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Victor Geneste : « Une nouvelle ère s’ouvre pour les tribunaux de commerce »

Francophonie, lutte contre la corruption et le blanchiment, guichet unique, tribunal numérique… Les greffiers des tribunaux de commerce sont sur tous les fronts. Entretien avec Victor Geneste, greffier du TC du Mans et président du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce à l’occasion du 136e Congrès national qui s’est déroulé à Reims les 2 et 3 octobre sur le thème de la francophonie.

Victor Geneste : « Le guichet unique, nous y croyons toujours, mais l’INPI, nous n’y croyons plus ». BENJAMIN BUSSON

Parmi les sujets d’actualité qui concernent les greffiers se trouve le guichet unique. Où en est la profession aujourd’hui ?

Victor Geneste : Le guichet unique, qui devait être opérationnel il y a trois ans en juillet 2021, était totalement bloqué fin janvier 2023. En février, on nous a demandé de rouvrir Infogreffe, la plateforme dématérialisée des greffes des tribunaux de commerce. Nous avons rouvert la procédure Infogreffe en secours, à nos frais. Et cela nous a coûté plusieurs millions d’euros par an.


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Pour nous, le guichet unique est une bonne idée, celle de simplifier la vie des déclarants, quitte à nous la complexifier. La complexité, c’est notre métier, c’est à nous de la gérer. En revanche, nous ne voulons pas d’un guichet unique qui viendrait compliquer la vie du déclarant parce qu’une fois qu’il est bloqué, il doit trouver des solutions, faire appel à un certain nombre de formalistes ou de conseils et cela lui coûte beaucoup plus cher. La loi PACTE, qui avait créé ce guichet unique, promettait simplicité et baisse de coûts. Mais aujourd’hui, c’est l’inverse.

Alors que l’INPI (Institut national de la propriété industrielle) avait une obligation, fin 2023, d’améliorer la qualité de cet outil, nous pouvons dire qu’à fin 2024 ou presque, il n’y a eu aucun progrès, voire une dégradation. Or, Matignon avait dit que s’il n’y avait pas d’évolution, il y aurait une remise en cause possible de la gestion de ce guichet. Donc nous considérons que l’INPI n’a pas fait son travail. Les dysfonctionnements sont toujours majeurs. On ne parle pas de petites difficultés. Les délais de l’immatriculation pour un K-bis sont passés de 24 heures à dix jours. Les délais dans les modifications sont parfois énormes. Ce sont des allers-retours perpétuels pour le déclarant, le chef d’entreprise, et cela engendre des surcoûts. Il y a encore des formalités qu’on ne peut pas faire sur le guichet. Trois ans plus tard, il faut faire le constat de cet échec et prendre une décision politique sur sa gestion. Voilà ce que nous demandons au gouvernement. Le guichet unique, nous y croyons toujours, mais l’INPI, nous n’y croyons plus.

Quelle décision attendez-vous ?

VG : Il faut confier la gestion de cet outil à des professionnels, à des experts. On se propose, via notre GIE Infogreffe, de se substituer à l’INPI. Il ne s’agit pas de tout refaire, mais de reprendre l’outil, de le faire fonctionner et mettre en place la concertation qui n’a pas eu lieu. Et d’en faire un guichet unique qui fonctionne. On aimerait, courant octobre, avoir cette réunion plénière avec le ministère, qu’on puisse faire les constats ensemble de cet échec et qu’on nous dise exactement comment il compte le faire fonctionner, puisque la procédure de secours dans laquelle Infogreffe intervient s’arrête en décembre 2024.

Parce qu’à partir de janvier 2025, les déclarants, les chefs d’entreprise seront livrés à eux-mêmes sur ce guichet unique. En 2024, on est déjà, à date, à un million de formalités passées sur Infogreffe. Donc potentiellement, c’est un million de naufragés du guichet unique qui seront demain sans solution avec la fin de la procédure de secours. Nous tirons la sonnette d’alarme en disant : « Attention, en janvier, on ne sera plus là. »

Vous avez dit en préambule de ce Congrès, organisé en présence de 18 délégations francophones, que le modèle des greffie