Couverture du journal du 03/05/2024 Le nouveau magazine

Comment Nantes compte devenir pionnière du réemploi

Afin de faire de la Cité des Ducs une terre pionnière en matière de réemploi, Nantes Métropole a annoncé fin novembre plusieurs mesures d’envergure pour soutenir la filière et l’aider à mieux se structurer. Parmi elles : l’ouverture d’une nouvelle ressourcerie à Rezé en 2025, la mise en place d’agents valoristes dans les déchetteries, le doublement des subventions aux ressourceries et la création d’un fonds d’1 M€ pour soutenir les projets industriels innovants.

Après la liquidation judiciaire de la Ressourcerie de l'Île en mars dernier, Nantes Métropole a annoncé l'ouverture d'une nouvelle ressourcerie à Rezé d'ici 2025. ©Emmanuel Ligner

Après la liquidation judiciaire de la Ressourcerie de l'Île en mars dernier, Nantes Métropole a annoncé l'ouverture d'une nouvelle ressourcerie à Rezé d'ici 2025. ©Emmanuel Ligner

Économiser les ressources et répondre aux enjeux de la transition écologique, tout en réduisant au passage les déchets et en protégeant le pouvoir d’achat des habitants… Voici quelques-uns des avantages du réemploi. En première ligne de cette filière, les ressourceries permettent de collecter des produits issus du réemploi et d’en donner accès aux habitants.

À Rezé, la Ressourcerie de l’Île, ouverte en 2010 et employant 30 salariés, faisait figure de vaisseau amiral du secteur pour toute la métropole. Malheureusement, ses 22 000 visiteurs annuels n’ont pas suffi à lui faire échapper à la liquidation judiciaire prononcée en mars dernier. « Une fermeture amèrement regrettée », a souligné Agnès Bourgeais, maire de Rezé, lors du point presse du 17 novembre, organisé conjointement avec Nantes Métropole. « La ressourcerie était plébiscitée par les habitants de Rezé et plus largement tous ceux du territoire. C’est pourquoi nous avons activement coopéré avec la Métropole pour reconstruire un projet de ressourcerie sur notre commune. »

« Cette fermeture a été un électrochoc qui a appelé un plan de rebond pour la filière du réemploi solidaire, a poursuivi Mahel Coppey, vice-présidente de Nantes Métropole. C’est pourquoi elle a été l’occasion pour les acteurs de la filière de se retrouver et se poser les bonnes questions. Ces rencontres ont abouti à une réaffirmation du soutien financier et d’accompagnement de la Métropole à une filière qui reflète les valeurs de solidarité et d’écologie que nous portons. Ce soutien se traduit par plusieurs grandes annonces. »

Une nouvelle ressourcerie métropolitaine pour janvier 2025

La première sera l’ouverture d’une nouvelle ressourcerie métropolitaine à Rezé. Le projet devrait se concrétiser d’ici janvier 2025. Où précisément ? L’information n’a pas filtré… En revanche, on sait que l’exploitation du lieu sera confiée à une structure d’insertion par l’activité économique, à travers un marché public dont le lancement est imminent. Nantes Métropole prendra quant à elle en charge le bail ainsi que l’aménagement du futur site (comptoir de don, espace de stockage, préparation et vente). Un investissement estimé à 860 k€ (hors frais de fonctionnement), qui permettra notamment de valoriser les objets collectés en déchetteries.
Avec cette nouvelle ressourcerie, la ville de Rezé fait du soutien et de la pérennisation sur son territoire des structures de l’économie sociale et solidaire (ESS) et des acteurs du réemploi l’une de ses priorités. « Avec 160 établissements employeurs de l’ESS sur notre ville, une réflexion est en cours pour développer un grand pôle métropolitain de l’ESS à Rezé, a ajouté la maire. Nous portons l’ambition d’une nouvelle économie, plus juste socialement et plus vertueuse. L’avenir du territoire doit être pensé autour de ces dynamiques sociales et solidaires. »

 

Les structures du réemploi accompagnées financièrement par la métropole. ©Nantes Métropole.

Les structures du réemploi accompagnées financièrement par la métropole. ©Nantes Métropole.

Présence systématique d’un agent valoriste en déchetterie

La deuxième annonce de la collectivité concerne l’amélioration de la valorisation dans une démarche de réemploi des objets collectés en déchetteries. La Métropole a ainsi intégré de nouvelles exigences dans les futurs marchés d’exploitation des dix déchetteries du territoire gérées par des opérateurs privés. Le nouveau marché prévoit notamment « la présence permanente d’un agent valoriste auprès de la benne tout-venant (soit la création de 15 équivalents temps plein) et la formation de l’ensemble des agents pour évaluer le potentiel de réemploi ou de recyclage des déchets, afin qu’ils soient déposés dans les zones appropriées ». Ces nouvelles conditions d’exploitation entreront en vigueur à partir d’octobre 2024.
À noter qu’à partir de mars 2024, le nouveau marché de collecte du réemploi en déchetterie (estimé à 660 k€ par an) intégrera également la reprise des rebuts, c’est-à-dire les objets sans possibilité de réemploi ou invendus par les ressourceries. La métropole répond ainsi à une demande récurrente des ressourceries du territoire.

Ressourceries : les subventions de fonctionnement doublées

Troisième action annoncée pour renforcer la filière : un meilleur soutien financier aux autres ressourceries du territoire, de manière à renforcer leur stabilité financière. La Métropole a en effet décidé de doubler le montant de leurs subventions de fonctionnement. Pour celles situées dans les quartiers prioritaires de Nantes, le coup de pouce passe de 5 000 € à 10 000 € par an et par projet. Pour les autres, l’aide sera plafonnée à 6 000 €, contre 3 000 € auparavant. Par ailleurs, pour les projets ayant une dimension métropolitaine ou jouant un rôle de médiation auprès des habitants dans un quartier, Nantes Métropole pourra apporter une aide en fonctionnement plafonnée à 30 000 € par an et par projet, ainsi qu’une aide à l’investissement de 10 000 €, en complément d’éventuelles autres aides de la collectivité.
Nantes Métropole a enfin pris l’initiative de créer un nouvel outil de financement qui sera géré par France Active Pays de la Loire et dédié aux acteurs de l’économie sociale et solidaire. Il sera lancé début janvier 2024. L’investissement prévu est de 300 k€ sur 2024-2025. Somme qui servira à soutenir le développement des ressourceries du territoire.

Renforcer le maillage des boutiques et comptoirs de dons

Renforcer le maillage des boutiques et comptoirs de dons sur le territoire est le quatrième axe de travail de la métropole. Cela passera notamment par la mise en place de “corners réemploi” dans certains supermarchés, la Métropole se chargeant de mettre en relation les ressourceries et les enseignes volontaires.
Souhaitant également soutenir les structures de réemploi et les communes qui envisagent de les accueillir, Nantes Métropole étudie par ailleurs plusieurs pistes, allant du co-portage (1) immobilier entre la Métropole et la commune, à la mutualisation de locaux déjà occupés par des ressourceries. Enfin, les services de la Métropole travaillent, en partenariat avec La Banque des Territoires et Les Ecossolies, à la création d’une foncière dédiée aux projets immobiliers de l’ESS. Cette dernière pourrait, à terme, porter les murs d’un local permettant de mutualiser les fonctions de stockage, tri et préparation au réemploi. Un projet avoisinant 2,5 M€ pour la métropole.

« Habits de seconde main, téléphones ou objets électroménagers reconditionnés, le réemploi est déjà une réalité au quotidien pour de nombreuses habitantes et habitants de notre territoire. Avec un soutien volontariste de la Métropole tant au réemploi solidaire qu’aux projets industriels innovants, je veux aujourd’hui affirmer l’ambition nantaise d’être une terre de réemploi et d’en faire un marqueur fort d’un développement économique responsable », a conclu Johanna Rolland, présidente de Nantes Métropole.

(1). Il s’agit d’un portage du bail par la commune, qui peut sous-louer avec une aide au loyer aux acteurs dont l’activité est jugée d’intérêt communal, complétée par une aide éventuelle à l’immobilier d’entreprise attribuée par la Métropole. Cette aide à l’installation contribue au financement de l’agencement des locaux pour les structures qui souhaitent tenir boutique et comptoir de dons dans ces locaux.

Construit à partir de carbone déclassé d’Airbus, l'Imoca du skipper Armel Tripon “Les P’tits Doudous” pourrait devenir le premier projet à bénéficier du fonds d’innovation réemploi. ©Jean-Louis Carli

Construit à partir de carbone déclassé d’Airbus, l’Imoca du skipper Armel Tripon “Les P’tits Doudous” pourrait devenir le premier projet à bénéficier du fonds d’innovation réemploi. ©Jean-Louis Carli.

Un fonds d’1 M€ pour des projets industriels innovants

Dernière action envisagée par Nantes Métropole : la création d’un fonds d’1 M€ pour financer des projets industriels innovants dans le champ du réemploi. Si cette démarche est déjà engagée au sein de quatre filières stratégiques (Matériaux composites carbone, Mode durable, Numérique responsable et Matériaux de construction), Nantes Métropole propose d’aller plus loin en finançant cinq projets par an entre 2024 et 2026. Les aides, plafonnées à 100 k€ par projet, pourraient être attribuées dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt annuel. Actuellement en construction aux chantiers Duqueine Atlantique à Malville et fabriqué à partir de carbone déclassé d’Airbus, l’Imoca bas carbone du skipper nantais Armel Tripon “Les P’tits Doudous” pourrait devenir le premier projet emblématique à en bénéficier.