Immodvisor. Elle se connaissait suffisamment bien pour dire que si elle travaillait sur cinq jours, elle risquait un burn-out. Ensuite, deux autres membres du Codir ont souhaité basculer à quatre jours pour se préserver. Ça a fait progressivement bouger les lignes auprès de la direction. La question d’élargir la semaine de quatre jours s’est posée il y a un an et on l’a finalement mise en place il y a deux mois pour la tester durant six mois. L’objectif est non seulement d’améliorer l’équilibre vie pro/vie perso de nos équipes, mais aussi de travailler notre marque employeur et attractivité dans un contexte de pénurie de compétences. »

Chez DoYouBuzz, qui fonctionne en gouvernance partagée, « le sujet s’est invité en réunion fin 2020 car l’actualité commençait à en parler, a embrayé Jérémie Pottier, cofondateur. Cela a donné lieu à une longue discussion. Ça semblait être la suite logique pour nous étant donné qu’on était en “full“ télétravail. Le déploiement s’est déroulé en trois phases : une longue observation, une expérimentation, puis la validation. Chez nous, chacun a choisi son jour en dehors du lundi réservé aux réunions d’équipe. Il n’y a pas eu d’augmentation du temps de travail. La phase de test a duré six mois. »

Un sondage mensuel pour identifier les points de friction

Immodvisor a lancé son expérimentation en avril dernier. « On n’a pas eu de phase d’observation, mais plutôt une grande préparation, principalement opérée auprès des managers. Depuis, nous avons mis en place un sondage mensuel auprès des équipes pour avoir des retours sur les points de friction et les problématiques générées par cette nouvelle organisation. Sur 45 collaborateurs, 15 la testent, et 90 % d’entre eux ont pris le vendredi, ce qui n’est pas évident à gérer pour le service client. »

D’un point de vue pratique, chaque collaborateur a signé un avenant pour passer aux quatre jours. « Nous travaillons 37h par semaine, donnant droit à des RTT et des heures majorées, détaille la directrice générale. Chez nous, ceux qui ont choisi de passer aux quatre jours sont désormais aux 35h et ne bénéficient plus de RTT ni d’heures supplémentaires majorées. Une évolution plutôt bien acceptée par les personnes concernées. »

« La surflexibilité nuit à notre agilité »

Au bilan, chez Immodvisor « les parents ont globalement pris leur vendredi et apprécient tous ce nouveau rythme de vie, poursuit la directrice générale. On a d’ailleurs recruté deux mamans depuis sa mise en place. Ce changement est également bénéfique dans le sens où il nécessite de remettre en question l’ensemble de l’organisation et le fonctionnement de chaque service. Ça nous a permis d’identifier des sujets qui n’étaient pas parfaits, de les corriger et de grandir. L’autre enseignement, c’est qu’en cumulant la semaine de quatre jours et la possibilité de télétravailler, la surflexibilité nuit à notre agilité. Il nous faut désormais plus d’un mois pour caler une réunion avec toute l’équipe ! »

Anaïg Nouvel a enfin pointé du doigt que cette nouvelle organisation peut également « générer un sentiment d’injustice pour les collaborateurs restés à cinq jours. C’est le cas d’un père de trois jeunes enfants qui vit loin de nos locaux. C’est pourquoi on se donne également le droit de revenir en arrière en septembre prochain, moment où l’on doit officialiser ou pas le changement. Pour l’instant, à la question de savoir si cela nous apporte de la liberté d’esprit, c’est un oui complet. Pour la flexibilité, le bilan est plus contrasté. »

Apprendre à dire non à certaines sollicitations

Chez DoYouBuzz, où la souplesse et la liberté de travail étaient déjà très marquées, le bilan a été dressé de manière plus subjective : « Nous avons effectué un simple tour de table pour nous assurer que cette nouvelle organisation convenait à chacun. Ce qui a été le cas car chacun avait l’impression de continuer à être aussi efficace, tout en ayant une meilleure vie perso et sans pour autant avoir rencontré de frein. Pour nous, cette validation a donc quasiment été un non-événement. En revanche, on a constaté depuis sa mise en place que nos collaborateurs prennent de plus en plus de demi-journées le mercredi et le vendredi après-midi. »

Enfin, pour Imagination Machine, où personne ne travaille le vendredi mais chacun peut se rendre disponible en cas de coup de téléphone d’un investisseur, « passer à la semaine de quatre jours a été une belle expérience, qui nous a imposés de mettre en place des règles d’organisation, comme la priorisation des tâches. Au passage, nous avons aussi appris à dire non à certaines sollicitations externes », conclut sa co-fondatrice.

 

 

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