Des milliers de locaux dans le monde hébergent l’activité numérique de la planète. Ce que l’on appelle communément le cloud. Visionnaires sans doute au démarrage de leurs recherches il y a cinq ans quant à la nécessaire complémentarité des transitions écologique et numérique, Vincent Le Breton et Maxime Rozier ont réfléchi à la manière dont les data centers pourraient se passer de climatiseurs, dont le seul but est de rafraîchir les espaces de stockage, alors même qu’ils représentent la quasi-totalité de l’énergie dépensée dans ces centres. Après des années d’études, ces deux ingénieurs, basés à Guérande, ont imaginé un nouveau système de refroidissement via un procédé thermodynamique, baissant la production d’énergie et les émissions de CO2 de 40 % et utilisant l’eau en circuit fermé.
La promesse : haute efficacité énergétique et faible empreinte carbone. « On sait qu’en se plaçant près de l’eau, celle-ci, par son mouvement et sa fraîcheur, va participer au refroidissement », explique Vincent Le Breton. Des data centers immergés existent déjà, mais coûtent très chers, avec une maintenance avoisinant « 1 M€ pour pouvoir sortir les éléments hors de l’eau » explique le co-fondateur.
UNE SOLUTION FLOTTANTE NOMADE ET MODULABLE
Aussi, l’objectif des deux ingénieurs a été de concevoir une solution nomade et modulable, dans une structure simple et robuste, qui serait posée à la surface de l’eau.
Avec, à la clé, des avantages non négligeables listés par les co-concepteurs : « répondre à la problématique du foncier qui se fait rare et coûteux, au temps long des permis de construire, au coût de la construction, participer à la réduction d’artificialisation des sols ». Avec un budget de 900 000 €, dont un tiers de fonds propres, un tiers d’aides par la Région et Bpifrance et un tiers de subventions via des appels à projets remportés, Denv-R a pu mener à bien ses études de R&D. « Nous souhaitions d’abord démontrer la viabilité du projet avant d’actionner une levée de fonds », argumente Vincent Le Breton.
Le dépôt du brevet venant d’être réalisé, le premier démonstrateur devrait trouver sa place sur les quais du port de Nantes début 2023, avec deux autres modèles attendus
en 2024-2025, puis une cinquantaine espérée à horizon 2030. Maxime Rozier l’affirme : « Il y a urgence, avec l’actualité que nous connaissons : les dépenses d’énergie représentent entre 20 et 25 % du coût d’un data center. Elles ont triplé en un an et pourraient représenter 50 % dans les mois qui viennent si ça continue ainsi. »
Il y a donc un vrai marché à prendre, en étant moins énergivore et moins coûteux. La structure conçue par Denv-R vient de remporter un trophée dans la catégorie Infrastructure lors des 12e Assises du port du futur à Lorient. Son coût de construction se situe autour de 1,7 M€ (structure et baies comprises) pour une puissance de 200 kilowatts, pourra héberger les données de 1 000 à 1 500 entreprises. Ensuite, l’énergie consommée sera très faible. « Il faut absolument prioriser l’efficacité énergétique et le local. Seulement 5 % des données européennes sont stockées en Europe alors que nous pourrions en stocker 80 % », indique Vincent Le Breton.