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Vignoble Nantais : Touché mais pas coulé !

Taxe « Trump », gels successifs, crise sanitaire… Comment le vignoble nantais va-t-il résister aux coups du sort qu’il subit ? À quelques mois des prochaines vendanges, qui seront maigres, le point sur un secteur inquiet, mais tenace.

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© Pauline Théon pour le Domaine Luneau-Papin

Ne pas mettre tous ses raisins dans le même panier : telle pourrait être la devise de la vigneronne Marie Chartier-Luneau, qui a co-créé avec Fabien Cheneau, agent commercial en vins et spiritueux, en 2011, l’association Vignes de Nantes, qui compte aujourd’hui dix-sept adhérents. Des vignerons qui, pour adhérer, doivent être présents dans un des deux guides de référence, les guides de la Revue des Vins de France vert et le guide Bettane & Desseauve. Et qui réalisent donc, pour beaucoup, une partie substantielle de leur chiffre d’affaires à l’export; environ 50 % pour le domaine Luneau-Papin par exemple, dont les vins sont distribués dans une quarantaine de pays. Un choix de diversification géographique dont la propriétaire se félicite aujourd’hui, et qu’elle souhaite poursuivre en allant à la rencontre de nouveaux marchés, dans un contexte complexe. « Le premier et assez récent coup dur est arrivé avec la « surtaxe Trump » en 2019, résume-t-elle. Ensuite la Chine, puis les autres pays, ont fermé leurs portes à cause de la crise sanitaire. Enfin, le gel est venu détruire une bonne partie de la future récolte. »

Maintenir le lien commercial

Une véritable série noire au moment où l’exportation du muscadet était en pleine croissance, particulièrement aux États-Unis. Suspendue en mars dernier, la taxe Trump à elle seule a pu « faire baisser de 20 % à 30 % le chiffre d’affaires du secteur », estime Carmen Suteau, présidente du syndicat des vignerons indépendants nantais, qui regroupe 150 adhérents. Heureusement, le Brexit, lui, n’a pour le moment pas eu véritablement d’impact. Au plus fort de la crise, maintenir une présence commerciale a été une nécessité. « Tous les salons ont été annulés, commente Carmen Suteau, notamment celui des Vins de Loire.

La Région a continué d’accompagner la filière, nous avons organisé des testings en visio par exemple.» Pour Lydie Bernard, vice-présidente du Conseil régional des Pays de la Loire et présidente de la commission Agricultures agro-alimentaire, alimentation, forêt, pêche et mer, il était effectivement impensable de ne pas réagir. « La filière vinicole est la plus présente de la région à l’international dans le domaine agri/agro, commente Lydie Bernard. La Région, qui a la compétence de l’international, l’a aidée à poursuivre les échanges, en mettant en place de nombreux évènements en visio notamment. Un collectif ligérien s’est créé pour aller chercher des marchés, avec des mises en contact avec les acheteurs…» Les différents soutiens de l’État et de l’Europe à la filière n’ont cependant pas pu jouer sur les charges salariales. « Même quand les ventes ne sont pas au rendez-vous, elles restent les mêmes pour une exploitation, constate Carmen Suteau. Le chômage partiel ne peut pas être utilisé, car le travail d’entretien de la vigne reste nécessaire toute l’année.»

Fonds d’urgence gel : qui en a bénéficié ?

99 vignerons (principalement) et arboriculteurs de Loire-Atlantique ont bénéficié du fonds d’urgence mis en place par l’État suite au gel, d’un montant de 208000 €, dont 30 jeunes agriculteurs, prioritaires pour son attribution, qui ont perçu entre 2 000 et 6 000 €. Les 69 autres dossiers éligibles ont perçu une aide allant de 1362 à 4 000 €. 160 dossiers ont été transmis à la DDTM 44 (Direction départementale des territoires et de la mer).

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© Pauline Théon pour le Domaine Luneau-Papin

Faire évoluer les techniques de production

Si les pertes liées à la crise sanitaire n’ont pas encore été évaluées précisément pour la Loire-Atlantique, les conséquences d’un autre évènement, climatique celui-ci, ont à nouveau plombé le paysage et sont directement mesurables. Le plus touché en France cette année 2021, le vignoble nantais a perdu plus de 70% de sa récolte suite aux épisodes de gel d’avril. « La pandémie a fait mal, mais le gel du printemps plus encore, constate Marie Luneau. La pandémie nous a permis de réfléchir, de nous poser, de réfléchir à notre façon de travailler, de se demander si tous les voyages que nous effectuons, les dîners, etc… sont tous vraiment nécessaires.

Par contre, face à quatre années de gel en six ans, qui nous a fait perdre environ 80 % de notre récolte cette année, on est plus démunis, même si on y croit encore ! » Cette répétition catastrophique, pour Lydie Bernard, directement liée au changement climatique, « conduit à accélérer les réflexions sur le matériel anti-gel, bien sûr, mais surtout sur des techniques de production qui doivent évoluer, et que l’on doit accompagner ». Mobiliser la recherche pour travailler sur de nouveaux cépages, plus résistants, affiner les prévisions climatiques pour mieux se préparer, avec une cartographie ad hoc en préparation… L’aide à l’investissement (660 millions depuis 2015 au niveau régional pour la filière) et la mobilisation des pôles de compétitivité sont à l’ordre du jour. À court terme, la récolte de 2020 ayant été favorable, la pénurie. Mais pour combien de temps ?

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