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Conjoncture régionale : le choc de mars

Comme le reste de l’Hexagone, la région Pays de la Loire est fortement impactée par la crise économique liée au Covid-19. Le baromètre mensuel de la Banque de France, établi sur les dires des chefs d’entreprise, est malheureusement éloquent.

ne baisse « brutale et générale d’activité » : tel est le constat dressé par la Banque de France au sujet de notre région dans sa note de conjoncture pour le mois de mars. « Nous vivons une période assez inédite, tant sur le fond que sur la forme », pointe Hassiba Kaabeche, rappelant de récents propos du gouverneur de la Banque de France, François Ville­roy de Galhau, comparant la période actuelle à celle de mai 68. En 1968 en effet, l’économie française avait été plusieurs semaines en partie à l’arrêt, avec un PIB qui avait baissé de plus de 5%, se rapprochant de l’estimation de -6% donnée pour le premier trimestre 2020.

Fait exceptionnel, la Banque de France a modifié son baro­mètre mensuel. En Pays de la Loire, 600 entreprises environ sont ainsi sondées chaque mois. Habituellement, le baromètre s’ouvre sur un indicateur du climat des affaires. « Parce qu’il chute dramatiquement, celui-ci ne veut plus rien dire. On a préféré faire état d’un nombre moyen de jours de fermeture par secteur d’activité qui éclaire sur l’impact de la chute d’activité », explique la directrice régionale de la Banque de France. 

Sachant que la durée totale de confinement a été de 10,5 jours en mars (hors week-end), les entreprises industrielles ligériennes ont en moyenne fermé leurs sites durant 6 jours (contre 5 au niveau national), « mais avec de grandes disparités, souligne le baromètre : aucun jour de fermeture dans la fabrication de denrées alimentaires et jusqu’à 9 jours dans les matériels de transport. » Dans les services, ce nombre est de 4 jours en moyenne (contre 6 au niveau national). Là encore, la Banque de France observe des écarts significatifs entre le secteur de l’information-communication qui n’a déclaré aucun jour de fermeture tandis que dans les autres services, ce nombre est allé jusqu’à 9.

L’intérim marque le pas

Analysant l’activité des entreprises ligériennes sur mars, la Banque de France fait d’abord un focus sur l’industrie, qui représente près de 24% des effectifs régionaux. Sans surprise, la production chute brutalement. « Tous les secteurs sont touchés, souligne le baromètre de la Banque de France, la plupart ayant stoppé ou ralenti leurs productions depuis le confinement. Seule l’industrie agroalimentaire est moins affectée. La demande est également en net recul, notamment sur le marché intérieur, impactant le niveau des carnets de commandes. Les stocks se réduisent. » L’intérim, qui constitue traditionnellement le premier indicateur d’une économie à la hausse ou à la baisse, marque le pas : les contrats sont suspendus. 

Dans les services marchands, qui représentent la moitié des effectifs, « l’activité et la demande jusqu’alors bien orientées, chutent brutalement sous l’effet de l‘épidémie et des mesures de confinement. La restauration, l’hébergement, la répa­ration automobile et le travail temporaire sont les secteurs les plus touchés alors que les activités juridiques et comptables sont les moins impactées. Les effectifs se réduisent par le non renouvellement des intérimaires. Les trésoreries, jusque-là confortables, se détériorent nettement », souligne l’étude. 

Enfin, l’activité du bâtiment et des travaux publics (près de 9% des effectifs) n’a pas été épargnée, avec la mise à l’arrêt, dès le début du confinement, de nombreux chantiers. Le gros œuvre, dont l’activité avait déjà ralenti le trimestre précédent, paie le plus lourd tribu. En revanche, si les carnets de commandes, étoffés jusque-là, se réduisent assez nettement, ils demeurent corrects et les prix des devis restent, pour l’heure, stables. Là aussi, les effectifs diminuent par le non renouvellement des intérimaires. 

Des spécificités qui pourraient s’avérer des atouts

Réalisé entre le 27 mars et le 3 avril, avant l’annonce par le chef de l’État d’un début de déconfinement à partir du 11 mai, le baromètre de la Banque de France ne peut que révéler l’incertitude des chefs d’entreprise concernant l’avenir proche, rendant les prévisions difficiles. Dans l’industrie et les services, une nouvelle baisse d’activité, plus ou moins marquée, est néanmoins anticipée par les chefs d’entreprise, quand, dans le BTP, les dirigeants envisagent une baisse encore plus forte au cours du prochain trimestre.

« Il sera intéressant de réaliser dans les prochains mois une analyse approfondie », estime la directrice régionale de la Banque de France. Une analyse qui permettra de souligner les contrastes selon les territoires au regard d’un futur rebond. Hassiba Kaabeche rappelle ainsi que la région, avant de rentrer dans la crise, bénéficiait d’une situation économique globalement favorable, les services marchands tirant la région. Autre atout, « l’économie ligérienne repose sur un certain équilibre des secteurs d’activité, quand d’autres territoires sont tirés par un secteur en particulier ». Enfin, « notre économie se caractérise par une forte demande inté­rieure et à l’inverse une moindre demande extérieure, avec des exportations inférieures à d’autres régions ». Les Pays de la Loire pourraient, de ce fait, moins pâtir de la situation internationale dégradée. « Ce qui s’avère une faiblesse à certains moments, peut devenir à d’autres un atout », résume l’experte. Dès lors que l’activité économique reprendra en France, notre région devrait donc repartir, estime Hassiba Kaabeche. Reste une inconnue : comment se fera cette reprise au plan national ?


Le recours à la médiation du crédit repart à la hausse

Interrogée fin mars, la Banque de France n’était pas encore confrontée à un afflux des demandes de médiation du crédit, qui permet de trouver des solutions entre les entreprises et les banques quand ces dernières 
viennent à réduire des lignes de crédit ou à refuser un crédit. « Beaucoup de chefs d’entreprise sollicitent leurs banques pour un PGE (Prêt garanti par l’État, NDLR), c’est principalement pour ce motif-là qu’ils saisissent 
la médiation du crédit », indique Hassiba Kaabeche. Selon la directrice régionale de la Banque de France, la situation a changé. « Entre le 17 mars et le 16 avril, nous avons eu 100 dossiers éligibles en Pays de la Loire. C’est deux fois plus qu’en 2019 et c’est principalement des très petites entreprises des secteurs de la restauration, de l’hôtellerie et du transport. »

« Dans plus de deux cas sur trois, nous trouvons des solutions pour que l’entreprise puisse poursuivre son activité, souligne toutefois Hassiba Kaabeche. Le banquier peut, plutôt qu’octroyer un PGE, étendre le découvert, accorder une facilité de caisse, accorder un prêt à court terme… Il existe différentes possibilités. On revoit l’ensemble du dossier, on complète l’information qu’on peut avoir sur la situation financière de l’entreprise, on partage ce diagnostic avec l’ensemble des partenaires bancaires et on voit comment les uns et les autres peuvent intervenir en soutien de l’entreprise. » Et de conclure : « Notre objectif est de n’en laisser aucune sur le bord de la route et si on ne trouve pas de solution avec la médiation du crédit, aujourd’hui il existe des dispositifs gouvernementaux et régionaux comme le fonds Résilience. »


Moins de créations d’entreprise

Les créations d’entreprise ont elles aussi été affectées en mars. Selon l’Insee, leur nombre a diminué de 9% en Pays de la Loire contre 19% au niveau national, mais cette contraction moins forte en apparence cache de fortes disparités selon les départements. Ainsi, la Loire-Atlantique, département très créateur d’entreprises, enregistre une baisse des immatriculations de 18%.

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