À quelques mois des municipales et alors que le rayonnement des territoires représente un défi stratégique pour les collectivités, le groupe de conseil en immobilier d’entreprise CBRE a sorti une étude sur six métropoles : Aix-en-Provence, Bordeaux, Lille, Lyon, Nantes et Toulouse. Intitulée « Le grand pari des régions », elle s’intéresse notamment à leur attractivité.
Partant du constat que près des trois quarts des Franciliens aspirent à vivre ailleurs*, l’étude rappelle d’abord les enjeux : « Quitter la région capitale symbolise la perspective d’un accès plus aisé à un logement de qualité, un environnement moins pollué et plus vert, des rythmes de vie moins stressants avec des temps de trajet domicile/travail raisonnables ».
Une métropole attractive…
Porteuses d’une image de villes économiquement dynamiques, innovantes et où il fait bon vivre, les six métropoles régionales apparaissent désormais comme une alternative crédible. Et attirent de plus en plus de nouvelles populations, notamment de cadres.
Régulièrement dans le trio de tête des villes préférées des cadres parisiens, Nantes « a su renforcer son attractivité pour répondre au défi de la concurrence entre métropoles », montre l’étude. Au niveau démographique, « le solde migratoire qui reflète la différence entre les entrées et les sorties d’un territoire et donc la réalité de sa capacité d’attraction auprès de nouvelles populations » met en lumière la cité des ducs de Bretagne (+ 10 000 habitants par an), derrière Bordeaux (+ 15 000).
Si les métropoles régionales attirent les actifs, quid de l’emploi
sur ces territoires ? « Si l’Île-de-France perd des familles au bénéfice des grandes métropoles, elle ne perd pas pour
autant les emplois correspondants », relève CBRE. Les régions
les plus attractives, dont Nantes fait partie, captent en moyenne moins d’une centaine d’emplois par an en provenance
de la région capitale.
En revanche, l’étude valorise la capacité de développement endogène des métropoles, en particulier à Nantes. Résultat : les migrations ne se soldent par forcément comme ailleurs par la perte d’emploi de l’un des membres du foyer. « L’écosystème diversifié du territoire est une force, avec des emplois qui ne sont pas que tertiaires. Cela permet plus facilement
à un conjoint de trouver du travail », analyse Fabrice
Joubert, directeur adjoint de l’agence Nantes Saint-Nazaire Développement.
L’agence, dont la mission consiste à valoriser et faire rayonner
le territoire en France et à l’international, mène un travail de fond pour attirer de nouvelles entreprises et compétences. Avec un positionnement désormais plus qualitatif que quantitatif. « Nous ciblons des filières stratégiques, en lien avec le projet du territoire : les activités liées au numérique, les industries culturelles et créatives, la santé, les énergies marines et le nautisme, sur lesquelles nous allons prospecter auprès d’une cinquantaine d’entreprises cibles. Les trois dernières années, nous avons accompagné près de 80 projets, ce qui représente 1000 à 1200 emplois annoncés », indique Fabrice Joubert, satisfait du bilan. D’autant plus que, souvent, la réalité dépasse les prévisions, à l’instar de Voyages-SNCF ou Nickel qui ont connu un fort développement local.
…mais un équilibre fragile
Le seul bémol dans ce concert de louanges pourrait être considéré comme un problème de riche. « La croissance forte c’est bien, mais c’est difficile à gérer », résume Christelle Bastard. La directrice de recherche chez CBRE observe qu’il est compliqué pour les collectivités de trouver le bon rythme de développement. Et que la hausse des prix de l’immobilier
constitue un point d’achoppement. Avec le risque que les crispations observées aujourd’hui sur le marché nantais se transforment demain en exaspération. Comme à Bordeaux qui a vu fleurir des autocollants « Parisien, rentre chez toi »… « Les métropoles font face à un nouveau défi : rester attractives,
sans perdre leur humanité », conclut Christelle Bastard.
* Étude 2019 de l’Observatoire de l’habitat
« On se sent partie prenante de ce territoire« De son aveu même
« Parisien indécrottable », Grégoire Monconduit, co-fondateur de Rosemood, n’a pas été moteur dans le choix de venir s’installer à Nantes, un peu plus d’un an après les débuts de l’entreprise créatrice de faire-part. Pourtant, le dirigeant l’avoue : « Des trois associés, je suis sans doute le plus heureux finalement ».
Quand Rosemood a emménagé sur l’Île de Nantes, fin 2011, elle comptait 15 personnes. Aujourd’hui, le compteur est monté à 110 et l’entreprise devrait faire 10 M€ de CA cette année, avec une croissance de 25%. Grégoire Monconduit vante « la culture de l’accueil incroyable » de la cité. « Ici, on est plus visible, reconnu et davantage suivi aussi. On est intégré dans la vie économique de la ville. On se sent partie prenante de ce territoire. »
Pour le dirigeant, l’implantation à Nantes a contribué à la croissance de Rosemood. « On a atteint très vite la rentabilité, ce qui n’aurait pas forcément été le cas à Paris », estime-t-il. Le coût des locaux, mais aussi la proximité des bureaux avec l’atelier, induisant une meilleure maîtrise des process et de la qualité des produits ont, selon lui, joué.
Certes, sur les six salariés venus initialement de Paris, quatre, « tous célibataires », précise le dirigeant, sont repartis. Mais depuis, Rosemood continue d’attirer des Parisiens au gré de ses recrutements. « Ce qui est fondamental aussi, souligne Grégoire Monconduit, c’est que l’on a un contrat avec les salariés beaucoup plus équilibré : à salaire équivalent, ils vivent beaucoup mieux ici. »