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Loire-Atlantique : les artisans du bâtiment naviguent à vue

La Capeb de Loire-Atlantique vient de dévoiler les résultats de l’enquête de conjoncture annuelle qu’elle mène auprès de ses entreprises adhérentes. Si les chiffres vont plutôt vers la stabilisation de l’activité des artisans du bâtiment, ces derniers restent à 57 % inquiets pour l’avenir, compte tenu de l’incertitude du contexte économique. Une situation paradoxale qui invite le secteur à la vigilance.

De gauche à droite : Julien et Delphine Hamard, Jean-Marc Pernot (président de la Capeb), Jean-Baptiste Dupuis-Valette et Andrea Lemasson (secrétaire générale de la Capeb). ©IJ

De gauche à droite : Julien et Delphine Hamard, Jean-Marc Pernot (président de la Capeb), Jean-Baptiste Dupuis-Valette et Andrea Lemasson (secrétaire générale de la Capeb). ©IJ

« Notre enquête de conjoncture reflète un vrai paradoxe cette année entre les chiffres qui en ressortent et le ressenti que l’on a du moral de nos artisans », pose d’emblée Andrea Lemasson, secrétaire générale de la Capeb[1] de Loire-Atlantique. Jean-Marc Pernot, le président du syndicat qui entend porter la voix des artisans du bâtiment, entre ensuite dans le détail : « Après des années post-Covid compliquées, on assiste à une certaine stabilisation de la situation, avec des données qui sont plutôt positives, comme le ralentissement de la crise des matériaux. Sur ce point, on assiste à un retour à des niveaux d’augmentation normaux et non des hausses de 100, 200 voire 300 % comme c’était le cas après la crise sanitaire. On constate même de légères baisses sur le bois ou le métal, les matériaux dont les prix avaient le plus explosé. »
Pour ce qui est du chiffre d’affaires des entreprises adhérentes, « il est plutôt stable et on constate une légère amélioration de leurs trésoreries », poursuit Jean-Marc Pernot.
Côté main-d’œuvre, la Capeb constate « une sorte de rééquilibrage qui se fait entre l’offre et la demande. Les effectifs sont stables, il y a moins d’embauches dans l’année et de recrutements envisagés ». Le nombre de postes vacants est ainsi en baisse de 8 points par rapport à 2022. « Cela nous donne l’impression que les entreprises adaptent leur carnet de commandes à leur force de travail », analyse Jean-Marc Pernot. Au chapitre rémunération, 60 % des entreprises interrogées ont augmenté les salaires de leurs collaborateurs ; la moyenne des hausses constatées étant de 8 %. Dernier indicateur rassurant : près de 41 % des chefs d’entreprises interrogés ont la volonté d’investir, contre 23 % il y a trois ans.

Carnet de commandes : 3 à 6 mois de visibilité

« Dans ce contexte d’optimisme relatif, certains points de vigilance demeurent », nuance le président de la Capeb. À commencer par les carnets de commandes, qui se sont un peu raccourcis : « Sur les trois dernières années, nous étions entre 9 et 12 mois de visibilité. Là, on est revenus sur 3 à 6 mois, la même chose qu’avant Covid. »
Deuxième point de vigilance mentionné par Jean-Marc Pernot : « Le contexte économique qui est plein de doutes : la crise du logement, le pouvoir d’achat des ménages qui est en baisse… Travaillant essentiellement sur la rénovation, nos artisans constatent sur le terrain non seulement une baisse des commandes des ménages, mais aussi que ces derniers prennent de plus en plus de temps à accepter les devis de nos artisans. »
En parallèle, plusieurs annonces gouvernementales ont été faites, plongeant un peu plus les artisans dans le flou : « C’est le cas de l’annonce de la fin des chaudières à gaz en juillet dernier, avant le rétropédalage du gouvernement… Même constat pour “MaPrimeRénov“ qui subventionne les rénovations énergétiques : c’est une usine à gaz. Les professionnels comme les particuliers n’y comprennent rien ! Le dispositif manque de lisibilité globale et il en est de même pour la réforme des permis de construire. Tout cela génère beaucoup d’inquiétude chez nos artisans et cela se traduit dans notre enquête par 57 % des dirigeants interrogés qui sont inquiets quand les autres sont sereins. Dans ce contexte, les artisans restent dans le brouillard et n’ont pas d’autre choix que de naviguer à court terme. Et ils sont globalement plus épuisés que d’habitude. »