Couverture du journal du 01/10/2025 Le nouveau magazine

Vincent Charpin de BePublic : « En France, on a le culte de l’inactivité »

Personnage public pendant des années – il a été successivement président du Medef départemental puis régional - Vincent Charpin a retrouvé depuis un an sa liberté d’entrepreneur, sans mandat représentatif.
Le dirigeant du groupe BePublic, aux activités majoritairement impactées par la crise, oscille entre optimiste et inquiétude… sans pouvoir s’empêcher de pointer les failles de notre système.

Vincent CHARPIN DIRIGEANT DU GROUPE BEPUBLIC

Vincent Charpin, Dirigeant du groupe BePublic © Benjamin Lachenal

Comment allez-vous ?

Je vais bien ! Depuis un peu plus d’un an j’ai quitté le Medef et j’ai disparu des radars au même moment. J’ai récupéré la totalité de mon agenda alors que j’en étais privé des deux tiers. J’avais un rythme beaucoup plus soutenu, parfois trépidant ou exaltant, mais souvent fatiguant. Du coup, je vis aujourd’hui un peu comme un ours. Après, est-ce qu’il faut que ça dure ou pas… Je n’en tire pas de conclusion particulière. Je n’ai pas retrouvé d’appétence pour la chose publique. Elle était très forte lorsque j’avais cette mission et aujourd’hui ça a disparu. Et, au demeurant, je trouve ça plutôt rassurant d’être capable de jouir d’une nouvelle vie sans être sans cesse interpellé. Malgré tout, en ce moment, il y a pas mal de choses qui me titillent !

Lesquelles ?

La crise que l’on vit est extrêmement intéressante à de multiples titres. Tout le monde n’y voit pas les mêmes choses, les mêmes nécessités de changements. Moi j’y vois quand même l’expression d’un système qui est à bout de souffle à de nombreux égards. Il y a des choses à changer. J’ai donc parfois envie de reprendre mon bâton de pèlerin ou les gants pour défendre certains sujets.

Ce qui me peine, c’est que le gouvernement engloutit des dizaines de milliards pour soutenir l’emploi et les entreprises et qu’il y a une très grosse déperdition. Dans nos entreprises qui sont contraintes à une activité réduite, voire à une activité zéro, on met les gens au chômage partiel. C’est super que cette mesure existe, mais je trouve dingue que l’on indemnise les gens en leur demandant de rester chez eux et de ne surtout pas travailler alors que les entreprises ont un besoin fou de garder toutes leurs ressources autour d’elles pour construire de nouvelles choses.

Personnellement, j’ai besoin de trouver de nouveaux clients, de nouvelles idées. Il faut concevoir, prototyper, rendre le produit viable juridiquement, commercialement… C’est un chemin colossal. Les entreprises ont donc besoin d’avoir tout le monde sur le pont en cette période de crise. Et donc je regrette qu’on ne donne pas plutôt aux entreprises de quoi payer les salaires de leurs employés pour travailler sur l’innovation. Je pense que c’est une occasion manquée colossale. Il y a certains secteurs où, bien sûr, ce n’est pas du tout applicable, mais ça l’est dans plein d’entreprises, dès lors qu’on a une part de création, d’innovation.

Malheureusement, en France, on a le culte de l’inactivité. On est malade de ça. Même l’inactivité du chef d’entreprise est sur-rémunérée ! Lorsqu’il gagne sa vie, il est surtaxé. En revanche, lorsqu’il vend sa boîte, il ne l’est pas. Les cessions de capitaux sont toujours moins taxées que la rémunération du travail. Là où un chef d’entreprise gagne le mieux sa vie, c’est lorsqu’il vend sa boîte, quand il tombe dans l’inactivité ! D’une manière générale, si nous faisions cette correction de moins rémunérer l’inactivité et mieux rémunérer l’activité, l’économie française serait beaucoup plus vertueuse et on réglerait au passage des problèmes sociaux…