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Quelles pistes pour l’export ?

À quoi s’attendre sur le plan géopolitique ? Quelles peuvent être les opportunités d’exportations ? Comment se portent nos relations commerciales ? Dans une conférence organisée par l’International Ouest Club, le 10 décembre 2020, le politologue Thierry Garcin a livré des éléments de réponses.

export

© Photo de Tom Fisk provenant de Pexels

« En ces temps de crise, on découvre que l’export peut être un facteur de résilience, de rebond », a déclaré en préambule Bruno Voisard, président de l’International Ouest Club depuis le mois de juin. C’était donc le but de cette soirée : éclairer sur de nouvelles voies de développement pour nos entreprises avec quelques réflexions synthétiques de Thierry Garcin, spécialiste des relations internationales et chercheur associé à l’université Paris-Descartes. En une heure, il a dressé un panorama des régions majeures du globe, pour le commerce, notamment.

INDISPENSABLES ÉTATS-UNIS

Les USA, ce sont 12% des exportations françaises et c’est le deuxième partenaire commercial de la France. L’éviction de Donald Trump à la tête du premier PIB mondial est « très important » pour Thierry Garcin car l’homme était « très versatile et ne connaissait pas les dossiers ». Mais qu’attendre de l’élection de Joe Biden ? Un point d’assurance tout d’abord, l’attachement du nouveau président aux règles du droit international. « Malgré de grandes faiblesses, il reste un code qui régule et mieux vaut avoir des États-Unis coopérants. » En particulier en ce qui concerne l’Organisation mondiale du commerce, que Donald Trump envisageait de quitter. « Cela aurait été très dangereux pour les exportateurs. »

Mais, attention à ne pas nourrir trop d’espoirs de changements sur la sphère internationale : « Joe Biden sera d’abord préoccupé par des questions nationales comme la relance de l’économie ou le système de santé, d’autant qu’il aura en ligne de mire des élections de mi-mandat qu’il devrait perdre, comme c’est souvent le cas aux États-Unis. » Comme ses prédécesseurs depuis Barack Obama, Joe Biden devrait poursuivre le désengagement sur les théâtres d’opération au Proche et Moyen-Orient. À noter, une aversion particulière du nouveau président pour la Russie, « probablement liée à sa génération ».

Manhattan, New York © iStock

Ce pour quoi Thierry Garcin préconise, pour nous, « de ne pas exacerber les tensions entre la Russie et l’UE ». Autre question importante pour le commerce international : comment la nouvelle administration va-t-elle agir sur le plan des lois extraterritoriales ? Les États-Unis ont en effet coutume de sanctionner leurs alliés commerçant avec les États figurant sur leurs listes noires. Par exemple, en 2014, BNP Paribas avait dû payer aux États-Unis une amende de 7 Md€ pour avoir contourné les sanctions américaines contre l’Iran, le Soudan et Cuba. Et de rappeler que « nous avons tout intérêt à rétablir les relations transatlantiques » car les USA disposent « d’atouts considérables ». Aux premiers rangs desquels, outre son PIB, une deuxième place pour les exportations mondiales, une R&D très dynamique et un budget de la défense colossal à hauteur de 732 Md$ avec « des technologies que personne ne possède ». Pour Thierry Garcin, les USA conserveront leur place d’unique superpuissance mondiale pendant encore vingt à trente ans. « La Chine reste un enfant sur bien des sujets », estime-t-il.

L’UE, NOTRE PREMIER PARTENAIRE

Dans l’UE, « la France est affaiblie, reconnaît Thierry Garcin. Mais elle dispose toujours d’atouts remarquables à l’export ». Et de citer, l’aéronautique, la navale, le BTP, l’agroalimentaire, le luxe, la pharmacie ou encore le spatial. 60% de l’export français part d’ailleurs à l’intérieur des frontières de l’UE. L’aspect majeur évoqué est la question du Brexit, aucun accord n’ayant été trouvé à ce jour avec le Royaume-Uni, alors que la date limite est le 31 décembre 2020. « C’est préoccupant. La France va perdre un allié très précieux, notamment au Conseil de sécurité des Nations unies. Et, en cas de litige commercial, le dossier ira devant l’organisme de règlement des différends de l’OMC, à Genève, qui est très lent… »

L’INCONNUE CHINOISE

Shanghai, China © iStock

La Chine est le premier exportateur mondial. « C’est une nation aléatoire, la Chine s’est insérée dans la mondialisation depuis seulement quarante ans et elle ne va pas s’arrêter là malgré des handicaps colossaux, introduit Thierry Garcin. C’est la grande interrogation pour les années à venir… Quel rôle va-t-elle jouer ? Son Président n’en sait rien lui-même.

L’UE doit avoir cet élément en tête car c’est le premier client de la Chine. » Mais la Chine n’est pas une superpuissance politique et militaire. Bien que, quand même, la Chine soit aux manettes de la construction de relations commerciales sur le continent asiatique, tout comme les USA sur l’ensemble du continent américain. La Chine est à l’initiative du récent Partenariat régional économique global, signé le 15 novembre 2020 (1). Par ailleurs, Xi-Jinping a annoncé son intention de rejoindre le partenariat transpacifique (2), initié par les États-Unis mais dont Donald Trump s’était retiré en 2017.

L’un de ses atouts majeurs, que les Ligériens doivent avoir en tête, c’est le commerce maritime. « 45% des vingt premiers ports mondiaux sont chinois et 75%, asiatiques. Sachant que 80% du commerce mondial est maritime. Enfin, les Chinois investissent beaucoup en Europe, notamment dans les infrastructures, les ports et l’énergie. « Avec un accord de réciprocité à trouver au plus vite. Mais attention à ne pas diaboliser le commerce avec la Chine. Nous devons y être présents. » Tout comme en Russie.

L’INVESTISSEMENT EN RUSSIE

Leroy Merlin en Russie © iStock

La France possède le premier stock d’investissement direct étranger (IDE) en Russie, devant l’Allemagne, depuis 2018, soit 23 Md€ en 2019. La France y est aussi le premier employeur étranger. « Mais les sanctions économiques depuis 2014 contre la situation en Crimée ont conduit des sanctions réciproques. Il faut y faire attention car ces sanctions sont souvent contreproductives et contournées. Elles ne suffisent pas à rétablir un équilibre politique. »

LES OPPORTUNITÉS INDIENNES

Même si l’Inde n’est pas comparable à la Chine en termes de PIB, elle compte des secteurs d’excellence. « Et la France a des choses à leur vendre, expose encore Thierry Garcin. Tout comme en Afrique subsaharienne ou au Moyen-Orient où pour l’instant pas grand-chose ne se passe à part pour les ventes d’armes qui sont, bien sûrs, essentielles pour nous. » En Afrique nord et sub-saharienne, la progression de l’export est lente mais régulière.

De quoi nourrir vos éventuels projets…

LES GRANDES RÉGIONS D’EXPORTATIONS FRANÇAISES

L’Union européenne représente 60% de l’export français, suivie par l’Asie (13%), l’Amérique du nord (12%), l’Europe hors UE (7%) et l’Afrique (5%).


  1. L’accord de libre-échange a été signé, notamment, par l’Australie, la Birmanie, Brunei, le Cambodge, la Chine, la Corée du Sud, l’Indonésie, le Japon, le Laos, la Malaisie, la Nouvelle-Zélande, les Philippines, Singapour, la Thaïlande et le Vietnam.
  2. Le partenariat est en vigueur depuis le 30 décembre 2018. Il a été ratifié par le Japon et la Nouvelle-Zélande, et signé par l’Australie, Brunei, le Canada, le Chili, la Malaisie, le Mexique, le Pérou, Singapour et le Vietnam.

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